Le bilan des affrontements qui se sont produits mardi en Turquie entre les forces de l'ordre et les manifestants pro-kurdes réclamant une intervention à Kobani, ville syrienne assiégée par les terroristes de l'Etat islamique (EI), s'est alourdi à dix-huit morts. Au total, des milliers de Kurdes ont défilé à travers la Turquie pour protester contre la non-intervention des troupes turques aux côtés des syriens de Kobani, ville proche de la frontière turque. De violents heurts ont éclaté lorsque la police a entrepris de disperser les manifestants, faisant, outre les 18 morts, des dizaines de blessés. Les manifestations ont eu lieu pour l'essentiel dans le sud-est du pays, centre de la communauté kurde, mais aussi à Istanbul, la plus grande ville du pays, et dans la capitale, Ankara. C'est à Diyarbakir, la plus grande ville kurde de Turquie, dans le sud-est, que le bilan des affrontements a été le plus lourd, avec au moins huit morts, selon une source policière citée par l'agence de presse DHA. Les heurts ont également fait des victimes dans les provinces de Siirt, Batman et Mus. A Istanbul, le gouverneur a annoncé qu'une centaine de personnes avaient été interpellées pour «participation à des rassemblements illégaux». Il a aussi fait état d'une trentaine de blessés, dont huit policiers. Un couvre-feu a été instauré dans cinq provinces à prédominance kurde du sud-est. Le ministre de l'Intérieur, Efkan Ala, a appelé à l'arrêt des manifestations. «La violence n'est pas une solution. La violence entraîne des représailles. Cette attitude irrationnelle doit cesser tout de suite», a-t-il dit mardi à la presse. L'inaction des autorités turques à Kobani n'exaspère pas seulement les Kurdes. Un haut responsable américain interrogé mardi par le «New York Times» a, sous le sceau de l'anonymat, fait état d'une «colère croissante contre la Turquie qui traîne les pieds pour empêcher un massacre à moins d'un kilomètre de sa frontière». «Ce n'est pas comme cela qu'un allié de l'Otan est censé agir alors que l'enfer se déchaîne à un jet de pierres de sa frontière», a-t-il ajouté. Alors que Kobani semblait sur le point de tomber, des frappes aériennes de la coalition internationale menée par les Etats-Unis ont repoussé hier les combattants de l'EI vers les faubourgs de la ville, ont affirmé des responsables kurdes joints dans la ville assiégée. Des experts en question de défense doutent cependant que des raids aériens suffisent seuls à stopper la progression des terroristes. Le président turc, Recep Tayyip Erdogan, a lui-même estimé mardi qu'une intervention terrestre serait indispensable pour éliminer la menace de l'EI.