Le moudjahid Abdelkader Kouini dit Nacer, un membre de l'Organisation spéciale (OS), a évoqué la difficulté d'acquérir des armes et des munitions pour préparer le déclenchement de la Révolution armée, dans la nuit du 1er novembre 1954. "A la veille du 1er novembre 1954, nous nous sommes activement préparés pour être au rendez-vous avec l'histoire, répondre à l'appel du devoir national pour libérer le pays du joug colonial", a souligné ce moudjahid, aujourd'hui âgé de 89 ans, dans un entretien à l'APS. Abdelkader Kouini a adhéré à la cellule d'Aïn Témouhent de l'OS, dès sa création en 1948. "De par le métier de plombier que j'exerçais à l'époque, j'ai été choisi pour faire partie d'une équipe d'artificiers chargée de fabriquer des bombes et des engins explosifs", se souvient-il, ajoutant que cette cellule était la seule à s'occuper de cette tâche à l'échelle de tout l'Ouest du pays. "En janvier 1949, Hamou Boutlélis a organisé au profit de notre cellule une formation sur les techniques de fabrication d'explosifs. C'est un militant nationaliste, un certain Mohammed Arab, qui est venu de Chlef pour encadrer ce stage, dans une ferme à Ain Trid, dans la wilaya de Sidi Bel Abbès", raconte-t-il. Après ce stage, le moudjahid Kouini est revenu à Ain Témouchent, où il a pris en charge la direction de la cellule des artificiers. Un mois plus tard, l'OS a été démantelée et ses membres arrêtés. A Aïn Témouchent, lors d'une perquisition au siège de la permanence du MTLD, les militaires français ont découvert un registre portant les noms des membres de l'Organisation. C'est ainsi que tous les membres de la cellule des artificiers ont été arrêtés. Il s'agit, entre autres, d'Abdelkader Kouini, Rebahi Abdelkader, Youcef Belaouedj, Miloud Ait Maamar et de Benaouda Ouadah. "Arrêtés le 12 février 1951, nous fûmes condamnés, le 6 mars de la même année, pour les chefs d'inculpation d'atteinte à l'ordre et la sécurité de l'Etat. Le procès des 47 membres de l'OS des différentes régions de l'Ouest du pays, se déroula à Oran. Des peines ont été infligées à tous ces militants", indique le même moudjahid, condamné, quant à lui, à une année de prison ferme. A sa sortie de prison, il retourna à Aîn Temouchent pour poursuivre son activité militante. En août 1953, le moudjahid Kouini est condamné, une nouvelle fois, à 18 mois de prison, pour rébellion, suite à l'occupation du siège de la mairie de sa ville natale. La peine a été réduite à six mois après un pourvoi en cassation. "Après avoir purgé ma peine à la prison militaire d'Oran, je fus libéré le 4 février 1954", indique le moudjahid. "A mon retour à Aïn Temouchent, j'ai trouvé le parti en plein crise. La guerre entre les messalistes et les centralistes était à son comble. L'activité militante est devenue impossible dans les centres urbains, d'où notre décision de nous replier dans les zones rurales et dans les campagnes, explique-t-il. Les armes faisaient défaut En cette période, tous les efforts étaient axés sur la formation militaire, la collecte de fonds et de quelques armes, et sur la constitution des premiers groupes armés. "Dans ce cadre, j'ai été désigné, en compagnie de Hadj Benalla, pour me rendre à Kheraissia, dans la région de Blida, pour suivre une formation de 36 heures dans la fabrication d'explosifs. La formation, assurée par le chahid mustapha Benboulaid, avait regroupé des éléments venus de plusieurs régions du pays", se souvient-il. A l'issue de ce stage, en août 1954, un atelier de fabrication de bombes artisanales a été installé dans la ferme d'un militant, distante de 9 km de la ville d'Ain Témouchent. Le moudjahid Kouini se souvient qu'une intervention du chahid Ahmed Zabana a permis de régler des problèmes techniques liés à la soudure. 56 bombes et engins explosifs ont été ainsi fabriqués et prêts à l'emploi. Celles-ci ont été acheminées jusqu'à Oran afin que le Commandement de la wilaya puisse les distribuer aux groupes désignés pour les faire exploser à travers toute la région Ouest. Le déclenchement du combat libérateur était activement préparé. "Nous nous sommes réunis à El Mallah, dans la maison de Berrahou Kada, pour définir les objectifs français à attaquer au moment opportun et recenser les armes disponibles", raconte le moudjahid, ajoutant que l'armement détenu par le groupe se limitait à deux pistolets automatiques de type (65/7), un fusil et à 47 cartouches, biens d'un militant ayant pris part à la 2ème guerre mondiale. C'est un agent de liaison, un certain Kerarma Benaouda, dépêché par Larbi Ben M'hidi, qui a communiqué au groupe d'Aîn Temouchent, le jour "J" pour lancer la guerre de libération nationale. Il était également porteur du texte de la proclamation du 1er novembre 1954. "Mon groupe, composé de 12 éléments, est sorti, dans la nuit du 31 octobre 1954 de la ville de Ain Témouchent, pour attendre, près de la plage de Sidi Djelloul, un groupe venant d'El Malah, censé disposer suffisamment d'armes pour nous permettre d'exécuter notre mission", se souvient le moudjahid. Malheureusement, le groupe d'El Malah qui n'a pas pu réunir les armes. Il s'est contenté de saboter la voie ferrée au niveau de Chaabat El Lahm. "C'était l'une des actions menées dans notre région", a-t-il ajouté. Le moudjahid Kouini a, toutefois, assuré que l'action militaire ne s'est pas arrêtée à ce stade, en dépit du nombre dérisoire de moyens et d'armes. "Nous avons poursuivi avec détermination et volonté les actions armées, surmontant toutes les difficultés. La situation s'est nettement améliorée, à partir d'Octobre 1955, avec l'arrivée des armes acquises à l'étranger, par le commandement de la Révolution. Plusieurs batailles ont été menées et remportées par l'ALN", ajoute-t-il.