Loin des feux de la rampe, le burnous a été fêté, pour la seconde fois avant-hier au village Houra, commune de Bouzeguène, à une cinquantaine de kilomètres à l'Est de la capitale du Djurdjura. En effet, le village Houra a abrité, le week-end dernier, la 2e édition du Festival du burnous, placé cette année sous le thème «Isegh d Trugza», à l'initiative du comité du village et en collaboration avec les association Assa et Yakoubi-Ferhat. Trois jours durant, cet habit traditionnel, qui est une symbolique, a été fêté et remis au goût du jour dans cette région profondément attachée aux us et coutumes de la région et au patrimoine jalousement gardé. Houra a abrité également plusieurs stands d'exposition de produits de l'artisanat, bijou, tapis, robe kabyle, la forge d'Ihitoussène, objets en bois d'Aït Ouizguène (Bouzeguène). Des plats traditionnels ont été présentés ainsi qu'un défilé de mode de jeunes filles et de garçons en belles tenues traditionnelles, robes kabyles et burnous. Au volet pédagogique, on notera une conférence-débat sous le thème «Isegh d Trugza» et une autre communication sur le patrimoine matériel et immatériel de la Kabylie, intitulée «Sauver l'âme amazighe», à côté d'ateliers. Présenté comme une longue cape, le plus souvent de couleur blanche, avec un capuchon pointu, le burnous est généralement fait en laine de mouton ou de brebis. Il est un accessoire vestimentaire réservé aux hommes. La femme le porte le jour de son mariage au moment de sortir de la demeure familiale pour aller rejoindre son nouveau foyer. Cet habit se perd de plus en plus tant le métier à tisser a grandement reculé. On l'appelait aussi «cache-misère» pendant la colonisation française ou encore «aile protectrice» pour conjurer la mauvaise fortune. Il revêt du coup de multiples significations et symboliques.
Un savoir-faire qui se perd Elles sont de plus en plus rares les tisseuses qui confectionnent encore des burnous avec le métier à tisser traditionnel. Les régions de Bouzeguène et Idjer sont les dernières où l'on installe encore le métier à tisser pour confectionner cet habit qui tend à disparaître chez la nouvelle génération, qui ne le porte qu'occasionnellement. Il ne faut pas s'étonner de rencontrer un jeune de 30 ans qui n'a jamais porté de burnous. La confection de cet habit traditionnel est particulièrement éprouvante et se fait patiemment et habilement par les femmes. Il suit un long processus de tissage avant de devenir cet habit immaculé dans lequel on s'emmitoufle fièrement quand le froid tanne la peau. Avant le travail du tissage, les femmes procèdent au triage de la laine qu'elles débarrassent d'éventuelles brindilles et de boue en la lavant à grande eau à la rivière, pour passer à l'opération de séchage, démêlage, cardage et enfin de filage. Le tissage peut alors commencer, il dure souvent un mois. Le jour de l'installation du métier à tisser, un couscous est offert aux tisseuses et aux voisins en signe d'offrande. Le respect voué au burnous et au métier à tisser est sans limite. Il faudrait chercher sa véritable portée dans la psychologie de la société kabyle. Selon les historiens, le burnous est un habit éminemment berbère. Ces derniers citent à l'appui de leur argumentation l'éminent Ibn Khaldoun : «Les Amazigh ou les Berbères ont le crâne rasé, portent des burnous et leur plat principal est le couscous.»