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Absence totale de norme
La grande arnaque Marchés de gros des fruits et légumes
Publié dans Le Temps d'Algérie le 04 - 08 - 2009

Eté, Ramadhan ou jours de fête, c'est toujours la même rengaine sur les étals des fruits et légumes. Partout, les prix atteignent des seuils intolérables. Des produits, pourtant de faible consommation et même pas de première nécessité, battent des records sur la mercuriale.
La flambée est devenue presque normale et obéit à des logiques spéculatives. Forcément, on pointe un doigt accusateur vers cette mafia occulte, ces puissances de l'argent qui tiennent sous leur coupe tous les marchés de gros, qui dominent les réseaux de distribution et de stockage. On les accuse, à chaque flambée des prix. On les dénomme les mandataires.
A chaque crise d'indisponibilité de produits ou de hausse des prix, la presse et des organisations politiques et sociales tirent la sonnette d'alarme et interpellent les pouvoirs publics pour mettre fin à «l'anarchie» qui caractérise les marchés de gros des fruits et légumes. Mais qu'en est-il réellement ? Pourquoi l'Etat se trouve désarmé face à quelques centaines de gros mandataires qui régentent ces marchés ? Quelle parade pour juguler les périls de cette jungle spéculative ? Faut-il réprimer ou faire jouer la législation pour combattre la spéculation et l'anarchie de ces marchés de gros ?
Autant de questions que l'opinion ne cesse de poser, estimant qu'il est devenu aujourd'hui indispensable que l'Etat réagisse avec fermeté, rigueur et en toute transparence, en imposant sa propre régulation et son propre contrôle sur des situations commerciales, dont le moins qu'on puisse dire, c'est qu'elles sont devenues monopolistiques.
Goulot d'étranglement
Mais, comment on est arrivé à cette situation ? On sait depuis déjà plus de trente ans que la filière des fruits et légumes en Algérie est en perpétuelle crise. Outre les contraintes naturelles, la commercialisation et l'écoulement des produits agricoles ont pris des chemins sinueux, faisant intervenir d'autres maillons de la chaîne (qui en principe ne doivent pas exister), comme les négociants au noir, les acheteurs fictifs, les vendeurs sur pied, les transporteurs, les stockeurs, les «écouleurs», les fournisseurs grossistes ou les repreneurs.
Une multiplication d'intervenants qui créa de véritables goulot d'étranglement dans les circuits, induisant à chaque palier une augmentation de la marge bénéficiaire de quelques dinars et anesthésiant toute action en aval et en amont des structures étatiques réparties dans chaque wilaya, comme les fameuses DCP.
Un simple coup d'œil sur les chiffres montre l'ampleur de la désorganisation. Selon un constat établi par des services du ministère du Commerce, le marché des fruits et légumes est dominé par le marché parallèle où sont écoulés 60% de quelques dix millions de tonnes disponibles sur le marché national.
Autrement dit, plus de six millions de tonnes de fruits et légumes ne passent pas par les marchés de gros. Elles sont versées directement dans les circuits parallèles et les industries agroalimentaires de transformation. C'est un autre marché informel qui s'est greffé sur le marché officiel, en raison surtout du nombre assez faible des marchés de gros.
Le grand remède
Car il aura fallu attendre ces dernières années pour que l'Etat comprenne qu'il serait impossible d'assurer une couverture généralisée et un maillage de tout le territoire, si le nombre de ces infrastructures de gros était insuffisant. Ces dernières sont la meilleure parade pour organiser, contrôler et réguler les flux physiques et les prix des produits agricoles.
L'Algérie ne compte, en effet, que quarante-deux marchés de gros opérationnels, dont la plupart datent de l'époque coloniale. Le gouvernement s'atttelle depuis quatre ans à concrétiser un plan national d'envergure avec le projet en cours de réalisation de 50 infrastructures commerciales, divisées en trois types : quatre sont des marchés de gros à vocation nationale (un premier sera construit dans la région de Annaba, un deuxième à El Kerma, près d'Oran, un troisième sera installé dans les Hauts-Plateaux, probablement à Sétif, et un quatrième dans la région de la Mitidja, non loin d'Alger, certainement près de Boufarik).
Une vingtaine d'autres marchés de gros auront une dimension régionale, pratiquement dans chaque chef- lieu, en plus d'une trentaine d'autres espaces, dont la vocation sera locale, car il est établi que plus de sept cents communes (soit la moitié) en Algérie ne possèdent même pas un marché de détail ou de proximité. L'implantation de ce genre de marchés couvert et de proximité dans des cités à forte densité de population permettra d'absorber les activités qui s'exercent dans l'informel et répondra ainsi aux besoins aussi bien des détaillants et des petits producteurs qu'à ceux des consommateurs.
Pour les économistes, c'est la prolifération des marchés informels qui a créé l'anarchie dans la distribution, boosté les prix, dérégulant complètement la logique de l'offre et de la demande. Mais construire des marchés de gros un peu partout va-t-il mettre fin à l'anarchie et à la spéculation ? Ce n'est pas si sûr.
Il est vrai que le marché de gros constitue un véritable espace de visibilité sur la commercialisation des fruits et légumes, car il est – de par sa vocation d'établir un prix unique dit d'équilibre–, le maillon le plus déterminant dans l'écoulement au prix réel de vente et non de spéculation, sauf en cas de rareté du produit ou de forte demande saisonnière.
Cet espace permet, en effet, de faire intervenir avec efficacité les services publics dans le contrôle et la protection des produits destinés aux consommateurs, de réduire les coûts de transport et de logistique, d'améliorer les flux et d'accroître la rotation des stocks et d'imposer une certaine élasticité sur le marché grâce à la maîtrise de la distribution.
De plus, l'activité commerciale au sein de ces structures obéira à un cahier des charges unique, basé sur une réglementation claire définissant les règles de fonctionnement de ces marchés (horaires), les règles d'activité et de transactions et les conditions d'exercice de l'activité de mandataire-grossiste en fruits et légumes.
L'arme fatale de la spéculation :la chaîne du froid
Cela est naturellement nécessaire pour organiser le secteur, mais sans doute insuffisant en raison du nouveau phénomène apparu ces dernières années. Ce sont les fameux barons du froid, ces privés qui dominent la chaîne de stockage, une arme tranchante et redoutable, car c'est elle qui alimente toute spéculation. Le plus étonnant dans cette nouvelle race de spéculateurs, c'est que leur puissance a été acquise grâce à l'argent public, par le biais des crédits bancaires et des prêts bonifiés dans le cadre du PNDA.
En dépit de l'abondance des produits, la rareté est maintenue sciemment grâce à cette filière du froid et à ses énormes capacités de stockage, en jouant sur la régulation de l'offre, ce qui induit des prix élevés anormalement. Il y a quelques années, un ancien ministre de l'Agriculture avait reconnu cet état de fait, accusant publiquement les gérants des chaînes du froid de «profiter de l'aide de l'Etat pour se retourner contre lui».
Des accusations pas tout à fait gratuites, car on l'a vu, la spéculation sévit sur des produits agricoles, pourtant abondants et de saison, incitant parfois les pouvoirs publics à intervenir par des opérations d'urgence en important massivement du Canada et d'ailleurs des produits très demandés et de large consommation, comme ce fut le cas pour la pomme de terre, il y a trois ans.
L'époque où les grands agriculteurs faisaient la pluie et le beau temps est bel et bien finie. Avec la fin prématurée de la célèbre Ofla et les autres associations interprofessionnelles, comme la Cofel et la CAPCS, au début des années 1980, ce sont les mandataires qui ont pris l'ascendant sur les fellahs. Les mandataires ont fait la loi pendant des années grâce à un système élémentaire : payer plusieurs saisons d'avance des récoltes virtuelles et maintenir les dettes sur les fellahs. Mais cela est également dépassé. Aujourd'hui, la spéculation a d'autres tournures avec le développement de la chaîne du froid et des capacités de stockage des fruits et légumes.
Selon un expert de l'Institut national d'agronomie, les enjeux du marché agricole en Algérie sont devenus très importants. «Le pays entre dans la mondialisation, a signé des accords d'association avec l'Union européenne et s'apprête à accéder à l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Des faits qui imposent à l'Etat de lancer la mise à niveau de l'agriculture et des exploitations agricoles. Mais comment y parvenir quand, entre le travail réel de l'agriculteur, l'investissement public et les besoins de la société, c'est une foule de spéculateurs qui dérèglent tout le marché et ne cessent d'empêcher toute forme de spéculation ?»
H. R.

Absence totale de norme
Pour beaucoup de professionnels de la distribution des fruits et légumes, notamment ceux qui opèrent dans les secteurs des grandes surfaces, il n'y a plus de marché de gros digne de ce nom. Pas de concurrence, pas de guerre des prix, pas de balance entre l'offre et la demande, pas de contrôle, pas d'Etat du tout !

Selon eux, ils font face à de multiples contraintes, non seulement logistiques et organisationnelles mais aussi du choix de la qualité et du respect des normes d'hygiène et de santé publique. Pourtant, la réglementation est claire au niveau de ces marchés de gros, lieu privilégié pour leur achat des produits destinés à la vente sur les étals des grandes surfaces et des hypermarchés, donc des achats qui doivent avoir un minimum de qualité et de fraîcheur, selon des normes universelles. Rien de tout cela, en dépit de leurs requêtes au niveau des structures étatiques de contrôle et de prévention.
Selon un de ses fournisseurs, Khalil, il n'existe aucune échelle de choix sur les produits et leur qualité, «on vous fourgue la meilleure avec la dégradée au même prix, eddi walla khelli !» Cet ancien émigré, diplômé universitaire en agronomie, sait de quoi il parle, quand il évoque l'absence de normes de conditionnement et d'empilement, de non-respect des dates limites de cueillette ou de récolte, de l'endommagement des produits, de la méconnaissance du processus de décomposition et de bourgeonnement ainsi que les conditions de vente en l'état de certains produits, comme les oignons, les artichauts, voire même les fruits.
Car, il est déplorable qu'en Algérie, le contrôle de la qualité des fruits et légumes est presque inexistant. Puisque c'est grâce à ce contrôle a posteriori qu'on détermine le premier choix, le deuxième ou le troisième avec des prix différents selon les bourses. Or, il n'existe dans nos marchés de gros aucun laboratoire chargé de tester les fruits, de faire des analyses multicritères relatives au poids (détermination des calibres), à la fermeté du produit, à sa teneur en sucre (degré BRIX), à l'acidité, au jus et à la discrimination (creux et vitrescibles pour les melons par exemple).
On ne procède à l'établissement d'aucune fiche d'identité des produits testés, au suivi des produits dits de label ou de cru, selon les régions de production ou de récolte. Un melon de Bordj Ménaïl n'a pas la même saveur qu'un autre provenant de Mostaganem. De même que les appellations dites d'origine n'existent pas, il suffira aux acheteurs de se fier aux paroles des vendeurs pour donner une réputation commerciale à un produit dont personne ne sait d'où il a été récolté. Même topo pour les légumes, dont on ne connaît ni leur taux de chlorophylle, ni leur valeur gustative, ni même leur potentiel de conservation.
A-t-on une fois au moins détecter les défauts chromatiques et morphologiques des légumes ou supprimer juste pour la vente les matières végétales étrangères et/ou les corps étrangers (extraneos vegetable matter). Pourtant, la législation existe grâce à un arrêté interministériel du 8 janvier 1994, relatif à la qualité et à la présentation des fruits et légumes destinés à la consommation, qui précise avec détails les règles de conformité et les usages de vente de ces produits de large consommation.
L'insoutenable absence de l'Etat
Bref, il n'y a aucune visibilité, aucune transparence commerciale, aucune traçabilité, aucune marque agricole déposée, aucun indice de qualité établi. Par conséquent, la vente n'est soumise ainsi à aucune règle, elle est presque imposée par un diktat des mandataires. D'ailleurs, pour ces mandataires-grossistes, ces aspects scientifiques et sanitaires sont le dernier de leur souci. Leurs premières préoccupation est de s'organiser en association pour défendre leurs intérêts, en faisant face surtout aux rares descentes des inspecteurs de la DCP, aux agents du fisc, et aux responsables des municipalités quand le marché appartient à l'APC.
D'autres mandataires accusent directement les concessionnaires des marchés de gros, qui imposent, selon eux, des taxes exorbitantes et trop élevées sur les tonnages à chaque entrée de marchandise dans l'enceinte du marché, ce qui se répercute sur les prix de vente. Donc, dans nos marchés de gros, même si on en construit des centaines, il persistera toujours ce grand décalage entre la vente anarchique digne des années de disette et de pénurie et la qualité des produits et leur différenciation selon les tests opérés par les services étatiques.
Car, dans les marchés de gros, l'Etat est vraiment absent.C'est sans doute ce retrait qui incite aujourd'hui le département du commerce à réfléchir sur les moyens de faire revenir l'Etat dans les marchés de gros, non pas en imposant un diktat des prix, mais en créant les conditions générales du bon fonctionnement de la chaîne de distribution, de contrôle des transferts des marchandises et la transparence des transactions,

du contrôle des formes de stockage pour éviter les comportements spéculatifs, l'obligation des tests de laboratoire et les contrôles de qualité des produits mis sur les carreaux de vente, l'interdiction d'exercice illégal pour certains intermédiaires ne possédant ni agrément ni registre du commerce ainsi que le respect strict des horaires d'ouverture et de fermeture des transactions.
Au ministère du Commerce, on évoque pour bientôt une nouvelle loi qui prendra en charge les questions et les grands problèmes des marchés de gros. Ce nouveau dispositif juridique devrait, en principe, combattre l'anarchie régnant dans ces espaces ou circulent chaque jour des milliards de centimes, sans qu'il y est dans aucun marché de gros d'envergure nationale la moindre petite agence bancaire.


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