A l'instar des autres régions du pays, le commerce informel s'est développé de façon exceptionnelle ces dernières années à travers la wilaya de Béjaïa. En effet, de nombreux commerçants exercent leur métier, sans papiers, sans autorisation et évitent, évidemment, de payer les taxes et impôts auxquels ils sont soumis par la loi. Ces marchands, qui prospèrent dans les villes et les agglomérations d'une certaine importance, vendent un peu de tout. Ces commerces peuvent être des kiosques à tabac, bonbons et articles de pacotille, ou des magasins respectables où l'on vend des vêtements en provenance de Chine, de la quincaillerie, des produits alimentaires et, surtout, de la bouffe bon marché, tels les fast-foods, commerces des quatre saisons et gargotes. Ne se souciant ni de l'hygiène ni de la qualité des produits qu'ils proposent aux consommateurs, ils exercent pratiquement dans l'impunité totale. Ce commerce illicite induit des problèmes de santé aux citoyens et des pertes pour le Trésor public, puisque les marchandises vendues sur les trottoirs proviennent de la contrebande. En outre, les produits écoulés ainsi sont dans la plupart des cas contrefaits. La Direction du commerce de la wilaya de Béjaïa procède régulièrement à des tournées dans la région. Mais cette institution ne peut «sévir» que contre les commerces ayant pignon sur rue, c'est-à-dire les commerçants exerçant dans les magasins et les boutiques. Plusieurs locaux ont été fermés pour manquements à l'hygiène, défaut du registre du commerce, absence de factures. Mais cela ne semble pas avoir résolu le problème, puisque les tricheurs sévissent encore. Quand les petits commerçants échappent au fisc Une petite tournée à travers les différentes régions de la wilaya montre l'ampleur du phénomène. Dans plusieurs cités et quartiers, on voit souvent des locaux commerciaux en exercice et dans les différents secteurs. Mais, au fond, aucune pièce administrative ne justifie l'exercice de l'activité. Des gargotes, des cafés, des commerces des fruits et légumes et autres locaux s'ouvrent chaque jour au public mais, sans pour autant disposer de la moindre justification légale. Un gargotier nous a avoué qu'il exerce son activité «pour vivre», estimant qu'il est dans son bon droit puisque c'est son gagne-pain. Notre interlocuteur reconnaît qu'il est dans l'illégalité, mais il se justifie en nous disant : «Je ne peux pas payer les impôts, si je le fais, je ne pourrais pas m'en sortir financièrement parlant.» Des marchands des fruits et légumes que nous avons abordés concernant cette question estiment que les impôts grèvent leur budget et que beaucoup d'entre eux n'ont d'autre choix que d'éviter le fisc. «Sinon, c'est la faillite», nous dit un jeune marchand de vêtements féminins, installé du côté du marché de la ville. Ainsi donc, vu le taux d'imposition, beaucoup de commerçants préfèrent exercer leur activité au noir quand bien même perdraient-ils certains avantages, la couverture sociale notamment. Le phénomène semble se propager également dans les campagnes. Sur les routes, il n'est pas rare de voir des paysans proposer des fruits et légumes, comme c'est le cas sur la RN 9 et la RN 12. Les voyageurs qui se rendent régulièrement à la ville de Béjaïa auront certainement remarqué que ces commerces attirent une importante clientèle, intéressée, semble-t-il, par la fraîcheur des produits agricoles et par les prix qui défient toute concurrence. Quelle alternative pour mettre un terme à cette situation ? Les services de la Direction de la concurrence et des prix de la wilaya de Béjaïa affirment avoir procédé à la fermeture de plusieurs locaux commerciaux pour infraction à la réglementation (défauts de facturation, non-respect des normes d'hygiène et absence du registres du commerce). Mais, avouent-ils, le problème persiste toujours puisque les commerçants sanctionnés activent toujours. C'est durant la saison estivale que le problème se pose avec acuité. Les commerces illicites pullulent et constituent de la sorte un réel danger pour la santé des citoyens. La situation empire lorsqu'on sait qu'elle crée des tensions entre les commerçants «légalistes» et les «fraudeurs». Ceux qui disposent du registres du commerce, qui paient les impôts et taxes et qui sont déclarés à la Casnos sont victimes des pratiques illégales des autres. «Ces faux commerçants nous posent beaucoup de problèmes car, sans disposer du moindre papier qui justifie leur activité, ils exercent le plus normalement du monde sans être inquiétés», nous dit un commerçant fort connu à Tichy qui ajoute que «cette situation est inadmissible, il faut que l'Etat sévisse». Signalons toutefois que la protection de la santé des consommateurs est une action prioritaire pour les services de la Direction du commerce. Un plan d'urgence doit être mis en branle pour lutter contre les tricheurs et le commerce informel. Pour le bien de tout le monde.