«Pour moi, Mustapha Zitouni était le meilleur défenseur du monde en son temps. Je ne le dis pas pour lui jeter des fleurs, mais c'est une réalité et l'avis de beaucoup de spécialistes de l'époque.» «L'auteur de ces éloges à l'endroit du mythique Mustapha Zitouni n'est autre que son équipier de la glorieuse équipe du FLN et de l'AS Cannes, Abdelhamid Kermali. Le Cheikh, comme l'appellent communément tous les Algériens, se remémore ses premiers pas avec Zitouni, un certain été 1953, lorsque les deux hommes avaient rallié le club de la Croisette avant de rejoindre ensemble les rangs de l'équipe du FLN quelques années plus tard. «Zitouni a été comme un frère pour moi. J'ai eu l'immense honneur de jouer à ses côtés pendant une saison à l'AS Cannes. C'était, je crois, une année avant le déclenchement de la Révolution. On avait quitté le pays tous les deux et signé dans ce club. Là-bas il s'est imposé rapidement comme une pièce maîtresse au sein de l'équipe. Son élégance et son talent lui ont valu une grande admiration aux quatre coins de la France. Tous les grands clubs de l'époque s'intéressaient à lui, et en fin de compte, c'est l'AS Monaco qui a réussi à le recruter en 1954, pendant que moi j'ai atterri à Lyon. On s'est séparé pendant quatre ans avant de rejoindre ensemble les rangs du FLN», se rappelle Kermali qui pense que la carrière de l'enfant de Bologhine avait atteint son apogée lorsqu'il avait signé à Monaco. «A l'époque, c'était un grand transfert, et moi je pense que c'est à Monaco que Zitouni a atteint le summum de sa carrière en gagnant plusieurs titres avec son club, ce qui lui a valu une convocation en équipe de France. Je me souviens qu'au cours de ses quatre ou cinq apparitions sous le maillot des Bleus, il a laissé sur le banc un certain Jonquet qui était à l'époque le titulaire indiscutable au poste d'arrière central». «Il a reçu le plus bel hommage du grand Di Steffano» L'ex-sélectionneur national se rappelle avec beaucoup d'émotion l'engagement de son ami pour la cause nationale lorsqu'il a décidé de rejoindre l'équipe du FLN, alors qu'il était bien parti pour participer à la Coupe du monde de 1958 qui s'est déroulée en Suède. «Zitouni a sacrifié sa carrière pour le pays laissant tomber une participation assurée avec l'équipe de France à la Coupe du monde 1958. Il a répondu à l'appel du pays pour rejoindre les rangs de l'équipe du FLN. Cette fugue a provoqué une onde de choc incommensurable en France. Les gens n'arrivaient pas à croire que Zitouni avait tourné le dos au futur demi-finaliste de l'épreuve. Mais, Mustapha n'a jamais regretté son choix. Au contraire, il était fier d'avoir servi une cause juste et noble.» Malgré ses 79 ans, Kermali reste lucide. Sa mémoire ne le trahit pas. Il raconte à cet effet l'anecdote de la rencontre qu'a eue Zitouni avec le grand Di Steffano dans le hall de l'aéroport de Tunis, un mois après le fameux match France - Espagne, disputé à Paris durant lequel l'Algérien avait mis sous l'éteignoir la grande star de l'époque et le célèbre Real Madrid. «Je me souviens qu'on s'apprêtait à rejoindre Prague a partir de Tunis, lorsque soudain arriva la grande équipe du Real Madrid qui se rendait au Caire pour disputer un match amical contre l'Egypte. Et dès que Di Steffano a vu Zitouni, il s'est retourné vers ses coéquipiers et leur dit : ''Voilà le seul défenseur qui a réussi à me museler''. On était tous fiers de lui. C'était le plus bel hommage que pouvait recevoir un joueur à l'époque.»