On a rarement entendu se plaindre les grossistes, les détaillants, les transporteurs, les «transformateurs» et les «conditionneurs» de la pomme de terre, mais ce sont eux qui vont s'organiser dans un «conseil interprofessionnel de la filière» dont un comité provisoire chargé de sa préparation vient d'être installé au cours d'une réunion avec le premier responsable de l'agriculture, le ministre en l'occurrence. S'il s'agissait de concilier les intérêts de tous ces «professionnels de la filière», on n'aurait peut-être pas besoin d'investir dans un tel espace de «concertation» avec les moyens publics, puisque jusque-là, en dehors des producteurs et des consommateurs de ce produit, tout le monde semble trouver son compte. En dehors des accusations échangées cycliquement en période de tension extrême entre les différents «intervenants» dans l'inextricable chaîne de distribution de la pomme de terre, on s'entend plutôt trop bien dans les conclaves informels pour aller s'encombrer dans une structure officielle qui, de toute façon, n'apportera pas grand-chose à des opérateurs qui ont déjà plafonné leurs profits. Quand le prix de la pomme de terre atteignait des seuils inaccessibles pour les petites et moyennes bourses, les grossistes et les autres «intervenants» ne se sont pas exprimés, seules les ménagères ont fait entendre leur détresse devant l'impossible accès à un produit théoriquement à la portée de tout le monde parce que de large et quotidienne consommations. Et de brandir le couffin désespérément vide, pendant qu'ailleurs on s'affaire à justifier l'injustifiable plutôt que de «proposer des solutions» que sont précisément censés apporter les conseils interprofessionnels de la pomme de terre et d'autres filières encore. Curieusement, les explications dans ces moment de crise s'entremêlent comme dans un élan de solidarité agissante mais paniquée : ce sont les vendeurs qui expliquent les difficultés des producteurs, les conditionneurs celles des transporteurs, et les transporteurs celles des transformateurs. Pour boucler la boucle, les pouvoirs publics réagissent systématiquement par la baguette magique de l'importation présentée comme une panacée à la stabilisation du marché. Comme on ne stabilise qu'un marché régi par des règles universelles, les choses restent en l'état, jusqu'à ce que le tubercule ne trouve plus preneur, ou la prochaine récolte. On connaît déjà l'impact des conseils interprofessionnels du lait et de la viande et ce sera, «si tout se passe bien», la même chose pour la pomme de terre. S'agissant des céréales, il y a une sensible amélioration et «le conseil» n'y est pour rien. Cet e-mail est protégé contre les robots collecteurs de mails, votre navigateur doit accepter le Javascript pour le voir