Beaucoup de justiciables qui suivent de près les procès des dealers, des chauffards qui tuent en étant en état d'ivresse, des voleurs à l'arrachée, par effraction, oublient souvent qu'un autre fléau ronge notre société ! Et cela ne date pas d'hier. Les coups sur ascendant demeurent en effet un dramatique fléau que les magistrats combattent avec la plus grande rigueur. Et pour ce faire, ils usent des termes rugueux de l'article 287 (loi n°75-47 du 15 juin 1975). Remarquez la date depuis quand la justice n'a pas réaménagé ni apporté d'autre amendements ! Quatre décennies ! Ceci explique que le législateur est satisfait des lourdes peines qui vont de cinq ans ferme à la réclusion perpétuelle ! L'inculpé de coups et blessures sur sa maman n'est pas un gamin ni un ado. Il va avoir bientôt un demi-siècle. Le pire, c'est qu'il a dit à la juge que sa mère n'aimait pas sa... femme. Et le président de répliquer que son amour pour son épouse supposait que la belle-mère n'avait pas besoin d'affection et du fils et de la bru. Ce juge va alors taper très fort. Ce sera alors la stupéfaction : la maman va crier à l'injustice et estime les cinq ans de prison comme étant trop pour le... foie ! La petite vieille infirme avait hurlé lorsque le procureur avait réclamé cinq ans de prison ferme à l'encontre de ce garnement, père de deux ados, venus voir leur papa être jugé pour avoir balancé deux coups de pied dans le ventre de leur grand-mère qui avait vite regretté d'avoir déposé plainte, surtout que le parquetier et les policiers qui l'avaient tour à tour entendue l'avaient prévenue qu'une plainte qui démarrait du ministère public ressemblait à une balle qui quittait le canon d'un revolver : elle ne revient jamais au barillet. - «Hadja, pourquoi avoir déposé plainte contre votre fils Amor R., 49 ans ? Et qui vous a emmenée à l'hôpital chez le médecin légiste pour établir le certificat médical d'incapacité de seize jours ?», demande le juge plutôt regardant sur les détails. La pauvre petite vieille, handicapée depuis la chaise roulante, allait commencer par déballer tout ce qui lui fait endurer son fils, poussé – la précision est de taille – par sa méchante épouse. - «C'est moi qui lui ai ramené cette fille. C'est une parente très proche. C'est ma nièce. Ils se sont mis d'accord sur mon dos. Ils veulent une procuration pour les retraits de ma retraite laissée par mon époux décédé dans un accident de la circulation. Et puis, il me bat à la première occasion. Je me suis toujours tue, par amour pour lui, mon fils unique. Il m'a laissée étendue sur le carrelage et il est parti en compagnie de sa femme chez ma sœur, sa belle-mère et tante», avait pleuré el hadja, qui avait ajouté que c'était Hassina, la fille de la voisine, qui l'avait accompagnée à l'hôpital. «Là, j'avais raconté que j'étais tombée de la chaise roulante. Mais l'hématome sur mon ventre m'a trahie. Les coups répétés étaient visibles. C'est pour cela que le médecin avait relevé des “bleus anciens, et nouveaux” sur le coup.» Le juge n'était pas en colère. Il va ordonner à l'inculpé de se taire juste après que ce dernier eut accusé sa mère de lui empoisonner la vie quotidienne. «Elle n'aime pas ma femme et je...» Le président de la section correctionnelle l'interrompt. «Vous voulez plutôt dire qu'elle n'aime pas sa nièce. C'est bizarre comme situation, vous ne trouvez pas ?» L'inculpé baisse les yeux d'abord, la tête ensuite. Il va même vaciller au moment où le magistrat inflige la même peine demandée par le procureur. Cinq ans de prison ferme. Il venait de réaliser la catastrophe après que sa génitrice eut dit à haute voix qu'elle s'en remettait à Allah seul, qui saura lui faire payer la hogra envers elle. Il venait de réaliser qu'il aurait dû constituer un avocat, car il avait entendu le représentant du ministère le narguer au moment où la vieille victime avait soupiré de ne pas avoir les moyens de se payer un conseil, lui rétorquer. «Hadja ! Le parquet est votre avocat. N'ayez crainte. Parlez. Dites tant au tribunal qui est à la hauteur de la tâche.» La vieille avait pleuré et pour cause.