Les associations militant pour la conservation du patrimoine de la wilaya vivent dans le désarroi ces jours-ci. Après une lutte de dizaines d'années pour le classement du quartier de Sid El Houari comme patrimoine national, voilà que la wilaya décide de raser une dizaine d'immeubles après le relogement prochain de leurs occupants. Une réunion au niveau de la wilaya a eu lieu en présence de tous les membres de l'exécutif pour débattre de ce dossier. Selon des sources sûres, la direction de la culture, à qui revient la gestion de la sauvegarde du patrimoine, s'est abstenue d'émettre son accord pour une telle entreprise contrairement à d'autres directeurs de l'exécutif. «Sur les dix immeubles, trois sont dans un état de délabrement très avancé», nous affirme notre source. Mais le reste est récupérable. Mieux, ils sont construits avec des matériaux traditionnels d'une époque révolue et certains d'entre eux sont les derniers vestiges de l'héritage andalou. Lors de la visite du ministre de la Culture, au début de cette semaine, Mourad Bouteflika, le directeur du patrimoine au ministère, a été catégorique. En premier lieu, il nous a affirmé que la loi concernant la sauvegarde du patrimoine a été publiée dans le Journal Officiel, donc de mise désormais. Et selon les dispositions de cette loi, il est strictement interdit de toucher à un patrimoine sauvegardé, même s'il est une propriété individuelle, sans l'aval préalable du ministère. Bien au contraire, les pouvoirs publics assurent aux particuliers jusqu'à 80% du montant de la restauration de leurs biens quand ils sont dans un secteur sauvegardé. Ceci, en échange du respect d'un cahier des charges stipulant la non-dénaturation de ces témoins de l'histoire. La loi portant sauvegarde du patrimoine interdit même le déplacement des populations parce qu'elles sont porteuses d'un savoir-faire, d'un mode de vie, de traditions culinaires, etc. C'est ce que les spécialistes expliquent par la dévitalisation. Les militants associatifs qui multiplient les démarches pour sauver ces immeubles redoutent le remake de la mésaventure de Scaléra, un quartier espagnol de Sidi El Houari. Son rasage a commencé par Daho Ould Kablia quand il était wali et s'est terminée avec Abdelmalek Boudiaf, l'actuel ministre de la Santé, alors à la tête de l'exécutif de la wilaya. Les promoteurs immobiliers n'attendent que l'occasion pour s'approprier ces assiettes de terrain libérées pour pouvoir ériger des immeubles et du coup effacer toute trace d'un quartier dont l'histoire va de pair avec celle de la ville. Un citoyen très au fait de l'histoire de ce quartier, nous met au défi de repérer la demeure qui a abrité l'Emir Abdelkader avant son envoi en exil par les forces coloniales. En effet, l'Emir, présenté comme le fondateur de l'Etat algérien moderne, est passé par ce quartier dont une bonne partie est en ruine. «Donc autant sauver ce qui reste à sauver», répètent ceux pour qui le patrimoine est une richesse inestimable.