Le président de la République a mis fin, hier, aux fonctions du gouverneur de la Banque d'Algérie. La décision a été prise lors du Conseil des ministres. Cette décision du chef de l'Etat était prévisible, surtout depuis les critiques faites par le secrétaire général du Front de libération nationale quant à la gestion des finances publiques par Mohamed Laksaci, jugée «catastrophique». Il a été remplacé par Mohamed Loukal, ex-PDG de la Banque extérieur d'Algérie. A la tête de la Banque centrale depuis 2001, l'ex-gouverneur part en laissant une situation peu reluisante. Amar Saâdani avait estimé que Mohamed Laksaci est responsable de la dévaluation du dinar et de la diminution des revenus extérieurs du pays. «Il a occupé son poste stratégique depuis longtemps sans rien faire. Il se contente de reproduire le même programme chaque année. Il est en partie responsable de l'ampleur prise par le marché parallèle des devises au square Port Saïd et ailleurs et la dégradation de la situation économique dans le pays. Nous voulons qu'il démissionne ou que l'on mette fin à ses fonctions», a-t-il lâché lors de son passage au forum de la Radio nationale, il y a quelques mois. Pour beaucoup d'observateurs, les déclarations du SG du FLN étaient annonciatrices d'un futur changement au sein de cette institution, d'autant plus que le patron du vieux parti avait déjà anticipé sur le limogeage de nombreux responsables de l'Etat, dont le plus médiatisé est celui de l'«inamovible» chef des services de renseignements depuis 25 ans, le général-major Mohamed Mediène, alias Toufik. Le secrétaire général du FLN a dénoncé ouvertement l'ex-gouverneur de la Banque centrale en lui portant la responsabilité de la dévaluation du dinar et surtout, la diminution des réserves de change du pays, estimées aujourd'hui à 120 milliards de dollars, alors que l'Algérie pouvait disposer de plus de 300 milliards de dollars. La fuite de capitaux et les transferts de devises de manière subtile, ainsi que les surfacturations n'ont jamais constitué une préoccupation pour l'ancienne direction de la Banque centrale. Mohamed Laksaci se contentait de dresser un état des lieux sans pouvoir anticiper sur ces phénomènes qui ont pourtant affaibli les finances publiques. «Nous ne sommes pas avec Laksaci puisqu'il a trahi la confiance du président Bouteflika», a lâché d'ailleurs Amar Saâdani, qui aurait certainement fait ce constat après avoir obtenu toutes les données en la matière. Un constat qui ne contredit pas la réalité, puisque le phénomène d'évasion de la devise est toujours là. Le marché parallèle des monnaies étrangères prospère et affecte lourdement le pouvoir d'achat des Algériens qui sont obligés de brader leur monnaie nationale. L'ex-gouverneur de la Banque d'Algérie a été aussi critiqué par les parlementaires, surtout lors de la présentation de son dernier rapport sur l'évolution de la situation économique et monétaire en Algérie. Il a été malmené et parfois violemment attaqué par des députés. Certains l'ont même accusé d'avoir «détruit le dinar !». Le nouveau gouverneur va hériter d'une institution se trouvant dans état épouvantable. Il devra mettre fin au marché parallèle, accélérer l'ouverture des bureaux de change et normaliser un secteur gangrené par l'informel, à telle enseigne que des sommes énormes d'argent devant servir le pays sont introuvables. Restaurer la confiance envers le marché bancaire et financier est une des missions les plus importantes que devra réussir le nouveau patron.