A la tête de la sélection algérienne depuis l'été dernier, Christian Gourcuff peine à imposer sa méthode. Elimination précoce à la CAN, difficultés dans le jeu, polémiques avec certains joueurs… Malgré les embûches, le Breton ne transige pas et garde le cap qui lui est fixé : construire un groupe compétitif pour la CAN 2017 et la Coupe du monde 2018. Vahid Halilhodzic. Christian Gourcuff. Le colérique et le placide. Le pragmatique et le tacticien. L'ancien… et l'actuel sélectionneur de l'Algérie. Voilà huit mois que le Breton a remplacé le Bosnien à la tête des Fennecs. Une transition difficile au vu du lourd héritage laissé par son prédécesseur. L'été dernier, l'Algérie sortait ainsi du meilleur Mondial de son histoire, clos par une élimination perçue comme héroïque face à l'Allemagne, en huitième (1-2). Huit mois plus tard, Christian Gourcuff se voit bien obligé de dresser un bilan mitigé de ses débuts en terre algérienne. Tout avait pourtant bien commencé : une série de cinq victoires consécutives entre septembre et novembre permettait aux Verts de prolonger l'état de grâce brésilien. Au moins pour un temps. Battue au Mali (2-0), tenue en échec en Tunisie (1-0), la sélection algérienne allait aborder la CAN dans une position bâtarde, coincée entre l'énorme attente suscitée et les inévitables doutes liés à la nouveauté. L'aventure guinéenne tourna court pour les Algériens, battus en poule par le Ghana (1-0) puis éliminés par la Côte d'Ivoire en quarts de finale (3-1). Programmée pour le titre, l'Algérie a assez mal vécu cet échec, fût-il causé par le futur vainqueur de la compétition. Et ce n'est pas la défaite au Qatar (1-0), jeudi, pour le premier match de la Khedra depuis la CAN, qui aidera à la ferveur. Evidemment, le poste de Christian Gourcuff n'est pas en danger. Celui qui a entraîné Lorient pendant 25 ans (avec quelques coupures) s'inscrit dans la durée à la tête de la 18e nation mondiale au classement Fifa. Un 4-4-2 qui n'imprime pas encore Et pourtant. La méthode Gourcuff peine à s'imposer. Il était l'homme qu'il fallait, jugeait-on à Alger, après près de trois ans sous «coach Vahid». Halilhodzic avait fait de la sélection une équipe rugueuse, disciplinée, présente dans les gros matches. Gourcuff allait y ajouter son empreinte, ses principes de jeu qui convenaient si bien à la tradition algérienne. Autant dire que le pari est (pour l'instant) loin d'être réussi. L'Algérie de Gourcuff n'a gagné qu'un seul de ces cinq matches contre des grandes nations africaines. Dans le jeu, elle éprouve les plus grandes peines du monde à se fondre dans le moule du 4-4-2 à plat que lui impose son entraîneur. Contre le Qatar, l'Algérie est apparue amorphe, faisant circuler le ballon latéralement sans jamais parvenir à trouver la faille dans un bloc adverse pourtant pas insurmontable. Dans la gestion humaine, plusieurs choix tactiques tardent à s'avérer payants, à l'instar du replacement de Brahimi en deuxième attaquant axial. Les premiers mois de Gourcuff ont également été émaillés de problèmes relationnels, dont la presse algérienne a fait les choux gras. Guedioura, Soudani ou Djabou ont tous été écartés à un moment ou un autre, le dernier nommé s'offrant même une pique acerbe à l'encontre du sélectionneur. En 2017, l'Algérie rêve d'un sacre à domicile Autant de difficultés qui ne font pas oublier l'essentiel : lorsque les dirigeants du football algérien ont choisi de faire appel à Gourcuff, ils étaient loin d'avoir en tête un obscur match amical face au Qatar, un après-midi de mars 2015. Les objectifs du sélectionneur des Fennecs sont ailleurs. Lui, l'homme du long terme, s'est vu fixer une mission de quatre ans, avec pour points d'orgue la CAN 2017, qui pourrait avoir lieu… en Algérie (réponse de la CAF dans 10 jours), et la Coupe du monde 2018. D'ici là, Christian Gourcuff aura probablement le temps de se faire à ce pays si original, à son public si exigeant et à sa ferveur parfois excessive. Il aura probablement le temps de construire son groupe à l'image de ses idées et son équipe à l'image de ses principes. Il aura probablement le temps de se faire au rythme particulier de l'équipe nationale, loin du quotidien prenant qui fut le sien pendant des années. Bref, d'ici là, Christian Gourcuff aura probablement le temps de devenir sélectionneur.