Le parcours militant de Jacqueline Guerroudj, moudjahida et ancienne condamnée à mort, décédée dimanche à Alger à l'âge de 95 ans, représente un symbole avéré des luttes contre l'oppression et l'injustice, et reflète tout l'engagement des défenseurs de la cause algérienne d'origine européenne, témoignent des amis de la défunte et des spécialistes en histoire. L'engagement de Jacqueline Guerroudj à côté de son époux, le moudjahid Abdelkader Guerroudj, dit Djilali, et sa fille Danielle Minne, dans la libération de l'Algérie du joug colonial, démontre un patriotisme incontestable et un combat solide pour la justice, la liberté et la paix, selon des témoignages recueillis mardi par l'APS au cimetière d'El Alia, où la défunte a été enterrée au carré des martyrs. La moudjahida Louisa Ighilahriz, pour qui Jacqueline Guerroudj a beaucoup contribué dans son éducation militante et sa détermination à aller de l'avant dans le combat libérateur, a qualifié la défunte de "patrimoine national" de l'histoire de l'Algérie. "C'était notre petite maman en prison. Nul n'est éternel, mais c'est toujours dur de perdre quelqu'un de très cher. Jacqueline n'a jamais baissé les bras. Elle était consciente et convaincue que l'Algérie aller recouvrer sa liberté. Elle n'a jamais remis en cause l'indépendance de l'Algérie", a indiqué Louisa Ighilahriz avec émotion. "Jacqueline est d'origine européenne, mais elle a choisi l'Algérie, pays qu'elle a fait sien et n'a jamais quitté", a-t-elle ajouté. L'universitaire et professeur en histoire, Mohamed El Korso, a indiqué que "l'Algérie perd en Jacqueline Guerroudj une des militantes des plus symboliques de la guerre de libération nationale d'origine européenne, auxquelles il faut rendre un grand hommage". "Jacqueline a abandonné son appartenance à la France pour épouser la cause du peuple algérien. Elle s'est reconnue dans la cause algérienne et dans le peuple algérien, d'ailleurs, elle n'a pas quitté l'Algérie même pendant les années les plus durs de terrorisme", a souligné M. El Korso. Pour le président de l'Association des anciens condamnés à mort, Mustapha Boudina, la défunte était "une sœur de lutte qui a donné toutes les preuves de son patriotisme et de son amour pour l'Algérie, et qui a continué, après l'indépendance, à militer d'une manière très forte et engagée pour l'édification de l'Etat républicain". Il a salué aussi l'engagement et les sacrifices de la défunte consentis avec son époux Abdelkader pour l'indépendance de l'Algérie. Native de Rouen (France) en 1919, Jacqueline Guerroudj (née Netter), est arrivée en Algérie en 1948. Elle enseigna le français à Chétouane dans une école près de Tlemcen entre 1948 et 1955. Elle a intégré les CDL (Combattants de la libération) affiliés au Parti communiste algérien (PCA) vers le milieu des années 1950 avant d'être désignée agent de liaison dans les commandos de l'Armée de libération nationale (ALN). Arrêtée en 1957 parmi un groupe de militants et de militantes de la cause nationale et condamnée à mort, la défunte fut graciée suite à une campagne internationale en faveur de la libération du couple Guerroudj. Sa fille Danielle Minne, qui fut aussi moudjahida dans les maquis de la wilaya III historique, a été condamnée à 7 ans de prison. Jacqueline Guerroudj est l'auteure de "Des douars et des prisons" (Bouchène, 1993), un ouvrage témoignage sur sa vie d'enseignante et de détenue politique à la prison de Serkadji d'Alger.