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Samir Slama, paysagiste à Oran : «L'OMS préconise 12 m2 de verdure par habitant»
Publié dans Le Temps d'Algérie le 11130

La dernière semaine du mois d'avril a vu la tenue, dans le grand jardin de Mdina Djdida, l'un des plus beaux évènements qui soit : les Floralies.
L'idée de cette manifestation tout en couleur revient à Kouider Metayer, le président de l'association Bel Horizon. Mais celui qui a imposé l'idée à la mairie ne peut être que paysagiste. On nommera Samir Slama, qui a bien voulu répondre aux questions de notre journaliste.
Le Temps d'Algérie : Notre première question, c'est de vous demander qui est Samir Slama ?
Samir Slama : Après avoir travaillé à Sonatrach et Sonelgaz, je me suis tourné vers le journalisme, notamment durant les années de plomb. J'ai activé dans plusieurs titres avant de décrocher momentanément et revenir à ma première passion : la nature, que j'ai étudiée à la prestigieuse Ecole de paysagisme de Versailles, en France.
Vous êtes paysagiste ; est-ce que ce métier existe dans la nomenclature des professions en Algérie ?
Dans tous les pays du monde et dans toutes les langues, le mot paysagiste est libre d'emploi. Il s'applique à toutes sortes d'activités, à n'importe quel niveau de formation, de la peinture au jardinage, à l'horticulture, à l'agronomie et à l'architecture, de la littérature au dessin de projet, à la planification urbaine et à la gestion de l'espace public. Pour l'Unesco, la notion de paysage trouve sa légitimité en priorité dans les arts visuels et poétiques du jardin, de l'architecture, de la ville et de l'image de paysage (peinture, photographie, etc.). En ce qui concerne l'Algérie, c'est le paysage dans sa globalité qui nécessite une prise en charge. Mais une prise en charge politique parce que le paysage est d'abord politique. Qu'est-ce que le paysage ? Personne ne pourra vous le dire, certains y voient le pittoresque, d'autres, au contraire, l'uniformisme ou mieux encore le camouflage. Le législateur algérien ignore volontairement le paysage parce que le paysage, c'est d'abord le pays. Aujourd'hui, vous avez des immeubles de 3 ou 4 étages dans des douars, voire en rase campagne, et cela se fait au nom de la liberté. D'ailleurs, il vous suffit de sortir d'Oran pour voir d'immenses clôtures en parpaing qui ont séquestré le paysage au nom de la sacralité de la propriété privée.
Est-ce qu'un pays qui connaît l'anarchie sur le plan de l'urbanisme fait appel au savoir-faire des paysagistes ?
Je vous dirai oui et non parce que le paysage urbain est d'abord le fait de l'urbanisme qui produit les vides et l'architecture qui les remplit. Le paysagiste n'est pas un expert de la ville, il est un acteur qui s'inscrit dans le projet urbain. Je dis «le projet urbain» parce qu'il s'agit en fait d'un instrument et non pas d'une vision «maquettisée» de la ville. Le projet urbain s'inscrit dans le devenir et se réalise avec tous les acteurs de la ville sans exclusion. Cela va de la gestion des grands paysages, par exemple le paysage du Murdjadjo, aux no man's lands qui entourent les ensembles immobiliers et qui font d'ailleurs souvent l'objet de litige. L'intervention du paysagiste est alors basée sur la médiation car il s'agit d'espace public où chacun doit se retrouver. Aujourd'hui, dans la quasi-totalité des ensembles immobiliers, les promoteurs s'accaparent de ces espaces collectifs pour en faire des parkings, qu'ils revendent au prix fort. Cette catégorie de paysagiste-concepteur est totalement absente, voire même interdite de pratique. L'autre catégorie de paysagiste qui possède un savoir et un savoir-faire pour entretenir un alignement arboré ou installer une pelouse existe, mais sa formation reste très approximative ; disons qu'il apprend sur le tas. Je vous signale que nos voisins de l'Est et de l'Ouest ont depuis très longtemps, 40 ans je crois pour le Maroc et un peu moins pour la Tunisie, mis en place des filières de formation complète, et aujourd'hui, ils ont de grandes écoles paysagères. Dans ces pays, les plans de développement urbain et même rural ont un chapitre paysager. Mieux encore, chez nos voisins où le paysage n'est pas une vue de l'esprit, les cahiers de prescriptions en matière de réalisation d'espaces verts n'ont rien à envier aux pays développés, même dans des petites villes qui n'ont pas a priori une vocation touristique. Je signale qu'à l'occasion de la visite de M. Juppé à Oran, l'idée de proposer la création d'une filière paysagère au niveau de l'université avec l'école de Bordeaux a été émise par une association et n'a malheureusement pas été retenue. Cela n'est pas le cas de Casablanca, autre ville jumelle de Bordeaux, mais qui sait tirer profit du jumelage. En ce qui concerne la partie étude paysagère, il faut savoir que chez nous, les cahiers des charges ne prennent pas en considération le paysage, sinon comme accessoire ; pour vous citer un exemple, pour le projet de restauration de la promenade de l'Etang qui est un jardin classé, le cahier des charges n'a pas exigé la présence d'un paysagiste dans l'équipe, mais d'un architecte du patrimoine. C'est au bureau d'études que revient le mérite d'avoir décidé d'intégrer un paysagiste dans l'équipe et d'en faire l'élément moteur dans le cadre de ce projet. Idem pour les plans de développement des ZET où la notion de paysage est passée loin derrière le dégagement des assiettes foncières.
Parlez-nous de la situation de la seconde ville du pays sur ce plan. qui peut servir d'indicateur sur la situation de végétalisation des autres villes du pays ?
Je me suis intéressé à la végétalisation urbaine parce qu'elle constitue l'élément essentiel pour remplir les vides urbains. A Oran, le problème n'est pas nouveau. Tinthoin signalait déjà cela dans les années 1950 et trouvait cela scandaleux pour une ville andalouse. Aujourd'hui, le constat est plus terrible encore. La réalité est que cette surface qui était de 1,5 m² par habitant en 1962 a régressé à moins de 1 m² ; je persiste à le dire et cela même si l'étude commanditée par la commune en 2007 soutient qu'il y aurait environ 6,5 m² par habitant. Je dis cela parce que l'on ne peu pas considérer une friche urbaine comme un espace vert. La différence se situe dans la densité de végétaux par are et surtout l'utilisation qui est faite de cet espace. Oran est une ville qui connaît une dévégétalisation permanente et à grande échelle. Par exemple en 1988, le Ravin de Ras el Aïn qui dépendait du secteur de l'agriculture représentait une trentaine d'hectares de jardins potagers urbains ; aujourd'hui, il ne reste tout au plus qu'un demi-hectare de ces jardins qui existent depuis 12 siècles. Le plus grave, c'est que le ravin n'a jamais fait l'objet d'une déclassification et reste donc un espace agricole, malheureusement transformé en décharge publique où même les puits ont été ensevelis sous les gravats. Mais le plus grave, à mon avis, se situe ailleurs. En matière de plantation arboricole en 2011, j'avais entrepris avec des jeunes de l'association Bel Horizon un travail remarquable d'inventaire des arbres de la ville. L'objectif de ce travail financé par la coopération française était d'établir un statut pour ces arbres remarquables et de le proposer à la municipalité. Le constat de ce travail, c'est que dans les 5 à 10 ans à venir, Oran risquait de perdre entre 40 et 60% de ses arbres d'alignement. J'avais alors entrepris à travers des articles de presse et des émissions de radio de sensibiliser les pouvoirs publics sur ce grave problème. Malheureusement, personne n'était vraiment à l'écoute. Aujourd'hui, la municipalité essaye d'effacer les traces de son incurie en arrachant les arbres morts sur les grandes places publiques. Dans mon diagnostic, j'avais signalé que cette hécatombe était pour l'essentiel due aux élagages que l'on pratique de manière systématique depuis des années.
Est-ce que l'Algérie répond aux normes internationales sur le plan du respect de la surface des espaces verts requis par habitant ?
Cette terminologie «d'espace vert» me met en rogne. L'espace vert est l'invention d'une école pour accompagner l'urbanisme et l'architecture massifs et dont le chef de file était un certain Le Corbusier. Moi, j'appartiens à une culture et à une civilisation qui a inventé le jardin et l'amour courtois, c'est-à-dire la convivialité. L'espace vert est ce patchwork que l'on installe au pied des barres et des tours pour égailler le dénuement architectural et paysager de la ville. Cela d'ailleurs me fait penser au plat persillé sur lequel repose la tête de veau chez le boucher du quartier ou plutôt de la cité. Pour en revenir à votre question, l'OMS préconise une norme de 12 m² par habitant, mais il faut nuancer cela, parce que le confort que peut générer une surface végétalisée dépend de nombreux paramètres, tels que le climat ou le degré de pollution de l'air.
Vous soulevez souvent la question des jardins ou des potagers citadins, expériences tentées et réussies sous d'autres cieux. Qu'en est-il en Algérie ?
Il ne s'agit pas de la transposition d'un modèle, parce que ces jardins ont existé par le passé dans nos villages et même dans nos villes ; ce n'est donc pas une pratique nouvelle. D'ailleurs, ils existent encore sous une forme plus ou moins clandestine dans nos villes, mais plus rarement dans les villages. En outre, jusque dans les années 70, les oranais allaient acheter leurs légumes dans les jardinets de Ras El Aïn que j'ai déjà cités. Ces jardins que l'on appelle maintenant partagés sont en mesure de jouer un rôle essentiel dans l'amélioration du cadre de vie de nos concitoyens. Leur apport est largement connu et se situe sur plusieurs niveaux tant du point de vue esthétique, écologique que socio-économique et même sanitaire ; elles peuvent permettre à des familles démunies de manger des légumes frais. Le jardinage est aujourd'hui une pratique universelle en voie de devenir un droit humain. A Amman, il existe environ 800 ha de jardins urbains depuis plus d'une vingtaine d'années. A Valenciennes en Espagne, la crise aidant, 80 ha de jardins partagés ont été créés ces deux ou trois dernières années. A New-York, ce n'est pas moins de 700 ha de friche urbaine récupérées et végétalisées que la municipalité a rachetés pour les mettre à la disposition de la population. A Pékin, ils couvrent 60% des besoins en fruits et légumes des pékinois. Nos villes regorgent de délaissés urbains qui se transforment en décharges, nos cités regorgent de friches poussiéreuses, désertiques et agressives. Aucune municipalité, fût-elle aussi riche que Crésus, ne pourra à elle seule verdir et entretenir ces espaces. Il faut donc impliquer les habitants à travers un projet qui leur soit utile. D'ailleurs, l'expérience a largement prouvé que les espaces végétalisés par les services municipaux ne survivent pas longtemps, parce qu'ils ne répondent pas aux préoccupations des riverains. Les jardins partagés qui peuvent être aussi bien potagers qu'horticoles permettront aux citoyens de créer leur cadre de vie d'en être responsables et d'apprendre à vivre ensemble. D'ailleurs, je pose une question : quel attrait peuvent donc avoir les villages tels que Tlelat ou Gdyel pour les nouveaux ruraux que l'on fabrique aujourd'hui ? Que leur propose-t-on pour s'intégrer dans ces communautés qui n'ont pas encore totalement perdu leur caractère rural? Quelle perception ont-ils de leur déplacement et de leur éloignement de la ville? Les jardins partagés ont prouvé de par le monde qu'ils peuvent répondre à de nombreuses questions et résoudre de nombreux problèmes.


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