La campagne de vaccination contre la grippe A/H1N1 a démarré dans un climat de méfiance et de suspicion. Après plus de deux semaines de son lancement, le 31 décembre 2009, le nombre de personnes qui se sont fait vacciner est de moins de 1000 personnes, selon le dernier bilan établi par le ministère de la Santé. La polémique soulevée sur l'innocuité du vaccin a suscité la réticence de la population algérienne, même parmi le personnel de la santé, convaincu de moins en moins de la nécessité du vaccin. Les campagnes de sensibilisation renforcées par le ministère de la Santé et la vaccination en direct devant la chaîne nationale de télévision du ministre du même département, Saïd Barkat, n'ont pas eu d'écho face aux spéculations ayant alimenté les chroniques des quotidiens nationaux, laissant sous-entendre que «l'Algérie a importé un produit douteux». Résultat, la campagne de vaccination tant attendue n'a drainé que très peu de monde, notamment parmi le personnel de la santé. Au dernier bilan, 800 personnes seulement se sont fait immuniser contre le nouveau virus. Rappelons que le nombre de décès liés au virus en Algérie est de 57 sur un total de 889 cas confirmés (selon le dernier bilan rendu public). Dans une virée dans les structures sanitaires publiques, nous avons constaté qu'effectivement un nombre restreint de médecins et de femmes enceintes ont marqué leur passage au service de vaccination. Au centre hospitalo-universitaire El Kettar (Alger), uniquement deux personnes du corps médical se sont portées volontaires : un maître assistant et un agent de sécurité. Au CHU de Bab El Oued, le taux d'engouement n'a pas dépassé 0%. Idem pour la clinique d'El Biar où les doses de vaccins réceptionnées n'ont pas été touchées. Pour les femmes enceintes, même résultat. La psychose du vaccin a gagné du terrain malgré la l'opération de sensibilisation lancée tambour battant. Au CHU Mustapha Pacha, aucune exception n'est enregistrée. Quelques médecins ont bravé la peur mais le taux reste relativement faible. Les femmes enceintes redoutent les effets secondaires Les femmes enceintes craignent également les effets secondaires du vaccin sur le fœtus. Les futures mamans préfèrent jouer la carte de la prudence face au vaccin. En plus, le retard mis dans la réception des résultats de l'autopsie sur la femme médecin à Sétif, le 31 janvier, suite à sa vaccination, a élevé le doute par rapport à l'innocuité du vaccin. Les médecins interrogés sur leur réticence affirment que «la vaccination ne se justifierait que pour des groupes d'individus pour lesquels le risque immédiat de complication grave et de mortalité serait élevé (malades chroniques, femmes enceintes…», ajoutant que dans «le cas contraire, vaut mieux éviter les effets secondaires que peut provoquer éventuellement l'adjuvant que contient le vaccin, particulièrement quand on sait que le virus risque de muter et donc le vaccin ne serait plus efficace». Selon la même source, «cette grippe est très contagieuse mais peu virulente, et pour la grande majorité des cas, quelques jours de repos sous Tamiflu suffisent pour être remis sur pieds». Pour les femmes enceintes questionnées, elles admettent qu'elles ont très peur d'attraper le virus mais il est plus prudent de ne pas se faire piquer avec un vaccin fait à «la va-vite» et qui peut s'avérer source de beaucoup de risques. Face à cette polémique, le ministère de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière n'a pas trouvé d'autre solution que d'intensifier la campagne de sensibilisation sur l'importance de la vaccination, le moyen le plus efficace pour interrompre la propagation virale dans la population, notamment donc chez les femmes enceintes, les nourrissons et les malades chroniques. Cette campagne va même s'élargir, en impliquant le ministère des Affaires religieuses et des Wakfs qui par le biais des imams lancera une opération de proximité dans les mosquées. Dans le même cadre, le ministère a tracé un programme de formation et de sensibilisation sur l'importance du vaccin contre le virus pandémique A/H1N1 au profit des personnels de santé. Ce programme représente un supplément d'information sur l'efficacité du vaccin et son innocuité. Il s'agit aussi d'un moyen d'expliquer d'une manière scientifique l'utilité de la vaccination pour la protection contre la grippe porcine qui, selon le ministère de la Santé, «connaîtra en Algérie un pic pandémique entre la fin janvier et le début février». Au moins 13 500 décès dans le monde, selon l'OMS Selon le dernier bulletin hebdomadaire de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), la grippe A/H1N1 a fait au moins 13 554 victimes à travers le monde depuis le début de l'épidémie en mars 2009. Le virus de la grippe A est encore présent dans 208 pays et sa circulation reste particulièrement active à l'est et au sud de l'Europe (Roumanie, Turquie, Ukraine et Suisse), ainsi que dans le nord de l'Afrique (Maroc, Egypte, Algérie) et le sud de l'Asie (Népal, Inde, Sri Lanka).