Mohamed Igherbouchène, un compositeur algérien au talent exceptionnel et de haute voltige et un maître à penser de la musique, comme l'a souligné le Dr Mouloud Ounnoughène dans ce nouvel ouvrage intitulé Mohamed Igherbouchène : une œuvre intemporelle, qui vient de paraître aux éditions Dar el Khettab Dans son introduction, l'auteur met en avant le terme de métissage et lui donne avant tout son sens médical : «Plus populaire dans le langage médical, il désigne en génétique un croisement d'espèce qui engendrera un phénotype.» Sur ce même volet du métissage, il relate le travail de différents compositeurs dont Burton, qui, dit-il, a bien pioché dans le folklore de plusieurs pays. Fasciné par la région de Biskra, il intègre dans son quatuor N° 2 les éléments du folklore de Tôla et de Sidi Okba. Sans oublier notre grand compositeur, il note également que «dans la danse mauresque N° 4, Iguerbouchène vivifie un patrimoine ancestral riche d'expérience émotive», ceci pour expliquer aux lecteurs l'importance du métissage et renforce l'idée que rien ne vient du néant et que le métissage dans le sens large du terme donne, non seulement des couleurs mais apporte également un équilibre à l'art. Sur ce plan, il cite Camille Saint Saëns (1835-1921) où il dira que ce compositeur a tenté sa baccanale de l'opéra Samson et Dalila avec des relents de nouba. Il y empreinte ses notes de la touchia qu'il avait apprise auprès de Mahieddine Bachtarzi. Aussi, il réserva une partie à Francisco Salvador Daniel en sous titrant « l'orientaliste» qui a mis en partition le chant kabyle. Il ajoute : «Quand il découvrira ultérieurement la ghaita, son bonheur sera grandissant en écoutant les musiciens des confréries maraboutiques d'Alger et de Blida». L'auteur de Mohamed Iguerbouchène s'est aussi intéressé à la musique andalouse, sans oublier évidemment Zyriab qui fut accueilli en 822 à Cordoue avec tous les honneurs. Mouloud ounnoughene aborde également le théâtre et le cinéma comme «vecteur de la chanson algérienne» mais on ne peut parler de l'histoire du théâtre algérien sans évoquer «l'illustre homme de théâtre Mahieddine Bachtarzi (1897-1986) qui porte également la casquette du chanteur à la voix de ténor…» Quant à la deuxième partie de cet ouvrage, elle est consacrée à Mohamed Iguerbouchène. Cet homme natif d'Aït Ouchene, dans les Aghribs dans la wilaya de Tizi Ouzou, le vendredi 13 septembre 1907. Dans cette partie, l'auteur retrace l'itinéraire artistique d'Iguerbouchène et dans les conditions difficiles où il a grandi. Dans cette époque de feu et de fer, pour plonger dans le monde de l'art et particulièrement de la musique, il faut être atteint «de folie artistique». Et naturellement, c'est sans doute cette ardeur qui l'avait poussé à atteindre ce niveau artistique. Le hasard a voulu que ce génie soit pris en charge par le professeur Livingston de Londres, «Ross emmène Mohamed qui venait d'atteindre ses quinze années à Londres, il est vite inscrit au Norton Collège. L'auteur du livre met l'accent sur cette vocation où il écrit que «Mohamed Iguerbouchène est le premier compositeur algérien de musique de film». Il ajoute que «les musiques de film d'Iguerbouchène se calquent aisément sur les orientations des scénarios présentés. Iguerbouchene met en papier sa pensée musicale qu'il puise dans la dramaturgie cinématographique pour illustrer musicalement les séquences d'un film». Dans cet ouvrage, Mouloud Ounnoughene aborde plusieurs questions se rapportant à ce grand artiste de talent qui a travaillé à travers le monde avec des personnalité des arts, mais qui reste inconnu ou presque dans son pays. Questionnant Zoheir Abdellatif, un homme de radio, il dira : «Iguerbouchène n'a pas été exploité à sa juste valeur.» l Docteur Mouloud Ounnoughene : neurochirurgien, musicien, ancien producteur et animateur d'émissions radiophoniques sur les musiques du monde. Il a sorti avec son groupe Massin's un album de fusions musicales intitulé Azzetta. Massin's a été sélectionné, il y a une dizaine d'années, dans un concours par un jury français dans le cadre du Festival international des musiques universitaires qui s'est déroulé à Belfort, en France, et qui a vu la participation de plus de 30 pays. Il a remporté un franc succès. Passionné par les effets et les impacts de la musique sur le cerveau, le docteur écrit plusieurs articles à ce sujet. Il publie également un livre, Influences de la musique sur le comportement humain, un ouvrage préfacé par le professeur A. L. Benabid de l'académie des sciences de France. L'auteur a animé de nombreuses conférences sur le thème du métissage musical et a présenté plusieurs communications ayant trait à l'œuvre d'Iguerbouchene.