En décidant de déplacer le sommet du G8 à L'Aquila, cité médiévale des Abruzzes dévastée en avril par un tremblement de terre, Silvio Berlusconi a voulu placer ce rendez-vous des dirigeants des principaux pays de la planète sous le signe "de la sobriété et de la solidarité". L'Aquila, et ses besoins en aide à la reconstruction, est une quasi-métaphore de la tâche qui attend sur le front de l'économie mondiale les pays industrialisés et les grands pays émergents conviés à ce sommet. Selon le président du Conseil italien, président en exercice du G8, les 40 pays et institutions internationales qui participeront au sommet, de mercredi à vendredi, représentent "90% de l'économie mondiale". Il espère qu'ils se quitteront sur un signal de confiance sur le fait que le pire de la crise économique appartient au passé. Mais des diplomates jouent la prudence: pris en sandwich entre les G20 de Londres, en avril dernier, et de Pittsburgh, en septembre prochain, le sommet du G8, disent-ils, ne devrait "pas faire d'étincelles". Le sommet s'ouvrira mercredi par des discussions sur la crise économique, sur les perspectives de reprise, sur une évaluation des différents plans de relance et sur les "stratégies de sortie de crise" avec la perspective de mettre un terme à ces mesures exceptionnelles de soutien de l'activité. Il étudiera également la gouvernance future de l'économie mondiale, Berlusconi parlant d'"un G8 des règles". "Mais n'attendez pas que Berlusconi revienne de L'Aquila avec un code de conduite pour les affaires mondiales, et n'attendez pas davantage que (la chancelière allemande Angela) Merkel revienne à Pittsburgh avec une charte pour la croissance", dit un diplomate du G8. MONNAIES DE RESERVE ET PERTINENCE DU G8 Jeudi, pour le deuxième jour, les pays du G8 (Etats-Unis, Japon, Allemagne, France, Grande-Bretagne, Italie, Canada et Russie) seront rejoints par les puissances émergentes comme la Chine et l'Inde. A la demande de Pékin, les discussions pourraient porter en partie sur le sujet sensible des changes. De sources au sein du G8, on indique que la Chine, qui juge que l'hyperdomination du dollar a accentué la crise, veut un débat sur la création d'une nouvelle monnaie de réserve. L'annonce a fait reculer le dollar, très sensible aux déclarations de Pékin, dont 70% des 1.950 milliards de dollars de réserves de changes sont libellés en devise américaine. "La crise financière a dévoilé certaines faiblesses du système de changes international", a dit le vice-ministre chinois des Affaires étrangères, Je Yafei. S'invitant dans le débat désormais traditionnel sur la pertinence du G8 - ce forum peut-il régler les défis mondiaux ou n'est-il qu'un club des nations les plus riches ? -, Angela Merkel a estimé jeudi que le sommet de L'Aquila démontrerait que "le format G8 n'est plus suffisant". D'autres membres, comme le Japon ou le Canada, apprécient en revanche son "format compact" tandis que l'Italie prône davantage de liens formels entre le G8 et les grandes puissances émergentes. "Une association stable et structurée avec les grandes économies émergentes est nécessaire", juge Giampiero Massolo, le diplomate italien chargé de la préparation du sommet. Pour la première fois de son histoire, le G8 diffusera du reste une déclaration commune avec les pays émergents du G5 - Chine, Inde, Mexique, Brésil et Afrique du Sud - et l'Egypte, invitée par Rome. CHANGEMENT CLIMATIQUE Le changement climatique est l'un des domaines dans lesquels les progrès pourraient être les plus tangibles à L'Aquila alors que la communauté internationale prépare la conférence de Copenhague, à la fin de l'année. L'objectif est de trouver le successeur du Protocole de Kyoto, première initiative mondiale de réduction des émissions de gaz à effet de serre. De nouveaux engagements pourraient par ailleurs être pris en matière de lutte contre la pauvreté et pour la sécurité alimentaire. Dans une lettre adressée aux dirigeants du G8, le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, les a exhortés à "franchir le Rubicon" dans le combat contre la pauvreté.