Lui, l'ex-époux, n'a pas les moyens de se payer un avocat, contrairement à Farida H. qui est assistée de Me Malia Bouzid qui a expliqué ce dossier où de douloureux arguments ont poussé Ghezloune à taper sur les doigts du papa défaillant. Le couple brisé debout face à Fella Ghezloune, la présidente de la section correctionnelle du tribunal d'El Harrach qui relève de l'autorité de la cour d'Alger, était là, en train de régler ses «mauvais comptes» à propos du non-paiement de la pension alimentaire. «Farida H., trente et un an, poursuit Mesbah (37ans), à qui il est reproché de ne pas s'être acquittée de la pension alimentaire durant huit mois, c'est à dire depuis le dernier Ramadan.» - «Qui êtes-vous pour vous permettre de laisser vos deux bambins dans le besoin ?», dit-elle sans perdre une minute ce mercredi gris à cause d'un gênant brouillard qui avait enveloppé Alger et ses environs dès la tombée de la nuit. Avant de répondre, et du haut de ses cent quatre-vingt-deux centimètres, Mesbah dont la calvitie précoce en fait un retraitable d'office, cherche ses mots. - «Madame la présidente, je ne suis pas coupable de cette situation.» - «C'est ça, c'est ça, n'allez surtout pas chercher un bouc émissaire, car en l'espèce et selon l'article du code pénal, vous êtes le seul, l'unique responsable de ces débats qui ne devraient jamais être tenus, n'était cette défaillance que le tribunal vous met sous le nez et qui attend de vous des explications à même d'éviter de gros ennuis, car monsieur le procureur n'est prêt à aucune concession.» Messaoud Kennas, le procureur, ne dit rien. Il ne dira rien jusqu'au moment où il est invité par cette Ghezloune, très estimée pour sa droiture et sa largesse d'esprit. Il demandera une lourde peine de prison ferme d'un an ! Questionnée autour des désagréments causés, la victoire n'allait pas laisser une aussi bonne veine pour se plaindre sans haine car cette Farida semble, à la voir et à l'écouter, être une femme soumise. La preuve, la voilà qui est allée vers la plainte ; il n'a pas les moyens de se payer un avocat contrairement à l'ex-épouse assistée par maître Malia Bouzidi et allait raconter la misère dans laquelle baignent ses enfants surtout. «Ils ne sortent jamais, ils ne connaissent même pas leur famille, ils ne mangent jamais à leur faim, ils ne font que voir avec leurs yeux maudissant l'environnement, nous vivons dans une pièce chez ma mère vieille et démunie», a dit, les larmes aux yeux, Farida qui allait annoncer la couleur en marmonnant qu'elle ne demandait rien ou plutôt si, par la voix de son avocate, le dinar symbolique. Et d'ailleurs, le défenseur avait plaidé «fair-play» en évitant de jeter de l'huile sur le feu, elle a refusé d'être plus maman que Farida, elle a mis seulement en garde le papa inculpé de non-paiement de la pension alimentaire contre ce qu'il pourrait recevoir sur le mental un éventuel retour de manivelle. «Ouvrez les yeux tant qu'il est encore temps, occupez-vous mieux de vos enfants. La porte de leur maman est toujours ouverte, craignez aussi encore plus Allah en reprenant la situation en main et en vous rapprochant encore plus de vos bambins, voilà le seul vœu de votre ex-épouse avec qui vous aviez peut-être connu vos plus beaux moments», a annoncé le défenseur avec un sang-froid respectable et une attitude digne. Le dernier mot de l'inculpé sous contrôle judiciaire avait été : «J'ai compris ma douleur.» «J'espère régulariser ma situation au plus vite», avait-il articulé, le front plein de sueur, des sueurs comme seule la localité d'El Harrach sait en «pondre». - «OK, le tribunal a suivi votre dernier mot et vous n'avez pas huit autres mois pour régulariser cette fâcheuse situation», conclut Ghezloune qui infligera une peine de prison d'un an, assortie de sursis.