Le père d'un écolier de neuf ans renversé par un chauffard était tout bouleversé devant la juge de Blida, qui avait ce mercredi un procès où les faits étaient clairs. Malheureusement l'inculpé n'a pas daigné se présenter devant la justice. Seul le papa va répondre aux questions de la présidente, Sofia Ouhida, et Denni, le représentant du ministère public, qui avait ce jour-là à sa gauche un jeune magistrat en application, après des études à l'Institut d'El Biar. «Dites-nous monsieur ce qui s'est passé le jour des faits», murmure presque la présidente qui s'est bien assise pour suivre les débuts qu'elle sait mener hautement et sans heurt. «Madame la présidente, j'avais mon fils Hichem à la main. Nous marchions sur le trottoir lorsque mon beau-frère nous salua sur le côté opposé de l'artère. C'est alors que mon fils a reconnu son oncle. Il lui rendit le salut et me pria de le laisser lui faire la bise. Mon enfant prit toutes les précautions avant de s'engager sur le passage protégé. A un moment donné, une voiture surgit et bouscula mon pauvre fils qui tomba, heureusement sans avoir reçu le bolide sur le corps. Mais il s'est tout de même blessé en chutant...» «Il s'est blessé en tombant, alors ? La voiture l'a pas touché. Expliquez-nous mieux. Calmez-vous maintenant les faits sont loin», conseilla la magistrate. «Je vous l'ai dit. Je ne me souviens que lorsque le véhicule avait surgi.» «La voiture roulait comment ? Y avait-il de la vitesse ? Une vitesse exagérée ?», demanda le représentant du parquet. «Oh, oui, monsieur. Je dois vous dire, maintenant que vous me le rappelez, c'est l'air ramené avec la vitesse qui a dû faire chuter mon fils. Mais, vous savez, lorsqu'il s'agit d'un accident de la circulation, on ne retient que l'essentiel. Et ici, l'essentiel est que mon enfant avait échappé de justesse à une fin atroce ou à des blessure graves», complète le père de la victime. «La voiture s'est-elle arrêtée ?», balance la juge qui prend acte d'un : «Bien sûr, madame la présidente. Le jeune chauffeur est même descendu s'enquérir sur l'état du gosse, cela m'avait un peu calmé et je...» «Mais vous, aviez-vous pensé un instant réfléchir au partage des responsabilités en laissant votre enfant traverser tout seul ?», suggère la présidente qui voulait aller au laisser-aller de certains parents. «Pas du tout madame la présidente. La rue était étroite et je vous le répète, au moment où nous traversions, j'étais à plus d'un mètre de Hichem il n'y avait pas âme qui vive. L'auto avait surgi. Je vais vous décrire le tableau», reprend le père qui s'en tire bien, au grand bonheur du représentant du ministère public qui réclamera une peine de prison de deux mois et une amende juste après que le papa eut réclamé trente mille dinars à titre de dommages et intérêts. Par défaut, le chauffard amateur de vitesse a écopé d'une peine d'un an de prison ferme. Le père de l'enfant est rassuré. Il avait une envie folle de crier vive la justice !