Depuis son ranch du Texas, où il coule des jours heureux avec sa petite famille, histoire de se faire oublier des catastrophes planétaires dont il en est l'auteur, George Bush Jr ne doit pas mesurer l'ampleur du désastreux héritage politique de ses deux mandats, légué à Barack Obama. Deux guerres en deux mandats et une crise financière qui a fait des millions de chômeurs et de SDF. Une sorte de «patatas calientes» (patas brûlantes) aux mains de son successeur Barack Obama qui rêve de consacrer tout son temps à faire accepter son projet de «sécurité sociale» et à réaliser durablement le changement promis dans les mentalités américaines. Deux guerres. L'une en Irak, qui donne l'impression de commencer, cette fois sans les Américains, plus que jamais décidés à rentrer chez eux. L'autre en Afghanistan, dont l'issue est plus incertaine encore par la dimension planétaire qu'elle menace de prendre. Les armées occidentales de l'Otan impliquées en Irak ont compris qu'elles ne pouvaient pas lutter sur deux fronts aussi «chauds» et donc décidé de centrer leurs efforts sur la lutte contre les talibans, laissant les Irakiens solder leurs comptes entre eux. Aux dernières nouvelles, les services de renseignements occidentaux soupçonnent les «baâthistes» d'être à l'origine du dernier attentat à Baghdad, le plus meurtrier depuis 18 mois. Un autre acteur, et pas un second rôle, qui ferait son entrée sur scène. Ces services ne disent pas, tout le monde le sait. Le pouvoir d'El Maliki n'a pas plus de légitimité que celui de feu Saddam Hussein. Les baâthistes le savent. La communauté sunnite hait le chiite Al Maliki. Dans ce pays arabe où les communautés religieuses fonctionnent comme de véritables oligarchies républicaines, les haines intercommunautaires sont parfois dormantes mais tenaces. On voit mal dans ce cas comment l'Irak pourrait retrouver sa stabilité, sachant, à plus forte raison, qu'Al Maliki a été installé par les Américains à travers un scrutin où les dés étaient pipés dès le départ. Pays ou champ de bataille Cette erreur, la légitimité par les urnes dans un pays encore aux antipodes de la démocratie, les Occidentaux sont en train de la rééditer en Afghanistan. Non que la démocratie ne soit pas bonne dans certains pays, comme le soutiennent certains régimes totalitaires, mais parce que l'Afghanistan n'est plus un pays ou un Etat ordinaire, mais plutôt un champ de bataille. Ses institutions n'ont pas connu la stabilité depuis l'invasion soviétique, voilà deux décennies. La stabilité on y pense, seulement depuis que le mal a été fait avec l'invasion de ce pays sur ordre de Bush à la suite de l'attentat de Ben Laden contre les «tours jumelles», en septembre 2001. C'était déjà trop tard, car l'occasion a été donnée au terrorisme d'appeler à nouveau au djihad. Comme au temps de l'armée rouge A quoi ressemble aujourd'hui l'Afghanistan ? A un champ de bataille et rien de plus où tout est parterre, administration, institutions comme édifices publiques. Seule reste debout la volonté de combattre des talibans et la détermination des pays de l'Otan à en faire une démocratie exemplaire. L'initiative est quelque part assez naïve ou, à l'inverse, très bien préparée par les stratèges de la géopolitique de l'Alliance atlantique. Plutôt naïve, jusqu'à preuve du contraire, parce que ni l'élection du président sortant Hamid Karzaï ni celle de son rival, l'ex-ministre des Affaires étrangères, Abdullah Abdullah, les deux revendiquant la victoire dans le scrutin en cours, n'est la solution. Une illusion L'élection du futur président afghan donnera seulement l'illusion, comme en Irak, qu'il y a un président élu. Mal élu dans un pays où déjà un scrutin présidentiel n'a pas beaucoup de sens, les préoccupations afghanes étant ailleurs. La solution, le président Obama l'a pourtant effleurée, dès sa prise de fonction en janvier. Seule une conférence régionale à laquelle seront associés tous les pays de la région, avec la participation des talibans modérés, pourrait ouvrir la voie, à terme et non dans l'immédiat, à la stabilité en Afghanistan. Pour le moment, le langage des «alliés» et des talibans est identique. C'est celui du «va-t-en-guerre». Obama en est conscient pour avoir reconnu vendredi que la solution du problème afghan exigerait beaucoup de temps. En septembre, les résultats du scrutin présidentiel seront officiellement proclamés, et Hamid Karzaï, selon toute vraisemblance, reconduit. Et après. A cette question, l'Otan n'apporte pas encore de réponse. Les voies du Seigneur sont impénétrables. Du côté taliban, on est plus transparent : c'est la guerre et rien que la guerre. L'Alliance atlantique n'a d'autre choix que de s'y préparer. Elle s'y prépare même activement depuis quelques mois avec la multiplication des attentats meurtriers contre ses troupes. Un scénario de guerre qui remonte en fait à l'ère du président Bush, qui aura réalisé le bien triste exploit d'engager des guerres qui ne finissent pas.