Après Fraq Lahbab en 2010, Nouba Rasd Eddil en 2012, Nouba Ghrib en 2013, et Nouba Hosn Es-Selim en 2015, la sublime chanteuse de musique andalouse, Lila Borsali, prépare depuis deux ans son cinquième album qui , «si tout se passe bien, sortira en septembre prochain», nous dit-elle dans cet entretien dans lequel elle nous parle aussi de son nouveau spectacle «Soufia»… Le Temps d'Algérie : Votre précédent spectacle «Il était une fois…Grenade» a eu un grand succès en Algérie et à l'étranger. Et pour ce mois sacré de Ramadhan, vous présentez un nouveau spectacle «Soufia». Parlez-nous en... Lila Borsali : Au fait, ce spectacle est une introduction pour un autre spectacle plus recherché sur le soufisme. Et c'est le même principe que pour mon précèdent «Il était une fois… Grenade» dans lequel on a avait, d'abord, présenté un spectacle intitulé «Il était une fois…», avant d'y intégrer Grenade. Mais pour «Soufia», ce n'est pas la même chose, car en ce mois sacré de Ramadhan, on essaye de ne pas faire de grands spectacles et d'innover. On a, d'ailleurs, traité beaucoup de sujets qui n'avaient pas de connotation mystique ou religieuse. Seulement, pour «Soufia» le principe reste le même que pour «…Grenade». On reste dans le même état d'esprit qui est de mettre les gens dans un contexte. On évoque des textes soufis et on ne se focalise pas que sur le Alaoui et sur les textes dont on dispose en Algérie. On donne aussi quelques contes soufis, des Hikem (citations) qui comportent des morales, de petites phrases de Djalal Eddine Ar-Roumi et d'Ibn Arabi… Pourquoi le soufisme ? Evidemment, je ne suis pas une spécialiste du soufisme au même titre que je ne suis pas une historienne de Grenade. Le fait de toucher à certains thèmes nous permet juste de nous rapprocher de certaines questions… Disons qu'on n'est pas en train de donner une conférence ou de se dire spécialiste de la chose, mais c'est juste histoire de mettre les gens dans une ambiance, leur donner un thème dont ils peuvent s'imprégner et vivre le chant. Pour ce spectacle, on a fait en sorte qu'on puisse mettre en valeur ce que nous avons dans notre patrimoine, tout en le faisant dialoguer avec ce qui se passe dans le monde. On s'est beaucoup inspiré d'El Alaoui, de Sidi Boumediène, de la Qassida de la tarika tidjania, d'El Fiyachya…On a repris plein de qassaids connues que le public redécouvrira sous une autre manière, avec notre touche personnelle. Seulement, vous n'allez pas sentir de différence entre l'interprétation musicale et les textes originaux. Comme c'est le cas pour la qassida d'El Fiyachya dans laquelle on a raconté un conte juste avant la chanson, et qui a fait entrer El Fiyachya dans un contexte autre que celui qu'on imagine… Votre précédent album Hosn Es-Selim était personnel. Quel sera le thème de ce nouvel opus ? Nous avons plusieurs casseroles sur le feu et notre prochain but est la sortie de mon cinquième album sur lequel on travaille depuis deux ans déjà. Cet album sera toujours dans un esprit de création, d'une nouvelle écriture de texte et de mélodie. Le thème général sera social cette fois-ci. Il concernera l'acceptation de l'autre et la différence. Il n'y aura pas de thèmes personnels car l'artiste doit traiter différents sujets puisqu'il est aussi, à une petite échelle, un porte-parole de la société. Justement, dans votre précédent album, vous avez présenté une nouvelle écriture de textes et de mélodies signés par le maître Toufik Benghebrit. Comment les conservateurs ont-ils réagi à cela ? Comme on ne touche pas au patrimoine, on ne touche pas à ce qui existe déjà et sur quoi travaillent les conservateurs. Nous sommes aussi des conservateurs puisque nous réinterprétons le patrimoine. Mais en ce qui concerne Hos Es-selim, cela a été une expérience totalement différente à ce qui se fait sur la conservation. C'était une écriture nouvelle, donc, cela ne peut pas toucher au patrimoine, bien qu'il reste quelques personnes sceptiques par rapport au fait que ce travail pourra faire un jour partie du patrimoine. Mais ce n'est pas à nous d'en décider. Ce sont les générations à venir, car si elles reprennent notre travail, il fera partie du patrimoine, et c'est indéniable. S'il n'est pas repris, au moins on se serait fait plaisir. Y aura-t-il des collaborations dans ce cinquième album ? Avec Toufik Benghebrit, oui, car c'est lui qui m'a écrit les textes… mais je ne dirais pas plus, car je veux garder la surprise… Toutefois, c'est un album qui comporte une nouba et une chanson, qui est la synthèse de cette nouba, car durant toute la nouba, nous allons raconter une histoire et la chanson qui sera clipée sera telle une comédie musicale… En dehors de l'album, des projets en perspective ? L'album est déjà un très grand projet, puisqu'en plus de son enregistrement, on prépare un clip et pour la présentation de cet album, ça sera un spectacle et non pas juste un concert... Si l'on réussit, et que les choses se passent bien, ça sera un très beau spectacle même si cela demandera beaucoup de moyens et de soutien.