Ramadhan, que d'aucuns considèrent, au-delà de son caractère religieux, comme le rendez-vous de la grande bouffe, est une belle aubaine pour s'en mettre plein les poches, sachant que le jeûneur est saisi de fortes envies qui le poussent à acheter tout et n'importe quoi. Au gré des saisons, des besoins exprimés par le consommateur et en perspective d'une fructueuse rentabilité, les commerçants occasionnels ont la capacité notable de saisir toutes les opportunités (le mois de jeûne en est une formidable illustration), en s'adaptant avec une certaine aisance aux circonstances du moment, pour mettre en vente toute une variété de produits. A la veille du mois de ramadhan, ils étaient à l'œuvre pour préparer les locaux devant abriter, trente jours durant, leurs «activités commerciales». Garages lavés à grande eau, réduits repeints sur le pouce, cagibis réaménagés avec les moyens du bord… Ces différents espaces sont plus ou moins bien agencés pour en principe écouler sans difficultés leur marchandise et réaliser la plus grosse recette de l'année. Tous les ingrédients et autres ustensiles sont en outre réunis depuis un bon bout de temps. Les apprentis bonimenteurs déjà mobilisés pour être fin prêts le jour J afin d'appâter le chaland. Zlabia, qalbellouz, charbat de Boufarik et d'ailleurs, briks et bouraks sous toutes les variantes… sont autant de produits qui seront proposés aux coins des rues. Les vendeurs de diouls, de persil, de coriandre, de menthe… ne sont pas en reste et ont déjà délimité leur «territoire» pour occuper, à même le sol, les marchés et leurs alentours. Ils ont de plus, moyennant un pourcentage, assuré le placement de leur production auprès des marchands de volailles et des boulangeries notamment. Ramadhan, que d'aucuns considèrent, au-delà de son caractère religieux, comme le rendez-vous de la grande bouffe, est une belle aubaine pour s'en mettre plein les poches, sachant que le jeûneur est saisi durant la journée de fortes envies qui le poussent à acheter tout et n'importe quoi, au prétexte d'offrir à sa famille toutes les victuailles considérées indispensables à la garniture de la meïda du f'tour. Ce mois sacré nécessite cependant une organisation de haute voltige pour réussir dans les meilleures conditions les opérations de vente, d'autant qu'il s'agit de «dribbler» la réglementation en vigueur, pour faire son beurre. Petit pont au fisc Bravant tous les interdits, les «gérants» de ce type de négoce affichent paradoxalement une sûreté en soi assez remarquable et ne semblent nullement inquiétés par une éventuelle intervention des services de contrôle. Bien que, dans bien des cas, ils ne disposent d'aucun document légalisant leurs activités et qu'en plus ils font quotidiennement un magistral petit pont au fisc. Côté cour, les professionnels de l'import-export ont distribué à leurs revendeurs tous les produits propices à une forte consommation durant cette période. Qu'il s'agisse, entre autres, de conserves, de fruits secs, de friandises, de gâteaux, d'épices… Ces acteurs-patrons du marché informel paraissent, dans tous les cas de figure, bien maîtriser leur affaire, à l'exemple de Yacine. Allure sportive et lunettes de soleil de marque sur le front, cet homme de 35 ans a bien voulu nous entretenir de ses activités et de ses… projets. Manipulant deux portables, l'un pour la famille et les vrais potes, l'autre pour les affaires, il entame la conversation en précisant avoir bouclé le «programme ramadhan» depuis plusieurs jours. Toutes les transactions commerciales propres à ce mois spécifique sont «achevées depuis plusieurs semaines et les produits disponibles en quantité», lance-t-il. Ramasser un gros pactole Il indique être actuellement branché sur les «préparatifs» de la rentrée scolaire et des juteux bénéfices qu'il est certain de pouvoir réaliser. Cartables, trousses, tabliers, cahiers, stylos… sont depuis une quinzaine de jours sur les étals. Selon le même schéma organisationnel que celui mis en pratique durant le mois sacré. En fait, Yacine et ses «collègues» ne limitent pas leurs activités au seul mois de ramadhan. Loin s'en faut. Toutes les fêtes religieuses et les principaux rendez-vous saisonniers sont scrupuleusement inscrits à l'encre rouge sur leur agenda, pour acquérir, à la veille de la célébration de chacune de ces occasions, les marchandises indispensables afin de donner «l'éclat nécessaire» aux réjouissances qui y sont liées et ramasser, sans trop de casse, un gros pactole. La vaste panoplie de pétards et autre feux d'artifice, de tout genre et de tout type, qui est présentée chaque Mouloud, les couteaux, les barbecues, les sacs de charbon… et les moutons proposés un peu partout à la veille de l'Aïd El Adha participent de la «haute stratégie» commerciale de ces marchands de toutes les saisons. Ces derniers ne sont guidés que par le succès des différentes opérations commerciales qu'ils entreprennent et le gros bénéfice qu'ils escomptent empocher. Une démarche louable au demeurant sauf qu'elle s'inscrit en totale contradiction avec la réglementation régissant ce type d'infractions. Abstraction faite des fâcheuses conséquences que pourrait engendrer pour leur business une éventuelle intervention musclée des services compétents.