Les pays du G20, ou plus exactement les Etats décideurs ou moteurs de l'économie mondiale, les pays industrialisés, avec le concours des grands pays émergents, ont pris, vendredi soir à Pittsburgh, des mesures «salutaires» qui jettent les nouvelles bases de la gouvernance qui devraient mettre un terme au laxisme financier qui menaçait de ruiner la croissance économique mondiale. Globalement, le G20 a fixé les règles d'un nouveau système de régulation pour l'utilisation plus rationnelle des fonds propres des banques européennes et américaines. Cet accord, technique, devrait impulser la relance économique, après deux ans de crise à l'échelle mondiale. D'ailleurs, la reprise économique des pays riches a montré des signes encourageants, en 2009, dans la plupart des pays moteurs de l'économie européenne comme la France et l'Allemagne. L'Espagne doit attendre 2010. Cette étape, celle de Pittsburgh, aurait été impossible sans le succès rencontré au cours des deux sommets précédents du G20. Celui de septembre 2008, à Washington, puis celui de Londres en avril. Le premier avait permis, à travers des mesures politiques concrètes, de faire le constat du comportement négatif des institutions financières internationales et de fermer la voie rapide vers une crise financière comparable à celle de 1929. Dans la capitale britannique, les gouvernements des pays du G20 avaient décidé d'injecter les fonds publics nécessaires pour, officiellement, sauver les banques. Sous conditions draconiennes, cette fois, car cet argent public, du contribuable, devrait servir à financer les activités économiques des entreprises et des personnes, et non plus renflouer les fonds de la spéculation financière internationale. Dans les faits, cette condition est loin d'être observée par les institutions financières, ce qui a obligé les gouvernements occidentaux à enfreindre les lois du marché financier qu'ils ont eux-mêmes fixées, par un interventionnisme étatique. Les pays pauvres dans l'oubli Aussi, les Européens et les Américains ont toutes les raisons de pavoiser. Car, en l'absence d'un accord à Pittsburgh, le crash financier aurait été inévitable, à terme, avec cependant des conséquences encore plus dramatiques au sud qu'au nord de la planète. Si les pays riches et émergents, membres du G20, ont donc des raisons d'être optimistes, après l'accord intervenu vendredi à Pittsburgh, qu'en est-il des pays pauvres, les premières victimes d'un système financier international, conduit par la banque des banques, le FMI, et la Banque Mondiale ? Le G20 ne fait, pratiquement, aucune référence aux pays pauvres, ni même à la question du changement climatique, encore à l'ordre du jour aux Nations unies. Le document final de Pittsburgh n'évoque aucune mesure spéciale au profit des pays pauvres, sinon à travers cet engagement modeste. «Nous avons pris l'engagement d'un transfert de quotes-parts au profit des pays émergents et en développement dynamique d'au moins 5% depuis les pays sur-représentés vers les pays sous-représentés en utilisant la formule actuelle des quotes-parts comme la base de notre travail.» Une «avancée» plutôt timide pour les pays pauvres, les premières victimes du déjà ex-système, que le communiqué de Pittsburgh désigne comme celui d'une ère d'irresponsabilité dont il faut tourner la page. Comme par le passé, les pays en développement seront vraisemblablement aussi les premières victimes du nouveau supposé bon système visant à adopter un ensemble de mesures, de règles et de réformes nécessaires pour répondre aux besoins de l'économie mondiale du XXIe siècle. Ici, tout porte à croire que tout est perçu sous le prisme des pays riches. Un système financier par les riches et pour les riches En fait, par économie mondiale, il faut entendre croissance et richesse mondiales. Elle qui profite aux pays riches dont la plupart ont, sitôt la crise de 2007 apparue, renoncé à leurs engagements du millénaire dans le cadre de la lutte contre la pauvreté et l'éradication de la faim et de l'analphabétisme dans le monde à l'horizon 2009. Les 0,7% de leurs PIB pour l'aide au développement ont apparu comme un effort draconien difficile à supporter pour certaine économies des pays du G8. L'absence de préoccupation pour le sort des économies africaines, surendettées dans le communiqué de Pittsburgh - 300 milliards de dollars de dette publique contractés par l'Afrique aux G8 et aux FMI et BM - apporte la preuve que l'on va vers un système, certes, plus juste pour l'Occident et les pays riches, et, toujours injuste pour les pays pauvres. Un système plus juste pour les pays pauvres et surendettés, c'est celui qui met hors la loi les institutions financières, publiques ou privées, et la disparition de l'aide au sens don et non pas prêt qui comptabilise toutes les prestations financières dans l'aide au développement, y compris l'intérêt à un taux de marché spéculatif. Un pays, l'Ethiopie, en période de famine, avait été poursuivi par Nestlé pour non solvabilité pour un crédit de 5 millions de dollars. Ce même pays a payé à un pays européen trois ou quatre fois le montant d'une «aide au développement» depuis 1995. Ces abus du système financier international ont été passés sous silence à Pittsburgh. Comme c'est de tout temps la règle, dans les années à venir, nous serons en face d'un système financier international dont la vocation est de faire fructifier les capitaux financiers des pays riches. Un système par les riches et pour les riches.