A part le festival annuel, la commune de Djemila à vocation agricole demeure une zone rurale démunie de moyens. Eté comme hiver, on trouve quelques jeunes entassés dans les cafés en attendant des jours meilleurs. Dans cette commune distante de 60 km à l'est du chef-lieu de la wilaya, les conditions de vie les plus élémentaires font défaut. Combien de fois les élus locaux et même les citoyens ont dénoncé cette carence. Cette commune accuse un déficit en eau potable, malgré le lancement de projets conséquents dans la région. Le triangle Beni Fouda, Djemila, Beni Aziz demeurent des zones défavorisées par rapport au reste des communes de la wilaya. La jeunesse balance entre rêve et réalité Les préoccupations des citoyens tournent essentiellement autour du chômage, du logement et de l'absence de moyens. L'inquiétude des citoyens de cette commune, devant l'ampleur du chômage qui touche la région, a atteint la cote alerte maximum. 90% des jeunes de cette région sont chômeurs. Tout le temps debout, adossés aux murs, ils sont là à tuer le temps, ils sont hors du temps, divorcés avec l'espoir, ils n'attendent plus rien, rêvant éveillés d'une nouvelle vie qu'ils referont de l'autre côté de la mer, croyant qu'il suffit d'espérer pour pouvoir exaucer leurs vœux, alors que la réalité est une autre chose. Lutte, travail, combinaison et persévérance ne sont pas dans leurs cordes. Ces rêveurs qui n'ont pas vécu leur jeunesse, sont déjà vieux et ne pensent qu'à aller vers d'autres horizons, synonyme de bonheur. Oisiveté et désespoir se mêlent dans leurs regards disant tout le malheur dans lequel ils se débattent : privation et marginalisation, tels sont leur situation et leur vécu quotidien. Une petite discussion nous en dira plus. Un vendeur nous a déballé en bloc sa misère en pensant que le travail est la seule issue pour sortir de cette misère, mais il a frappé à toutes les portes, sans espoir. Avant, il avait beaucoup d'ambiance et faisait des plans grandioses et voulant faire beaucoup de choses, actuellement, il n'a plus le goût de vivre. Sa journée, il la passe entre le café du coin et la maison. L'avenir pour lui, c'est nul. Pour un autre, chômeur depuis des années, il a cherché partout, faisant des demandes, couru dans tous les sens, en fin de compte, il n'a pas trouvé du travail. A un moment, il a pensé quitter l'Algérie, mais il est toujours là et il continue à espérer. Il pense beaucoup plus à aller au sud, peut-être qu'il trouverait un boulot ? . Un autre qui travaille au noir et pense que travailler ou pas revient au même, il travaille dans un restaurant avec un salaire dérisoire. Un salaire de misère.Pour lui, les diplômés traînent dans les rues, alors sa situation est meilleure, mais il pense que la vie est difficile. Après un moment de réflexion et un soupir qui en dit long, il a ajouté : «Comment voulez-vous qu'on ait une femme, un foyer et des enfants avec 6000 DA mensuellement. Pour moi, le fait d'y réfléchir est un suicide» . Enfin, on a rencontré plusieurs jeunes qui vivent une situation difficile, mais voulant nous cacher à tout prix leur triste réalité. Combien de fois on a profité de leur misère ! La plupart, profitent de l'été afin de travailler surtout avec les touristes qui viennent spécialement pour visiter le site archéologique de Djemila. En hiver, c'est le néant. La dure réalité de cette jeunesse, désarroi et douleurs, misère et craintes, sa vision de l'avenir, les désirs et les espoirs méritent de l'attention. Cette richesse inestimable qui est la jeunesse, meurt à petit feu.