Entre l'Union européenne et la Turquie rien ne va plus alors que la température est de plus en plus glaciale entre Bruxelles et Ankara Les eurodéputés se prononceront sur la suspension des pourparlers avec Ankara jeudi au cours d'un vote en séance plénière à Strasbourg qui risque d'un peu plus creuser le fossé entre Ankara et l'Union européenne. Le président turc Recep Tayyip Erdogan a estimé hier que le vote attendu du Parlement européen sur le gel du processus d'adhésion de la Turquie était «sans valeur». Prévu aujourd'hui, ce vote non-contraignant est toutefois susceptible d'aggraver les tensions entre l'Union européenne et la Turquie qui manifeste sans cesse son irritation devant les critiques européennes sur la situation des droits de l'homme dans le pays et les lenteurs du processus d'adhésion lancée en 2005. «Je voudrais dire à l'avance depuis cette tribune en m'adressant au monde entier qui nous regarde à la télévision, ce vote n'a aucune valeur, quel qu'en soit le résultat», a déclaré M.Erdogan dans une allocution lors d'une réunion de l'Organisation de la Coopération islamique à Istanbul. «Il m'est impossible de digérer le message qu'il vont envoyer», a-t-il ajouté. Les trois principaux groupes politiques au Parlement européen, les conservateurs, les socialistes et les libéraux, ont réclamé mardi le gel des négociations d'adhésion de la Turquie avec l'UE en raison de la répression en cours depuis le coup d'Etat avorté de juillet. Les eurodéputés se prononceront sur la suspension des pourparlers avec Ankara aujourd'hui au cours d'un vote en séance plénière à Strasbourg qui risque d'un peu plus creuser le fossé entre Ankara et l'Union européenne mais qui n'est pas contraignant. En outre, la majeure partie des Etats membres de l'UE sont contre un arrêt de ces discussions avec la Turquie qui ont officiellement commencé en 2005, progressant depuis lentement. Le résultat du scrutin ne fait guère de doute compte tenu du poids des partis favorables au gel, malgré l'opposition de la responsable de la diplomatie européenne Federica Mogherini. «Nous soutenons un gel des négociations sur l'accession à l'UE», a twitté Manfred Weber, le président du groupe conservateur PPE, le plus important. «Les négociations d'adhésion de la Turquie doivent être provisoirement gelées», les conditions ne sont pas réunies «pour aller de l'avant maintenant», a renchéri son homologue socialiste Gianni Pitella pendant un débat largement à sens unique. Pour M. Pitella, la suspension provisoire des pourparlers enverra un «message politique» au président Recep Tayyip Erdogan pour qu'il stoppe «les détentions de masse, la mise en accusation de dirigeants politiques et de parlementaires, la répression à l'encontre des juges et des journalistes». Très remonté, le chef du groupe des libéraux, Guy Verhofstadt, a estimé que «prétendre que les négociations d'accession peuvent continuer dans de telles circonstances revient à tromper nos citoyens et à trahir les citoyens turcs. Trahir ceux qui regardent vers l'Europe pour leur avenir». Ouvrant le débat, Mme Mogherini a appelé à «garder les canaux (de communication) ouverts» avec la Turquie, qualifiant le gel des relations de scénario dans lequel «tout le monde» est perdant. Dans un communiqué, le vice-Premier Ministre turc Numan Kurtulmus a d'ores et déjà jugé qu'«avec ce vote, le Parlement européen s'éloigne de tout dialogue constructif avec la Turquie et soulève de sérieuses interrogations quant à la fiabilité de l'Union européenne en tant que partenaire». Dans un rapport publié mercredi dernier, rejeté par Ankara, la Commission européenne a critiqué le «retour en arrière» de la Turquie sur les critères d'adhésion au bloc européen, en particulier en ce qui concerne la liberté d'expression et l'Etat de droit. Le même jour, une visite à Ankara d'une délégation du Parlement européen visant à «rétablir le dialogue politique» avait été reportée en raison de désaccords avec les autorités turques sur sa composition.