Il reste, pour l'histoire, celui qui a présidé le Mouloudia d'Alger lors de la conquête de la Coupe d'Afrique des clubs champions par ce club en 1976. Aujourd'hui, il se dit en retrait tout en restant un observateur de la vie du vieux club algérois. Il donne ici son avis sur une question qui a fait l'actualité sportive de cet été. Vous ne cessez de dire que vous êtes en retrait par rapport à la vie associative sportive. En tant qu'ancien président du Mouloudia d'Alger, vous n'allez tout de même pas nous dire que vous êtes insensible à ce qui se passe dans ce club ? Vous faites partie des journalistes qui me connaissent le mieux. Vous êtes de la sorte bien placé pour savoir que je ne suis pas de ceux qui aiment user de la langue de bois. Je n'ai jamais dit que mon retrait, ou plutôt recul, signifiait mon désintérêt pour ce qui passait dans ce club. Je tiens à préciser, puisque vous me donnez l'occasion de m'adresser à l'opinion sportive en général et particulièrement à celle du Mouloudia, que mon recul a été forcé car j'incarne une idée du Mouloudia d'Alger qui tend à disparaître. Cette idée est fondée sur le respect, dans tout ce qu'il représente comme symbolique, d'une véritable institution créée en 1921 bien avant tous les partis nationalistes et qui a fait que durant son histoire le passage du flambeau s'est effectué d'un président à un autre. Je reste ainsi le dernier président vivant d'avant la réforme sportive de 1977 qui a reçu ce flambeau de la direction de l'époque. Vous comprenez alors qu'on ne peut pas quitter ainsi ce club et à ce titre je le dis haut et fort, je n'ai jamais quitté le Mouloudia. Il se trouve que j'ai été forcé au recul par les forces actuelles qui sont à la tête de ce club, des forces foncièrement négatives que je ne peux combattre seul. Voilà pourquoi j'observe avec un œil critique et une âme triste quand je vois ce qui se passe dans ce prestigieux club et dont la presse, notamment spécialisée, en a fait ses choux gras. Parmi vos détracteurs, il y en a qui vous contestent le titre de dernier président vivant du Mouloudia d'avant la réforme sportive de 1977... On peut peut-être tout faire mais on ne peut pas contredire l'histoire. Je suis bien le dernier président encore vivant du Mouloudia d'Alger d'avant la réforme sportive de 1977. Je n'ai peut-être pas été élu au départ mais j'ai été coopté en 1974 à une période où il y avait le feu à la maison mouloudéenne, et ma première mission avait été d'éteindre cet incendie. Les acteurs de cette période difficile du club sont toujours vivants, notamment les joueurs. Ils peuvent témoigner de ce que j'affirme. Ceux qui cherchent à me réfuter ce titre sont soit des ignorants de l'histoire, soit des gens de mauvaise foi. En tout cas, c'est sous ma présidence que ce club a connu ses plus belles heures de gloire avec trois titres en une seule saison, à savoir le championnat d'Algérie, la Coupe d'Algérie et la Coupe d'Afrique des clubs champions. J'ajouterai une finale perdue de la Coupe maghrébine des clubs champions. A un niveau beaucoup plus modeste, c'est ce qu'a réalisé le grand Barça la saison passée. Cela, personne ne pourra me l'enlever. On vous reproche souvent de trop parler et de ne pas agir... Agir oui mais avec quelles forces ? L'Etat lui-même est incapable de combattre les forces négatives qui activent au Mouloudia d'Alger. Comment voulez-vous que le simple citoyen que je suis puisse le faire ? Trouvez-vous normal qu'un monsieur du nom de Rachid Marif, ambassadeur d'Algérie en Italie, ambassadeur d'Algérie auprès de la Bosnie, ambassadeur d'Algérie auprès de Malte, représentant de l'Algérie auprès de la FAO, autant dire des missions importantes, puisse ajouter à cette panoplie le rôle d'ambassadeur du Mouloudia d'Alger installé à Rome. Cela se fait au vu et au su de tout le monde. Rachid Marif fait et défait tout ce qui se passe au club. Il est celui qui tire les ficelles. Je reste persuadé que si on lui imposait de cesser toute activité au Mouloudia d'Alger, les choses vont s'améliorer dans ce club. En ce qui me concerne, on ne pourra pas nier le fait que j'ai été celui qui a contribué à mettre fin à la gabegie qui durant 7 années a vu deux Mouloudias en lice, celui de Sonatrach et celui d'El Mouloudia, alors que ceux qui étaient censé faire respecter la réglementation n'avaient rien fait. A l'époque, le PDG de Sonatrach, qui se trouvait être M. Bouhafs, avait décidé de coopter certains dirigeants du Mouloudia. A partir de là, El Mouloudia devait être dissoute. J'avais donné à M. Marif un mois pour le faire. Ayant constaté qu'il ne l'avait pas fait, j'avais remis ma démission. Avec du recul, ne croyez-vous pas que la création d'El Mouloudia avait été une erreur ? Non, ce n'en était pas une. L'idée qui était la nôtre au départ, du moins celle qui était la mienne, était d'amener Sonatrach, dans sa gestion du sport et du football en particulier, à accepter l'aide de gens qui étaient rompus aux affaires de ce sport. L'argent était disponible ainsi que les moyens également, les compétences ne manquaient pas. Il fallait en plus créer une section football entièrement arrimée à son public et nous pensions qu'El Mouloudia pouvait assumer ce rôle. Aujourd'hui, tout le monde veut commander au Mouloudia, alors que, et la presse en fait référence, on sait que rien ne se fait sans l'accord de M. Marif... Cela veut dire qu'il n'y a qu'un seul commandant et un mauvais commandant de surcroît. La débandade et l'indiscipline qui règnent dans ce club viennent de là. A partir du moment où vous choisissez ceux qui vont diriger le club comme vous le feriez pour de simples pions de jeu de dames, ce n'est plus de la gestion. Ajoutez à cela que quand on gère d'une manière aussi fluide, c'est-à-dire marquer sa présence sans être là, comment voulez-vous que les choses se passent normalement ? Pour un certain nombre de dirigeants, M. Marif c'est comme l'Arlésienne. On en parle mais on ne le voit jamais. Par contre, il décide. Quand on mettra fin à une telle situation, les choses rentreront dans l'ordre. Quelle est votre réaction lorsque vous apprenez que le Mouloudia a deux têtes en ce moment, l'une incarnée par Sadek Amrous reconnue par la DJS et l'autre par Hamid Zedek reconnue par la DRAG ? On remarque, une fois de plus, l'absence de l'autorité de l'Etat dans une affaire de ce genre. Si M. Zedek dispose d'une décision de justice en sa faveur et qu'elle n'est pas appliquée, cela veut dire que M. Amrous est en état de rébellion et qu'il se croit au-dessus des lois. Tout ce qui se passe aujourd'hui au Mouloudia a un nom et c'est toujours M. Marif qui en est l'auteur. C'est son système qui fait que nous en arrivions à cette situation là et c'est toléré par la puissance administrative. Vous pensez réellement que c'est lui qui est derrière tout ça ? Absolument. J'en suis plus que sûr. Mais qu'a-t-il à gagner avec deux présidents ? Il ne gagne rien. Il s'enfonce davantage. Et vous qu'en pensez-vous ? Je me contente d'observer et de poser le problème qui est le suivant. Amrous est un président élu. Bon ou mal élu, toujours est-il que c'est lui qui dirige le club. Il se trouve aujourd'hui contesté par ceux-là mêmes qui l'ont élu. S'il s'avère qu'il a transgressé les règles de gestion ou si on a quelque chose à lui reprocher, il faut laisser agir la souveraineté de l'assemblée générale. M. Zedek affirme avoir en sa faveur une décision de justice... Ecoutez, si réellement il avait une telle décision, qu'attend-il pour la faire appliquer ? Il aurait envoyé pour cela un huissier de justice que M. Amrous n'aurait pas daigné recevoir... Un huissier de justice vous transmet une décision de justice. Il ne peut, en aucun cas, appliquer cette décision. Seule la force publique, requise par un juge, peut le faire. Quand je vois comment les choses évoluent je doute fort que M. Zedek ait réellement le document de justice ou même celui de l'administration dont il parle. Ne croyez-vous pas que nous sommes en train d'assister à un retour de Sonatrach dans la gestion de ce club ? J'espère bien que c'est ce qui est en train de se faire. Je suis de ceux qui souhaitent voir le retour aux affaires du club de cette entreprise. Je n'ai jamais dit que Sonatrach devait partir mais qu'elle devait rester pour aider le club à s'émanciper. Ce n'est qu'avec elle que le club pourra être relancé et servir le football algérien. Un Mouloudia fort c'est une assurance pour la lutte contre toutes les déviations notamment celles qui se nourrissent de la violence. Sonatrach doit être auprès de ce club. La saison dernière elle a aidé le Mouloudia à hauteur de 12 milliards de centimes. C'est loin d'être négligeable. Cela veut dire que Sonatrach est revenue. On indique également que Sonatrach souhaiterait faire de ce club un club professionnel... Pourquoi pas ? Encore faut-il que l'entreprise trouve les gens capables de gérer un tel club. Il ne sert à rien de donner un autre habillage juridique au club pour retrouver M. Marif et compagnie à la direction de ce club. En tout cas, même si je l'ai déjà dit, le MCA est en SPA depuis 1977, c'est-à-dire depuis qu'il a été placé sous la coupe de Sonatrach.