La seconde journée du colloque international relatif aux mythes anciens à l'épreuve de la modernité dans les littératures africaines a regroupé des conférenciers de haut niveau, rappelant cette notion de mythes séculaires et contemporains. Jeanne Marie Clerc, professeur émérite à Montpellier, a mis en exergue la corrélation entre mythe de Médée et le mythe fondateur gabonais Mvett. «Le recours au mythe grec permet de décrire une réalité historique gabonaise caractérisée par le pouvoir ravageur d'une technologie d'importation», indique M. Clerc. Avec l'utilisation du mythe d'Osiris et d'Isis, la conférencière Jacqueline Jondot, professeur de littérature anglaise à l'université de Toulouse, le Mirail définit «à travers l'écriture du romancier anglo-soudanais Jamal Mahjoub une relecture et réinterprétation de l'histoire pour montrer l'ambiguïté du mythe osirien». Des repères socio-identitaires Pour Dalila Mekki, docteur d'Etat à l'université Badji Mokhtar de Annaba, les divers mythes anciens africains ou de la Grèce antique transmettent des repères socio-identitaires ou des croyances anciennes, alors que les modernes renvoient à la civilisation moderne technicienne qu'ils valorisent ou au contraire ont un sens réducteur. Dans sa communication, Salaka Sanou témoigne du mythe du «mari de nuit» (poursuivies par des génies, les jeunes filles ne peuvent avoir une vie sentimentale ni sexuelle) présent dans la société burkinabé par le biais du roman d'Adiza Sanoussi. Hervé Sanson exhume les clichés que sont les mythes dans le vécu, le ressenti et le toucher à travers l'œuvre de Habib Tengour, notamment Le vieux de la montagne et le maître de l'heure. La conférence d'Emmanuel Matateyou focalise, par le biais de la littérature camerounaise, sur les anciens mythes comme celui de chasser le colonisateur et les nouveaux inhérents à l'argent, la migrité, l'urbanité, les spiritualités émergentes et le sexe. Pour sa part, la sociologue et enseignante en littérature Yamilé Ghebalou Haraoui appréhende les mythes de la revendication, de la lamentation et de la création poétique dans la littérature féminine africaine. Son étude, qui porte sur les écrits de trois femmes écrivaines, l'Algérienne Malika Mokaddem, Ken Bugull (sénégalo-béninoise) et la Camerounaise Calixte Beyala, ressuscite les figures des reines africaines, notamment Zingha d'Angola, Pokou de Côte d'Ivoire ou Ranavalona de Magadascar et les amazones du Dahomey. «Dans cette écriture féminine, toutes les errances sont permises», dit-elle. D'autres communications pertinentes de Bisanswa, de Abdoun, Samin, Hammouti, Mengara, Amina Bekkat, Tanella Boni, de Afifa Brerhi puiseront dans cette réserve des mythes africains inscrits dans la modernité. Ce colloque a permis de mieux comprendre nos sociétés africaines à travers la littérature, toutefois ces conférences assez didactiques peuvent-elles susciter l'engouement d'un large public ?