Ils se trimbalaient dans un véhicule où les policiers avaient découvert des plaquettes de came soigneusement déposées dans la boîte à gants. Ils étaient trois, et les trois nient en jurant qu'ils étaient descendus prendre un café et au retour... Le juge du tribunal de Koléa avait sous les yeux un lourd dossier dans lequel il lui fallait trouver le (ou les) coupable(s) de détention et de commercialisation des douze plaquettes de drogue. Rabah, Ahmed et Omar F. affirment ensemble qu'ils n'y sont pour rien. «Et pourtant, ce poison a dû être mis dans la boîte à gants par quelqu'un ?», dit Hadj Rabah Barik, le président de la section pénale. «Ce n'est pas moi, ni moi, ni moi, nous sommes innocents», disent-ils. Ce qui fâche presque le juge qui ordonne le calme et le respect de l'audience.«Le tribunal a tout le temps. Nous ne sortirons d'ici qu'avec la vérité», ajoute le magistrat. Samir Hamel, le procureur, pose une question : «Etiez-vous tous les trois au départ de Bab El Oued ?» «Non, j'ai pris Ahmed au Triolet», répond Omar.«Et Rabah ?», insiste le représentant du ministère public.«Ils m'ont trouvé au village. Ce sont de vieilles connaissances. Nous avions résolu de prendre un café. Au retour, une fois installés dans la voiture nous avions roulé près de trois cent mètres avant que les policiers nous invitent à une vérification d'identité...» «A vrai dire, les policiers avaient eu une information d'une virée de revendeurs de drogue dans la cité», tranche alors Hadj Barik. «Vos demandes, Monsieur le procureur ?», interroge le président qui s'éponge le front en ce dimanche caniculaire de printemps 2009. Hamel se lève et va pointer le doigt vers les trois inculpés. «Il n'y a aucun doute qu'ils étaient de mèche et savaient ce qu'ils avaient entre les mains. Dix ans de prison contre Ahmed et Omar. Quinze ans contre Rabah», marmonne le procureur qui avait presque deviné le silence des trois détenus qui avaient comparu sans avocat, estimant qu'étant démunis ils ne pouvaient honorer leurs défenseurs. Le dernier mot de Omar, Ahmed et Rabah aura été : «La relaxe.»Le juge hoche la tête avant d'ironiser :«La relaxe et rien d'autre. La semaine prochaine, vous serez fixés.»Le policier de faction à la barre accompagne le trio de détenus directement aux geôles et non pas au box où sont encore assis une dizaine de détenus.