La réforme du code pénal se précise de plus en plus en Espagne où le gouvernement Rajoy est en train de préparer un projet de loi pour mieux combattre le «djihadisme». De retour, ce week-end, des Etats-Unis où il a eu une série de rencontres avec les responsables des services de sécurité nationale et de l'Intelligence, le ministre de l'Intérieur, Jorge Fernández Díaz, a déclaré que «nous sommes en train d'étudier la réforme transversale de la législation pour donner une réponse efficace à cette menace». Il a annoncé la réforme du code pénal, de la loi en matière de procédure criminelle, la loi sur le code civil et la loi sur les étrangers. Objectif recherché : durcir la législation pour réprimer sévèrement les ressortissants espagnols qui ont pris part au djihad aux côtés des organisations terroristes en Irak, en Syrie, ou au Sahel. Le ministre ne rechigne pas sur les moyens légaux pour combattre ce phénomène qui menace aussi son pays, puisque les «djihadistes» espagnols pourraient être déchus de la nationalité lorsque celle-ci a été acquise par résidence, soit dix ans de présence légale en Espagne. Le futur projet de loi prévoit de sanctionner le «djihadisme» ou l'adhésion à cette idéologie, comme «délit de terrorisme». En vertu de cette nouvelle disposition légale, des peines sévères sont prévues. Elles vont, selon la gravité des délits, de l'interdiction d'entrée en territoire espagnol et par voie de conséquence dans tout l'espace Schengen, à l'expulsion vers le pays d'origine, à la suppression des droits sociaux et des subventions sociales jusqu'à la perte de la nationalité espagnole. Cette dernière disposition ne devrait pas soulever beaucoup d'indignation au sein de l'opinion publique dans la mesure où la quasi-totalité des «djihadistes» espagnols connus sont d'origine marocaine. Ils sont officiellement environ 80 à avoir intégré les rangs de l'Armée Islamique d'Irak et du Levant (AIIL), commandée par l'autoproclamé khalife Aboubakr Al Baghdadi. Les services de renseignements espagnols ont identifié jusque-là 51 d'entre eux, tous présents actuellement en Syrie et en Irak. L'Espagne craint par-dessus tout le retour de ces «djihadistes» qui sont bien préparés aux maniements des explosifs et, surtout, motivés pour commettre des attentats spectaculaires dans les grandes villes comme Madrid ou Barcelone. C'est la raison pour laquelle l'état d'urgence a été élevé presque à son maximum, la semaine dernière. Les contrôles ont été renforcés dans les ports et aéroports pour prévenir les arrivées de ces combattants. Jusque-là seul trois d'entre eux ont été arrêtés, dont un à l'aéroport de Malaga. Plus préoccupant encore est l'âge, et parfois, le sexe des candidats au djihad. Le mois dernier, une adolescente de 16 ans, d'origine marocaine, a été arrêtée dans un aéroport au moment où, en compagnie d'une autre jeune fille de 18 ans, également d'origine marocaine, elle s'apprêtait à se rendre en Syrie via la Turquie. Elle avouera avec «conviction» sa disposition pour le djihad, et reconnaîtra avoir été captée par ses recruteurs via Internet. Les recrutements via les réseaux sociaux ont compliqué la tâche des services de renseignement. «C'est connu que des dizaines de recrues se sont déplacées vers le front (syrien et irakien) depuis les territoires de nos voisins (allusion au Maroc et à la France) où les retours peuvent se compter par dizaines lorsque chez nous on les enregistre en unités», estime le ministre espagnol de l'Intérieur qui tient, toutefois, à ne pas faire dans l'alarmisme. «Tous les pays civilisés sont la cible du terrorisme !», dit-il pour justifier la panoplie de mesures envisagées à son initiative, dont la plus inédite sera sans doute la perte de la nationalité.