Malgré toutes les péripéties vécues par les Verts et les supporters algériens en Egypte, malgré l'hostilité qui a entouré leur mauvais séjour au Caire, ce soir, il y aura du bonheur dans toutes les contrées d'Algérie. Cela fera oublier aux Algériens toute la campagne de haine menée contre eux et leur pays, par de supposés frères, même si tous les Egyptiens ne sont pas à condamner absolument. Seulement, jamais au grand jamais, un pays n'a montré autant de chauvinisme pour un simple match de football comme l'ont fait les Egyptiens ces dernières semaines et qui, malgré ce qui s'est passé cette semaine au Caire, continuent de chauffer à blanc, par presse interposée, le public contre l'Algérie. Les médias égyptiens ont préparé leur coup depuis la défaite de l'équipe égyptienne à Blida, pour mettre en ébullition les millions de fans locaux en inventant toutes sortes de ragots sur l'Algérie et le peuple algérien. Ils ont préparé les esprits, fait monter la mayonnaise de la haine contre l'Algérie auprès du public local, ce qui a encouragé les ultras à faire la guerre à tout ce qui est algérien. Face à toute cette préparation au pire, les officiels algériens, sentant le danger, y compris pour les relations bilatérales jugées «excellentes», ont invité une délégation de journalistes égyptiens qui a séjourné chez nous, et a été reçue par de hauts responsables, pour calmer la tension. Or rien n'y fit. Les médias égyptiens privés et même publics ont poursuivi le matraquage tous azimuts. Pendant ce temps, à part un appel du chef de la diplomatie égyptienne lancé conjointement avec son homologue algérien dans le sens d'éviter les dépassements, les officiels égyptiens laissaient faire. Dans ce genre de situation, c'était au président égyptien en personne d'intervenir, s'il voulait réellement que les liens solides entre les deux pays ne soient pas mis à mal. Et ce qui devait arriver arriva le jour même où l'équipe d'Algérie foula le sol égyptien. Non seulement nos joueurs ont été violemment agressés, mais encore les services chargés de leur «sécurité» ont laissé faire, et qui plus est, les médias égyptiens ont accusé les joueurs d'avoir mis en scène leur propre agression. Ils seraient alors devenus des masochistes ! Cette provocation a été aggravée par le silence des officiels égyptien qui, au lieu de présenter des excuses aux Algériens en rendant responsables de ces incidents des énergumènes comme il en existe partout, ont tacitement soutenu la version du mensonge. Tout cela pour un match de football ! Le chauvinisme égyptien l'a emporté sur tout esprit sportif. L'Egypte, qui se prend réellement pour «la mère du monde», n'entend jamais perdre la qualification au Mondial, quand bien même l'équipe égyptienne ne disposerait pas d'assez d'atouts comparativement à son homologue algérienne pour parvenir à ses fins. Dans les esprits des dirigeants égyptiens, s'il y a un pays qui représentera le monde arabe en Afrique du Sud, cela ne peut être autre que l'Egypte, «le leader arabe incontesté». C'est ce sentiment de supériorité qui a guidé les dirigeants de ce pays à tous les niveaux et qui continue de les guider, d'autant que la Fifa n'a pas été assez «regardante» devant tous les dépassements survenus avant, pendant et après le match du 14 novembre, contre les Algériens, en dépit du dossier en béton présenté par la délégation algérienne. La patience et ses limites Face à la campagne haineuse menée par les médias contre l'Algérie et les Algériens traités de tous les noms par des plumitifs locaux, encouragés par le silence complice des autorités, la patience des nôtres ne pouvait plus être contenue. Il y a véritablement atteinte à la dignité de l'Algérien. Certains de nos médias, qui ne faisaient que rapporter au départ les cris d'orfraie aboyés par des animateurs d'émissions radiotélévisées égyptiennes, se sont mis à se défendre. Les Algériens ont été blessés dans leur amour-propre par des médias égyptiens irresponsables, stimulés dans leurs errements par l'absence de mises en garde officielles. Au lendemain de l'attaque du bus transportant la délégation algérienne de l'aéroport du Caire vers l'hôtel, la convocation de l'ambassadeur égyptien au ministère des Affaires étrangères a été perçue par les officiels égyptiens comme «une insulte» à la grandeur de l'Egypte. C'était cette convocation somme toute banale dans tous les pays du monde et dans tous les usages diplomatiques qui avait titillé la sensiblerie des dirigeants de ce pays, dont la gloriole démesurée ne pouvait accepter «pareil affront». Ce précédent a encore contribué à attiser les inimitiés, notamment dans les milieux médiatiques irresponsables et chez un public hostile à souhait. Dans ce climat délétère, des allumeurs de foule professionnels ont commencé à diffuser des vidéos sur internet montrant des supporters algériens blessés après le match et l'on évoqua même des décès. Des supporters algériens touchés dans leur dignité, eux aussi chauffés à blanc par l'accumulation des faits survenus au Caire depuis jeudi dernier et se souvenant que les Egyptiens avaient été accueillis avec respect lors du match de Blida, n'ont pu retenir leur colère. C'est que les démentis de l'ambassadeur d'Algérie au Caire à ce sujet, apportés après consultations et vérifications parvenues en retard à cause de l'absence de réaction immédiate des officiels égyptiens, n'ont pu prévenir ces réactions, il est vrai réprouvables. Ils se sont pris alors à certains intérêts égyptiens en Algérie. Du reste, les autorités algériennes ont prévu ce genre de débordements rendus inévitables par toute la campagne antialgérienne menée en Egypte. Des mesures supplémentaires de sécurité ont été prises pour protéger ces intérêts, mais aussi les ressortissants égyptiens vivant ou travaillant en Algérie. Contrairement à leurs homologues égyptiens qui n'ont pas levé le petit doigt contre les foules en délire qui malmenaient les supporters des Verts au Caire, les autorités algériennes ont rendu public lundi un communiqué appelant à soutenir l'équipe nationale, y compris en se déplaçant à Khartoum avec toutes les facilités, dans le calme et la retenue. A 48 heures du match d'appui, les médias égyptiens, qui ont allumé la mèche et l'ont entretenue, ont commencé bien tardivement à tempérer les ardeurs. Ils se sont souvenus que les deux pays ont des intérêts mutuels, que les deux peuples sont frères et que ce n'est pas à cause d'un match de football qu'on allait remettre en cause des relations historiques. En réalité, s'ils ont commencé à se rétracter, même timidement, c'est qu'ils ont compris leur immense bêtise. Les Egyptiens sont connus pour leur couardise lorsqu'ils sont loin de leurs bases. Si le ton haineux à l'égard des Algériens a été quelque peu remisé depuis l'arrivée des deux équipes à Khartoum, c'est bien parce qu'ils n'ont pas les»moyens» qu'ils avaient au Caire pour intimider les nôtres. Ils ont eu quand même une idée, celle d'inventer une «attaque» du bus transportant les joueurs vers leur hôtel, bien entendu attribuée aux supporters algériens. L'information a fait le tour des rédactions au Caire. Malgré le cynisme qui les habite, ces gens-là ne pourront pas triompher de la détermination des Verts aujourd'hui, au Soudan, où ils sont soutenus par des milliers de fans venus d'Algérie, mais aussi de supporters soudanais acquis à l'équipe nationale qui a joué le jeu en toute sportivité au Caire. Les supporters des Verts n'ignorent pas les coups bas que peuvent monter les Egyptiens pour disqualifier l'équipe. Ils se comporteront en conséquence, sachant que les Verts vont l'emporter haut la main sur ce terrain neutre, en jouant simplement au football, celui des puristes, propre aux Algériens. Ils vont ainsi administrer une tannée aux Egyptiens imbus de leur personne, sur le terrain, et avec l'art et la manière, qui donnera lieu ce soir, à la fête. Rafik Saïfi l'a prédit hier, en expliquant les sentiments de ses camarades à ce sujet. «Au niveau mental, on a essayé d'oublier. On ouvre une autre page. Ce sera un autre match sur terrain neutre, un match d'hommes. On va montrer qui on est et donner un petit peu de bonheur au peuple algérien, qui a souffert avec nous», a-t-il dit.