Quelque 200 femmes défileront en haïk, samedi prochain, à partir de la place Magenta, au centre-ville d'Oran, pour promouvoir et réhabiliter cette tenue vestimentaire, aujourd'hui en voie de disparition. A ce titre, Tessia Farah, initiatrice de cette action, coïncidant avec la célébration de la journée internationale de la femme (8 mars) a indiqué à l'APS que cette action symbolique ambitionne de mettre à l'honneur cet habit traditionnel algérien, lui redonner sa valeur véritable et le faire découvrir aux générations futures. "Une telle initiative se veut un hommage au haïk qui conférait une certaine élégance et une allure particulière à celles qui le portaient", a ajouté la même initiatrice. "A la veille de la journée mondiale de la femme, nous voulons redonner à cette tenue, considérée symbole de la féminité et de la pudeur, sa vraie valeur et tenter de protéger ce patrimoine culturel algérien contre l'oubli". Le haïk, cette longue pièce d'étoffe blanche, de laine ou de soie ou d'un mélange des deux, est porté par la femme à l'extérieur de son foyer. En plus de sa fonction purement vestimentaire, le haïk a été, durant la colonisation, un moyen de résistance et de lutte contre le processus de déculturation et de désintégration des fondements de la société algérienne. En 1959, Frantz Fanon, dans son ouvrage Sociologie d'une révolution consacre tout un chapitre à la question du voile (haïk). Sous le titre "l'Algérie se dévoile", le sociologue de la Révolution algérienne montre comment les conditions et la conjoncture historiques ont poussé la femme algérienne, très attachée aux valeurs ancestrales, à abandonner le voile pour conduire des opérations de fidaï dans les grands centres urbains, avant de reprendre cette tenue en réaction aux tentatives du système colonial à "contribuer à l'émancipation de l'Algérienne". "L'offensive colonialiste autour du voile, le colonisé oppose le culte du voile", écrivait Fanon. Prisé par les femmes, le haïk est resté la tenue vestimentaire féminine par excellence, connaissant son apogée dans les années70 et 80, avant que des tenues étrangères n'ayant aucune relation avec la société et la culture algériennes ne fassent apparition et soient adoptées par les femmes. L'image d'une femme en haïk déambulant gracieusement dans les rues d'Alger, d'Oran, d'Annaba ou d'autres villes du pays, est devenue un fait en voie de disparation aujourd'hui. Le fait que des femmes se réapproprient cette tenue, ne serait-ce que l'espace de quelques heures, est en soi un acte salvateur et un devoir de mémoire, estiment de nombreuses oranaises ayant répondu positivement à l'appel lancé sur les réseaux sociaux.