Omar Fetmouche, directeur du Théâtre régional de Béjaïa, est auteur, comédien et metteur en scène. Il avait créé sa compagnie Sindjab en 1976. Il est connu pour divers travaux d'adaptation et de mise en scène, dont H'zam El Ghoula, R'djal ya H'lalef, Fatma n'Soumer, Le Fleuve détourné (Rachid Mimouni), Les Vigiles (Tahar Djaout)... Dans cet entretien, il parle de la rénovation du TRB et de différents projets. Le Temps d'Algérie : Vous venez d'adapter le roman Les Vigiles de Tahar Djaout qui, d'ailleurs, a été primé au festival du théâtre professionnel 2009. Pourquoi ce choix ? Omar Fetmouche : J'ai lu Le Chercheur d'os, Les Vigiles, L'Invention du désert..., soit quatre ou cinq romans de Tahar Djaout, mais je ne dirais pas que l'adaptation du roman Les Vigiles était facile, car passer du genre littéraire au genre dramatique cela demande un travail de réflexion. Cependant, ce qui m'a intéressé c'est la structure dramatique du roman. Il y avait déjà une progression proche de l'écriture dramatique, c'est d'ailleurs ce qui m'a le plus attiré. Je me suis dit qu'une telle pièce pourrait convenir à une bonne transposition scénique de l'œuvre. Cette pièce a-t-elle été présentée dans d'autres villes d'Algérie ? Nous l'avons présenté au festival de théâtre professionnel où elle a été primée par la haute distinction, soit le prix de la meilleure œuvre artistique. On a animé deux spectacles à la Maison de la culture de Béjaïa, un spectacle à la Maison de la culture de Tizi Ouzou et une dizaine de spectacles dans les villes de l'est du pays. Nous avons clôturé cette série de représentations par un colloque sur Tahar Djaout, les 8 et 9 juillet 2009 où plusieurs universitaires ont donné des conférences sur Tahar Djaout et sur son œuvre Les Vigiles, une universitaire de Tizi Ouzou avait axé son étude sur les signes dans Les Vigiles et elle avait salué l'adaptation, c'est ce qui nous a réchauffé le cœur, car j'attendais la réaction de ces universitaires qui ont «dépoussiéré» l'œuvre. En Algérie, nous avons vu plusieurs adaptations des œuvres de Tchekhov et de Garcia Lorca, particulièrement, alors que peu d'œuvres algériennes ont été adaptées. Les textes d'auteurs algériens sont-ils plus difficiles à adapter ? Le ministère de la Culture a fait appel aux dramaturges pour qu'ils adaptent des œuvres algériennes, c'est d'ailleurs le cas des théâtres régionaux, comme le théâtre de Annaba qui a travaillé sur une œuvre de Wassiny Laredj, celui de Sidi Bel Abbès sur une œuvre de H'mida Layachi, celui de Batna a travaillé sur une œuvre de l'écrivain marocain Driss Chraïbi, c'est en sorte le résultat du ministère de la Culture qui a encouragé l'adaptation de romans algériens. Je dirais plutôt transposition scénique, car le mot adaptation me gêne un peu. Je ne pense pas que c'est une question de difficulté. Quand on a adapté Tchekhov, c'était le théâtre vers le théâtre et non pas le roman vers le théâtre. On dit pour ces cas des adaptations, mais en réalité ce sont des traductions, car lorsqu'on parle d'adaptation, c'est la transformation de l'œuvre originale. On voit ici une réelle transformation du théâtre régional de Béjaïa, quelles sont les rénovations qui ont été faites ? Les travaux de rénovation du théâtre de Béjaïa ont été axés sur les grands travaux, car depuis son ouverture en 1935, il n'a subi aucune rénovation. Les travaux d'étanchéité, d'électricité, travaux de peinture... Dès mon arrivée en 2004, j'ai attiré l'attention du CTC sur le glissement de terrain et nous avons demandé à ce qu'on construise un mur de soutènement. Il y avait aussi la grande salle qui n'était plus pratique pour des représentations. Les fauteuils étaient tous déchirés, il n'y avait pratiquement pas de climatisation. Surtout que Béjaïa accueille beaucoup de touristes en saison estivale. Nous aimerions bien que le théâtre fonctionne durant l'été. Maintenant on peut faire des représentations, car on a installé un système de climatisation de dernière génération. Nous avons redonné au théâtre sa vocation et on ne fait plus la projection de films, car la cinémathèque est plus appropriée à cette activité. Nous avons refait toutes les installations nécessaires pour que le théâtre de Béjaïa soit un lieu favorable à l'épanouissement du 4e art. On peut recevoir le Bolchoï de Moscou sans rougir. Quelles sont les principales activités du TRB durant cette saison ? On a reçu 10 spectacles du festival panafricain et nous avons activé durant tout l'été : le colloque sur Tahar Djaout, le Panaf, le festival du théâtre amazigh, la pièce Les Vigiles, les journées de la chanson amazighe. Pour ce mois de Ramadhan, nous allons présenter 12 pièces de théâtre, 10 concerts de musique consacrés essentiellement à la musique hawzi, andalouse et chaâbi. Quels sont les projets du TRB ? Nous allons monter Le Forum de Mouloud Mammeri au mois d'octobre, à l'occasion du 55e anniversaire de la révolution. Nous avons confié la mise en scène à Djamel Abdelli. Nous avons également une pièce pour enfants de Kaled Benali et la reprise de la pièce R'djal ya H'lalef de Abdelmalek Bouguermouh. C'est aussi une occasion pour présenter la première journée théâtrale Abdelmalek Bouguermouh. Nous avons programmé une rencontre sur Albert Camus et nous présenterons la pièce Les Justes qui nous a été proposée, plus des journées de discussion sur des thèmes comme Camus et le théâtre, Camus et la littérature, Camus et Tipaza... On aura des communications d'universitaires. Cette rencontre aura lieu le mois d'avril 2010, et au mois de juillet prochain on aura le thème Djaout et la littérature méditerranéenne. Prochainement, nous organiserons le 1er festival du théâtre amazigh à Béjaïa, selon la ministre de la Culture, Mme Khalida Toumi. Et vous en tant que dramaturge, avez-vous des projets ? Je ne vous cache pas que je suis en train de travailler sur la nouvelle de Maupassant, Boule-de-Suif. C'est un texte extraordinaire. Egalement, je prépare une pièce pour enfants. Aussi, on va créer une section de théâtre pour enfants à Béjaïa où toutes les normes sont réunies, ainsi qu'un cyber pour enfants, une section pour contes et marionnettes. L'ouverture de ces sections pour enfants nécessitent un apport de l'extérieur.