Les mesures du gouvernement pour la rationalisation des dépenses publiques suite à la chute des prix du pétrole ne font pas que des heureux. Comme il fallait s'y attendre, les partis de l'opposition se montrent pessimistes et mettent en garde sur la situation actuelle du pays, tandis que les partis au pouvoir approuvent, naturellement, la politique du gouvernement et ne reconnaissent pas l'existence d'une crise. MSP : «Des mesures pour gagner du temps» Pour sa part, le président du Mouvement de la société pour la paix (MSP), Abderrezak Mokri, qualifie de diversion les dispositions prises par les autorités publiques pour pallier la crise pétrolière, notamment le gel des projets en cours de lancement. «Ce sont des mesures pour gagner du temps et non pas des solutions à long terme pour sortir le pays du chaos économique auquel il fait face», a affirmé Mokri. Il a dans ce sens mis l'accent sur la gravité de la situation, soulignant que l'Algérie est confrontée à une crise plus importante que celle des années 1980. «Nous avons perdu confiance en les décisions du gouvernement qui ne visent pas à relancer l'économie, mais à gagner du temps», a-t-il martelé, arguant qu'«ils (les dirigeants) ont dépensé près de 800 milliards de dollars en 15 ans sans que cela n'ait des effets positifs sur la situation socioéconomique du pays». «Le pouvoir est mis en demeure de procéder à des changements politiques profonds». Faute de quoi, le pays ira vers une «explosion sociale» et des «dérives violentes», prévient Mokri. Il a fait savoir que l'opposition est toutefois d'accord pour coopérer avec le pouvoir pour une transition démocratique. Ennahda : «La rentrée sociale sera houleuse» Le porte-parole du mouvement Ennahda, Mohamed Hadibi, a lui aussi dressé un constat pessimiste sur la conjoncture politique et économique actuelle, estimant que la rencontre gouvernement - walis qui aura lieu après-demain est beaucoup plus d'ordre sécuritaire qu'économique. «Cette réunion va préparer les walis à faire face aux protestations du peuple suite à la crise économique qui va augmenter, au taux de chômage et de pauvreté», a-t-il déclaré. Pour lui, la rentrée sociale sera houleuse et difficile avec des prix bas du baril qui perdurent avec pour conséquences des recettes des hydrocarbures réduites de moitié. «L'Etat n'a plus les moyens financiers nécessaires pour répondre aux besoins et aux revendications de ses citoyens et va user de tous les moyens de répression», a-t-il indiqué. PT : «Le président de la République n'a pas tenu ses engagements» Pour la secrétaire générale du Parti des travailleurs, c'est «le gouvernement lui-même qui prépare les conditions d'une explosion révolutionnaire à travers le choix d'une politique d'austérité ravageuse pour les travailleurs et les classes populaires», avait-elle déclaré lors de la clôture de l'université d'été des cadres de son parti. Contrairement à ses habitudes, la SG du PT charge le chef de l'Etat : «Seize mois après la présidentielle, le président de la République n'a pas tenu ses engagements. Son silence devant les dérives dangereuses de l'oligarchie est un signe d'approbation. Qui ne dit pas mot consent !» Et de poursuivre : «Cette dérive comporte de la violence, du terrorisme, c'est un processus de dislocation. Bouteflika peut-il permettre de poursuivre ce processus mortel pour la souveraineté nationale ?» Menasra : «On veut faire de l'Algérie un Etat contrefait» Abdelmadjid Menasra, président du Front du changement, évoque lui «un Etat contrefait». Il a mis en garde le pouvoir, lors de l'ouverture de l'université d'été de son parti à Boumerdès, contre «un Etat contrefaçon, un Etat démodé, loin des principes fondamentaux du 1er Novembre et loin de la grandeur de l'Algérie, de ses institutions, de son histoire et des sacrifices de son peuple». Il a souligné que son parti n'acceptera jamais une quelconque falsification des fondements de l'Etat algérien tel que proclamé dans la Déclaration du 1er Novembre. Pour Menasra, un Etat moderne ne peut se construire sans une Constitution fruit d'un consensus et sans démocratie véritable. FLN : «Il n'y a pas lieu de s'angoisser» De leur côté, les partis du pouvoir se montrent optimistes et ne reconnaissent pas l'existence d'une crise. Souilah, membre du Front de libération nationale (FLN), considère qu'il n'y a pas lieu de s'angoisser car le gouvernement a étudié la situation de manière rationnelle et a pris les bonnes décisions. Interrogé sur le gel des projets en cours de lancement, le même responsable a fait savoir que les projets vitaux ne sont pas concernés, à l'instar du logement. L'interlocuteur a qualifié d'ordinaire la rencontre gouvernement - walis, présidée par le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, samedi. «Cette rencontre n'a rien d'urgent, il s'agit seulement d'une mise au point avec les nouveaux walis qui ont intégré leur poste récemment», a-t-il affirmé. TAJ : «La réunion gouvernement-walis n'a rien d'inquiétant» Même son de cloche du côté de Nabil Yahiaoui, porte-parole du Rassemblement de l'espoir de l'Algérie (TAJ), qui indique que cette réunion intervient au moment opportun et n'a rien d'inquiétant. «C'est l'occasion pour les walis de prendre connaissance du programme du gouvernement pour rationaliser les dépenses publiques face à l'effondrement des cours du pétrole». Il a fait remarquer que le gouvernement ambitionne de libérer les initiatives d'investissement et l'économie parallèle à travers la nouvelle loi de finances, ce qui constitue, selon lui, un grand pas vers une économie émergente et indépendante des hydrocarbures.