Un jeune Algérois a été condamné hier par le tribunal criminel près la cour d'Alger à une peine de 18 mois de prison ferme pour incitation à des actes terroristes et apologie au terrorisme via internet. Les faits remontent au mois de juin 2008, lorsque l'accusé, âgé de 26 ans, consultait un site web des anciens de l'armée populaire nationale. Sur le forum du site, il déposa un commentaire dans lequel il appelait «à tuer les hauts gradés de l'armée qui ont du sang sur les mains», citant ensuite les policiers, les gendarmes et les hommes politiques. Selon les chefs d'inculpation énoncés par le greffier, il aurait aussi envoyé ce mail à partir d'un cybercafé d'El Biar à un autre site web appartenant «au groupe terroriste El Rachad». Bien que reconnaissant avoir rédigé la lettre, l'inculpé avançait toutefois une tout autre version des faits. «J'étais en train de surfer sur le net et j'ai tapé «Algérie» sur un moteur de recherche. Au fil des clics, je suis tombé sur un site d'anciens de l'armée. On y affirmait que certains militaires avaient commis des meurtres de civils innocents et de victimes appartenant aux forces de l'ordre. Il y avait aussi des vidéos montrant des personnes en tenue de combat perpétuant des massacres», affirma-t-il. Choqué et très ému, il déposa sur le forum le commentaire presque «spontanément». Il poursuivit en jurant qu'il voulait dire que «si des militaires avaient effectivement fait tout cela, ils devaient le payer», ajoutant : «Je n'ai absolument rien à voir avec un quelconque groupe ou mouvement terroriste.» La juge tenta alors de comprendre comment le mail avait atterri sur le portail de «El Rachad».Le jeune homme, niant fermement ces faits, assura «n'avoir jamais visité ce site, n'avoir jamais entendu parler de ce groupe ou d'un autre et n'avoir jamais eu aucune relation ou contact avec une quelconque personne suspecte». La présidente de la cour, poursuivant son interrogatoire, lança au prévenu : «Tu t'es déjà rendu en Arabie Saoudite, au Emirats arabes unis, en Tunisie et en France. D'ailleurs, lorsque les policiers t'ont arrêté, tu étais en partance à destination de la Libye. Qu'allais-tu y faire ?» «Chercher du travail et y passer des vacances», répondit-il. Ce qui sembla des plus étranges au procureur général, qui trouva suspect que l'accusé, bien qu'ayant eu la possibilité de s'installer au Canada, lui préféra des pays arabes. Au vu des faits, elle requit une peine de réclusion criminelle de sept années, assortie d'une amende d'un montant de 200.000 DA. Les avocats de la défense entamèrent leur plaidoirie en rectifiant un détail qui paraissait insignifiant mais qui a changé beaucoup de choses. «L'accusation a été fondée sur une traduction vers l'arabe de la lettre d'origine, rédigée en langue française. En arabe, les policiers, gendarmes et hommes politiques sont inclus dans la liste des gens à abattre. Mais en nous référant au document original, on peut voir que les trois sont inclus dans la liste des innocents», argua l'un d'eux. «L'affaire a d'abord été traitée par un tribunal militaire qui l'a renvoyée au civil. Ce qui démontre parfaitement qu'il n'y a eu aucune menace ou atteinte à la sécurité nationale», ajouta-t-il, plaidant l'innocence totale de son client qui payait pour avoir été naïf et influençable. A l'issue des délibérations des magistrats, le jeune homme fut reconnu coupable à l'unanimité de tous les chefs d'inculpation. On lui accorda cependant des circonstances atténuantes et de ce fait, il a été condamné à une peine de prison ferme de 18 mois, ainsi qu'à une amende de 200 000 dinars.