L'île de Mayotte, dans l'océan Indien, a décidé avant-hier par 95,2% de «oui» à un référendum d'acquérir le statut de département français et de s'arrimer un peu plus à Paris, malgré les îles voisines des Comores qui ont dénoncé la «politique coloniale» de la France. «C'est un moment historique pour Mayotte et pour les Mahorais (les habitants de l'île, ndlr). C'est un rêve porté par plusieurs générations qui se réalise ce 29 mars 2009», s'est félicité le président français Nicolas Sarkozy. Selon les résultats complets et officiels diffusés par le ministère de l'Intérieur, le oui l'a emporté avec 95,2% des suffrages exprimés avec un taux de participation de 61,02%. Les 72 035 électeurs inscrits ont décidé de faire de Mayotte en l'an 2011 le 101e département français -et le 5e département d'outremer (DOM)- étape ultime d'un processus entamé en 1974, lorsque les Mahorais avaient décidé de rester Français, quand les trois autres îles des Comores optaient pour l'indépendance. Le gouvernement des Comores, avec le soutien de l'Union africaine (UA), considère cette consultation dans un «territoire occupé» comme «nulle et non avenue». Il a constamment mais vainement demandé à Paris de renoncer à un tel projet, qui éloigne encore plus la perspective d'une «réunification» de l'archipel de l'océan Indien. Environ 500 personnes ont manifesté dimanche à Moroni contre le référendum, défilant de la place de l'Indépendance jusqu'à l'ambassade française, devant laquelle ils ont brûlé un drapeau français et dénoncé «la politique coloniale de la France aux Comores». Cette hostilité comorienne relève d'«une vision de l'Histoire», a estimé le secrétaire d'Etat français à la Coopération Alain Joyandet, pour qui ce référendum est un «oui à la France». A Mayotte, les principaux partis politiques avaient appelé à voter oui, et une vaste campagne a été menée en français et dans les deux principales langues locales. Les seules voix discordantes sont venues de dignitaires religieux musulmans, qui dénoncent la disparition progressive de certaines de leurs prérogatives et craignent une «acculturation». Certaines pratiques culturelles anciennes vont être bousculées avec la victoire du oui. La départementalisation mettra fin à la polygamie, et entraînera la disparition du tuteur matrimonial «wali» et la réduction des attributions du «cadi» (juge musulman)«Aujourd'hui est un jour important. Nos aînés se sont battus pour rester dans la France. C'est à nous de finir le travail» , a expliqué Youssoufou Majouai, 39 ans, devant un bureau de vote. Avec un PIB trois fois inférieur à celui de l'île française de la Réunion, mais neuf fois supérieur à ses voisins des Comores, Mayotte espère tirer de nouveaux bénéfices du changement de statut. Mais le rattrapage avec la France sur les aides sociales sera très progressif -sur au moins 20 ans à partir de 2011- tandis que les Mahorais seront soumis à des impôts (taxe d'habitation, taxe foncière) qu'ils ignoraient jusqu'ici.