Pour une première, c'en est une ! Pas moins de dix-neuf personnalités dont d'anciens ministres (Khalida Toumi et le Pr Abdelhamid Abarkane), des figures historiques ainsi que des militants des droits de l'homme ont interpellé publiquement le président de la République Abdelaziz Bouteflika pour lui demander audience. Lors d'une conférence de presse improvisée hier matin à l'hôtel Essafir à Alger, les auteurs de cette initiative, parmi lesquels figurent également Louisa Hanoune, Zohra Drif Bitat et l'écrivain Rachid Boudjedra, ont expliqué que la Présidence a été destinataire, le 1er novembre dernier, d'une lettre comportant une demande d'audience au président de la République. La raison ? Attirer son attention sur «la dégradation du climat général dans le pays». Voyant que le Président ne répondait pas, les signataires de cette lettre ont tenu, face au silence du chef de l'Etat, à prendre l'opinion publique à témoin et informer les citoyens sur les motivations de cette démarche pour le moins surprenante. Un appel de détresse Estimant que cette démarche est apolitique, les auteurs de la missive ont indiqué que c'est par devoir de citoyenneté qu'ils ont interpellé le président de la République. «Nous n'avons aucun projet politique et nous ne comptons pas nous poser en alternative. Nous voulons simplement, en tant que citoyennes et citoyens, voir le Président pour lui faire un état des lieux, car, tel que nous le connaissons, Bouteflika ne peut pas cautionner ce qui est en train de se faire», a déclaré Louisa Hanoune lors de sa prise de parole. La patronne du PT a ajouté que «Bouteflika est responsable de la nation et de la pérennité de l'Etat. Il ne peut pas laisser faire. Nous n'avons pas la prétention de lui présenter des solutions. Nous allons juste lui présenter la situation telle qu'elle est et lui demander d'intervenir pour mettre un terme aux dérives en cours». Interrogé sur le sujet, le moudjahed et ancien condamné à mort, Abdelkader Guerroudj, a fait savoir que cette lettre est avant tout un appel de détresse. «Je crois que nous sommes aujourd'hui dans l'obligation patriotique de réagir face à la dérive dangereuse que prend le pays. nous ne sommes pas là pour critiquer. Notre regroupement est mû par un devoir patriotique. Les dangers sont multiples. La menace peut venir aussi bien de l'extérieur que de l'intérieur», a-t-il prévenu. Inquiétude ! Même son de cloche chez la moudjahida Zohra Drif Bitat qui a fait part de sa profonde inquiétude. «Nous sommes un groupe de citoyens et de citoyennes très attachés à leurs pays, à leurs patrie, mais très inquiets des développements récents de la situation du pays dont les conséquences peuvent être désastreuses», a-t-elle dit. Outre la déliquescence des institutions de l'Etat dont la lettre a fait mention, les signataires de cette missive interpellent Abdelaziz Bouteflika sur «la grave dégradation de la situation économique et sociale qui frappe la majorité du peuple algérien et à laquelle sont apportées des réponses inquiétantes de la part des autorités du pays, augurant de l'extrême précarisation des plus vulnérables tout en livrant le pays, ses richesses, ses capacités aux prédateurs et aux intérêts étrangers contre lequel vous (le Président, NDLR) avez tant lutté». Plusieurs autres personnalités, a fait savoir Louisa Hanoune, ont participé à la rédaction de cette lettre, mais qui, pour des raisons personnelles, n'ont pas voulu signer le document. La patronne du PT a expliqué, par ailleurs, que «ces derniers temps, toutes les portes sont fermées, c'est pourquoi nous avons décidé de faire recours aux médias. Nous ne comptons pas abandonner notre démarche», a-t-elle conclu.