28 août 1997. Un terrible massacre est commis dans la localité de Raïs, dans la commune de Sidi Moussa, à 20 km du chef-lieu de wilaya d'Alger. 27 août 2015. Madani Mezrag, «émir» de l'ex-AIS (Armée islamique du salut), annonce la création d'un parti politique. Ironie du sort... Alors que les familles de près de 300 victimes du massacre de Raïs ne se sont pas encore remises du terrible drame qui les a frappées, l'«émir» Mezrag, aujourd'hui «anobli», jubile et exprime son ambition politique. Madani Mezrag, ex-chef de l'AIS (bras armé du FIS-dissous) a officiellement créé ce jeudi 27 août 2015 son parti politique, rapportent des médias. «Je vous annonce officiellement la création du Front de l'Algérie pour la réconciliation et le salut», a déclaré l'intéressé, cité par TSA. La création du nouveau parti a été officialisée «lors d'une rencontre nationale avec plus de 1000 délégués venus de toute l'Algérie à Aouess, dans la wilaya de Jijel», a précisé Madani Mezrag. «J'ai le soutien des éléments de l'ex-FIS», prétend-il. La loi, une ligne rouge L'«émir» de l'ex-AIS qui a multiplié les sorties médiatiques ces derniers temps et qui a organisé deux «universités d'été» au maquis, sans autorisation des pouvoirs publics, a haussé le ton depuis quelques mois, usant presque de la menace au cas où il serait empêché de faire entorse à la charte sur la réconciliation nationale, en créant son «parti politique». Des attentats terroristes ciblant l'Armée nationale populaire (ANP) ont été récemment perpétrés dans les wilayas de Jijel et Skikda, ancien fief de Madani Mezrag, suscitant des interrogations, comme celle de savoir si Madani Mezrag et ses acolytes n'étaient pas informés de la présence de terroristes dans leur ancien fief. La repentance, il y a quelques jours, d'un terroriste accompagné de trois femmes, atteste de la présence de terroristes dans la région. Il est difficile de croire que l'«émir» national de l'ex-AIS et ses acolytes ne soient pas informés de l'existence de maquis terroristes dans leur ancien fief. Comme il est intéressant de connaître la réaction des autorités qui auront à statuer sur l'acceptation ou pas de la demande de l'ex-chef terroriste d'un agrément pour son parti politique. La charte pour la réconciliation nationale grâce à laquelle Madani Mezrag et des milliers d'éléments de l'ex-AIS ont recouvré la liberté en déposant les armes, interdit clairement tout exercice politique aux «repentis». Cette charte approuvée massivement par le peuple algérien sera-t-elle le vrai barrage qui empêchera Madani Mezrag de faire de la politique après avoir écumé les maquis ? Un pied de nez aux victimes du terrorisme En attendant de connaître le verdict des autorités sur le projet de l'ex-émir de l'AIS, on doit s'arrêter sur le choix de la date de l'annonce de la création de ce «parti politique». Celle-ci coïncide en effet (hasard de calendrier ou calcul ?) avec la commémoration du massacre de Raïs. C'est là déjà une atteinte à la mémoire des centaines de victimes de cette tuerie. En effet, le 27 août 1997, le Groupe islamique armé (GIA) faisait preuve d'un acharnement inégalé contre les civils. Près de 300 personnes, dont des enfants, des femmes et des nourrissons, furent massacrées à coups de haches, de couteaux et d'explosifs. Les bébés ont été parfois brûlés. Des femmes enceintes ont été éventrées. Des corps décapités. Ce fut le début de la fameuse campagne du «Qui tue qui ?» qui entrentenait le doute sur les auteurs de ces massacres, voire disculpait les terroristes de leurs méfaits. D'anciens responsables du parti dissous de Abassi Madani qui refusent de condamner le terrorisme ont tenté, sans réussir, de créer un nouveau parti politique sur les décombres de l'ex-FIS. Madani Mezrag va-t-il donc réussir là où ses acolytes ont échoué jusqu'ici ?