«Gravissime et honteux précédent dans l'histoire de l'Algérie» est le décès du journaliste blogueur, a dénoncé Amine Sidhoum, l'un de ses avocats. Le journaliste Mohamed Tamalt est décédé hier au Centre hospitalo-universitaire (CHU) Lamine Debaghine (ex-Maillot), après une grève de la faim qu'il a observée depuis son arrestation fin juin dernier. Sous le choc, Me Amine Sidhoum, qui nous a confirmé la tragique nouvelle, explique que «Mohamed était dans un état comateux depuis plusieurs semaines et ne bougeait plus aucun de ses membres». «Franchement, je suis abattu puisqu'on n'imaginait pas cette issue», a déclaré l'avocat, joint par téléphone. Le décès du journaliste condamné à deux de prison ferme et 200 000 DA d'amende pour «outrage à corps constitués et atteinte à la personne du président de la République» a déclenché de vives réactions, notamment au sein de la famille de la presse. Quant à sa propre famille, la triste nouvelle a causé «douleur, colère et indignation». Il s'agit, en effet, d'une première dans les annales de la justice algérienne, puisque Tamalt, âgé d'à peine 42 ans, était toujours en détention, des conditions de détention à maintes reprises dénoncées. «C'est gravissime et un honteux précédent dans l'histoire de l'Algérie», a regretté Me Sidhoum, qui rappelle «avoir dénoncé les conditions de détention et réclamé une enquête, mais en vain». Une indifférence totale qui «prouve qu'on a affaire à des gens sans limites». Ce décès remet en cause, faut-il le dire, tous les slogans creux de liberté de la presse et d'expression avancés par des responsables à différents niveaux. Le journaliste qui jouissait également la nationalité britannique, avait été arrêté devant chez lui à Bachdjarrah le 27 juin 2016. Sa condamnation à la prison ferme début juillet fut confirmée par la chambre pénale près la cour d'Alger le 9 août, en vertu des articles 144, 144 bis et 146 du code pénal, en raison de ses publications sur sa page Facebook. Transféré de la prison de Koléa (Tipasa) à l'hôpital de la même ville le 20 août 2016, puis au CHU de Bab El Oued le lendemain, Mohamed Tamalt «a été placé en service de réanimation où il a subi les analyses et les radios qui ont montré qu'il a eu un accident vasculaire cérébral (…), ce qui a nécessité une intervention chirurgicale en urgence», précisait hier le ministère de la Justice dans un communiqué. Le département de Tayeb Belaïz ajoute qu'«après avoir été placé sous respiration artificielle et alors que son état de santé commençait à s'améliorer, (…) depuis dix jours, l'équipe soignante a découvert des inflammations au niveau des poumons et il a été mis sous traitement». Amnesty réclame une enquête Mais ce n'est pas l'avis des organisations de défense des droits de l'homme et autres représentants de la société civile. Amnesty International Algérie a déclaré que «les autorités algériennes doivent ouvrir une enquête indépendante, approfondie et transparente sur les circonstances de la mort du journaliste». L'ONG, tout en rappelant ses multiples demandes «pour la libération immédiate» de Mohamed Tamalt, «estime que les actions en justice visant à protéger la réputation de personnalités publiques ou d'inconnus doivent relever d'une procédure civile et non pénale». Le MSP a, pour sa part, expliqué que «la santé d'un détenu, même en grève de la faim, relève de la responsabilité de ceux qui l'ont emprisonné». Le parti, pour qui «le dossier des libertés et des droits de l'homme est une ligne rouge à ne franchir», appelle les autorités «à fournir à l'opinion publique toute la vérité et à situer les responsabilités».