Les représentants de deux Parlements rivaux que sont la Chambre des représentants reconnue internationalement, et le Congrès national général islamiste autoproclamé ont annoncé hier un accord initial pour mettre fin à la crise politique du pays. Eclairage. Cet accord prometteur qui a été signé hier à Tunis devra être endossé par les deux Parlements pour qu'il puisse ouvrir de réelles perspectives de paix dans ce pays ravagé par le conflit depuis quatre ans dans le sillage de la chute de Mouammar Kadhafi. L'accord baptisé «Déclaration de principe», a pour objectif de lancer les bases d'une «coopération transparente» entre les deux parties afin de parvenir à un accord politique prévoyant notamment la formation d'un gouvernement d'union nationale. Sans trompette, sans bruit, les protagonistes de la crise libyenne viennent de prouver qu'ils peuvent bien s'entendre sur un plan de sortie de crise. Et il semble bien que même les Nations unies, à travers la Mission d'appui en Libye (Manul) soient tenues loin de ces tractations qui se déroulaient dans un hôtel de la banlieue de Tunis. La Manul, qui a pourtant supervisé pendant des mois les sessions de dialogue entre les parties rivales libyennes en Algérie et au Maroc sous la férule de Bernardino Léon, était apparemment indésirable dans la table des négociations.Preuve en est que le texte qui a sanctionné l'accord a précisé expressément que les représentants libyens se sont réunis «sans ingérence étrangère et sans conditions préalables». Tout porte à croire donc qu'aucun autre représentant d'un pays tiers, d'une organisation régionale ou internationale n'a pris part à cette réunion «secrète». Accord historique Tant mieux si les deux parties en conflit soient arrivées à s'entendre sur une feuille de route devant baliser le terrain à une pacification de la Libye. A commencer par la mise sur pied d'un comité composé de dix membres, cinq de chaque Parlement, chargé de choisir un Premier ministre et deux vice-Premiers ministres. Il est certes prématuré de juger de la volonté des uns et des autres de faire taire les armes, le ton est apparemment à l'espoir, à se fier aux déclarations des représentants des deux parties. «C'est un moment historique que les Libyens attendaient, que les Arabes attendaient et que le monde attendait», s'enthousiasmait Awad Mohammed Abdoul Sadiq, vice-président du Parlement de Tripoli, non reconnu par la communauté internationale. «Nous invitons tous les pays voisins (…) mais également la communauté internationale à soutenir cet accord (…) qui rendra la région plus sûre», a ajouté le vice-président dans une conférence de presse ayant sanctionné les discussions. Les responsables libyens en conclave à Tunis devaient être reçus hier soir par le président tunisien, Béji Caïd Essebsi, au palais présidentiel. Ce dernier devait les féliciter et les encourager à aller de l'avant pour parvenir à un accord de paix définitif en Libye. Un accord qui ferait naturellement du bien aux voisins de la Libye, notamment l'Algérie et la Tunisie qui sont sur le pied de guerre depuis quatre années. Exit l'ONU… La circulation libre des arsenaux de guerre dans ce pays mis en coupes réglées par des bandes armées, couplée à la sanctuarisation de certaines localités de Libye par des groupes djihadistes, fait logiquement craindre le pire à Alger et à Tunis. Faut-il souligner le rôle négatif de ce qu'il convient d'appeler la «communauté internationale» qui a laissé pourrir la situation en Libye. Les pays occidentaux qui sont allés tuer Mouammar Kadhafi en 2011 sous la bannière de l'Otan ont laissé le terrain aux djihadistes de tous poils et autres seigneurs de la guerre qui sèment la terreur dans ce pays ouvert aux quatre vents. C'est dire à quel point les représentants des deux Parlements rivaux ont eu raison de ne pas associer à leurs discussions ceux qui ont séduit puis abandonné leur pays. Il est à espérer que cette «déclaration de principe» débouche prochainement sur un accord historique qui réconciliera tous les Libyens de Benghazi à Jbel Nfoussa et de Tripoli à Sabha. A ce moment-là, ce sera une révolution pour de vrai. Pour l'Algérie, ce serait une grosse épine enlevée de son pied.