Il n'y a pas longtemps, le ministre des Transports promettait des avions-taxi dans l'année qui suivait. A l'occasion, Amar Ghoul donnait l'impression de parler très sérieusement, ce qui rendait les choses plus graves encore. On savait que Ghoul s'exprimait dans une conjoncture où il s'agissait plus de multiplier les moyens de brasser du vent que de convaincre. Mais beaucoup se sont dit : «Pourquoi pas», selon la bonne vieille formule : plus c'est gros plus ça a de chances de rentrer. Ses performances n'étaient pas vraiment visibles et c'est le moins qu'on puisse dire mais le ministre avait le vent en poupe au point de pouvoir s'offrir des extravagances du genre. Mais la réalité se laisse rarement compter par les artifices, quels que soient la qualité et le volume des artifices qu'on y met. Et c'est la réalité qui nous avait inspiré cette question-réplique où il était question de trouver autre chose que l'effet de style et le sens de la formule : «Et les… voitures-taxi, c'est pour quand, Monsieur le ministre ?» Depuis, il n'y a jamais eu d'avions-taxi. Ce n'était pas vraiment un souci pour les Algériens qui ont des préoccupations beaucoup plus terre à terre – le jeu de mots est venu tout seul – mais ça aurait été tout de même sympa de savoir que le pays se dote d'un service de… haut vol – décidément – qui puisse nous donner ne serait-ce que l'illusion de flirter avec les cieux du développement. Personne n'a attendu les avions-taxi et ils ne sont pas venus. Personne ne les attendait parce qu'on n'en avait ni les moyens ni vraiment le besoin. Mais ils ne sont surtout pas venus parce que personne n'avait l'intention de les faire venir. Il était question juste d'en parler et quand on est ministre, personne ne vous demandera des comptes sur ce que vous avez dit. Nous voilà déjà embarqués dans une autre histoire. A propos d'embarcation, en voilà une qu'on n'a pas annoncée et qui est quand même là depuis une année. Il s'agit, comme vous ne l'aurez certainement pas deviné, du bateau de transport qui fait la navette entre la Pêcherie et la Madrague à Alger. Il n'est ni régulier, ni confortable, ni animé mais il est là, même si on ne l'a pas vu venir. Et si on revenait aux… taxis ? Il y en a de plus en plus. De toutes les couleurs, de tous les gabarits, de toutes les enseignes, de tous les numéros. Au point où on ne sait plus d'où ils viennent et où ils vont. Franchement, il y a beaucoup de taxis à Alger. Trop ? Certainement pas. Et vous vous en rendrez-compte dès que vous essayez d'en arrêter un ! C'est vrai, cherchez un taxi à Alger et vous vous rendrez compte que les «voitures-taxi», même en quantité industrielle, ça ne règle pas le problème des… taxis ! Parce que même avant, il y en avait, des voitures. Et des chauffeurs. Trop peu pour faire des taxis ! Pour ce faire, il faut un cahier des charges, un règlement, des droits pour le client et le professionnel. Mais faute de ça, nous avons les seuls taxis au monde qui choisissent leur destination, qui prennent plusieurs clients à la fois (on appelle ça le jumelage), qui n'ont jamais de monnaie et vous le font payer, fument tout en interdisant aux autres de fumer, vous surveillent du coin de l'œil si vous êtes un couple et utilisent rarement leur compteur. A part ça, il y a beaucoup de taxis à Alger. Les histoires d'avion sont une autre… histoire. Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.