Alors que le commandement de l'Africom peine à trouver «preneur» en Afrique, les Etats-Unis se redéploient d'une tout autre manière au sud de nos frontières, pour asseoir leur surveillance du continent, il est vrai, en proie au terrorisme et aux fléaux multiformes. Un continent qui échappe jusque-là, à bien des égards et des regards, au «gendarme du monde» qui a subi bien des revers (intervention en Somalie au début des années 1990), et qui met cette fois-ci pied à terre à Agadez, au Niger, pour redonner une autre dimension à sa présence en terre africaine. Selon le site The Intercept, les Américains déjà présents à Niamey, la capitale, vont investir dans une base aérienne à Agadez pour y pouvoir installer leurs drones. Une information confirmée par le Pentagone dont la porte-parole a affirmé que les USA finançaient la construction d'une piste d'atterrissage et des infrastructures associées à Agadez. L'investissement officiel est de 50 millions de dollars alors que The Intercept avance le chiffre de 100 millions. Le Niger «s'est positionné pour devenir une base cruciale pour les opérations américaines dans la région, avec Agadez comme tête de pont pour lancer des opérations de reconnaissance et de surveillance contre une pléthore de groupes terroristes», estime le site. Les Américains vont mener des opérations de reconnaissance au Niger et au Tchad, mais aussi en Libye et au Nigeria. Grâce à ces drones MQ-9, des appareils qui peuvent être éventuellement dotés d'armements pour mener des frappes aériennes. C'est l'instabilité qui règne dans la région du Sahel qui offre cette opportunité aux USA et qui leur permettra aussi de se replacer par rapport aux autres forces qui y sont présentes, comme la France. En investissant dans la surveillance via les drones MQ-9 qui ne tarderont pas à faire leur apparition dans une large zone au sud des frontières algériennes, les Etats-Unis vont sûrement essayer de réussir leurs «opérations chirurgicales» si davantage des interventions à terre où aériennes s'avèrent nécessaires contre les groupes terroristes qui pullulent dans la région. Mais au-delà de ce «prétexte» de la lutte antiterroriste, la présence des drones américains est-elle pour rassurer lorsqu'on sait que beaucoup de pays voient d'un mauvais œil la présence militaire américaine dans leur voisinage ? L'expérience «ratée» de l'Africom entrée en fonction en 2008 et qui est toujours commandée à partir de Stuttgart en Allemagne, est on ne peut plus le signe du «rejet de l'Amérique». Mais les Etats-Unis ont toujours les yeux rivés sur l'Afrique qu'ils surveillent à partir de l'Espagne, à travers la «Special Purpose Marine Air-Ground Task Force for Crisis Response». L'installation de la base d'Agadez, est-elle une bonne ou mauvaise chose ? Les Etats-Unis qui affirment que la base «restera toujours nigérienne», ont-ils d'autres intentions que la lutte contre le terrorisme et le crime organisé ? Liée avec les USA par un dialogue stratégique, l'Algérie est-elle consultée, comme c'est souvent le cas, sur les questions terroristes, sur l'opportunité de ce redéploiement US en Afrique ? Les questions restent posées, d'autant qu'aucune réaction officielle n'est venue en réponse à ces interrogations. Nos tentatives de joindre le ministère algérien des AE sont restées vaines. Faut-il alors s'inquiéter d'un possible «scénario orwellien» qui ferait des Etats-Unis ce «big brother» qui scrute le monde sans se soucier des intérêts des autres nations ou plutôt compter sur les bonnes relations «stratégiques» qu'entretiennent Alger et Washington dans le domaine de la lutte antiterroriste surtout, les Américains ayant souvent mis en avant l'expérience algérienne en la matière ?