Le président turc Tayyip Erdogan n'aime pas être «contrarié». Il n'a pas tardé, hier, à réagir au vote du Parlement européen demandant le gel des négociations d'adhésion de la Turquie à l'UE. Il fallait évidemment s'attendre à sa réaction. C'est plutôt la «réponse-chantage» qui est inattendue. Le vote du Parlement européen demandant le gel des négociations d'adhésion avec la Turquie n'a pas plu à Recep Tayyip Erdogan. Dès le lendemain (hier), le chef de l'Etat turc a menacé en retour, d'ouvrir les frontières pour laisser passer les migrants voulant se rendre en Europe. «Ecoutez-moi bien. Si vous allez plus loin, ces frontières s'ouvriront, mettez-vous ça dans la tête !», a lancé M. Erdogan lors d'un discours à Istanbul. La chancelière allemande, Angela Merkel, a aussitôt réagi par la voix de sa porte-parole, Ulrike Demmer : «Nous considérons l'accord entre la Turquie et l'Union européenne comme un succès commun et la poursuite de cet accord est dans l'intérêt de tous les acteurs (…). Des menaces des deux côtés n'avancent à rien». Les raisons de la colère de M. Erdogan s'expliquent par le fait que le Parlement européen ait préconisé, jeudi 24 novembre, dans une résolution non contraignante adoptée à Strasbourg (479 voix pour, 37 contre et 107 abstentions), le gel des négociations d'adhésion de la Turquie à l'Union européenne (UE) en raison des mesures répressives " «disproportionnées» prises par Ankara dans le cadre de l'état d'urgence instauré depuis la tentative de coup d'Etat du 15 juillet. Les eurodéputés avaient toutefois réaffirmé «[leur] engagement en faveur du maintien de l'ancrage de la Turquie à l'Union européenne» et promis de «revoir [leur] position une fois que les mesures disproportionnées (…) [auront] été levées». Le ministre des affaires européennes turc, Omer Celik, a estimé que ce vote enfreignait les valeurs fondamentales de l'UE et affirmé que la Turquie ne le prenait pas au sérieux. Pour M. Celik, le Parlement européen manque de recul quand il s'agit de la Turquie et devrait surveiller son langage quand il évoque le président, Recep Tayyip Erdogan. Ce dernier avait prévenu mercredi qu'un vote des eurodéputés en ce sens n'aurait «aucune valeur» à ses yeux. Ankara et Bruxelles ont conclu en mars un pacte qui a permis d'endiguer le flux de migrants en direction des îles grecques. En vertu de cet accord, signé avec les 28 pays de l'Union européenne, la Turquie s'est engagée à reprendre tous les migrants arrivant en Grèce, y compris les Syriens. La Turquie, qui a signé en 1963 un accord d'association avec l'UE, a lancé des négociations formelles d'adhésion en 2005. Mais en raison de l'opposition de plusieurs Etats membres, dont Chypre et la France, seuls 16 chapitres de négociations sur 35 ont été ouverts à ce jour et un seul a été clôturé.