Quelle belle merveille que cette prodigieuse mémoire qui ne fait ni faux bond, ni le mur, mais reste intacte et fidèle à des souvenirs plaisants ou désagréables engrangés tout au long d'une carrière professionnelle. C'est cette constante mémoire de Mahmoud Boussoussa, auteur de cette nouvelle parution qu'il dévide comme un fil en égrenant ses réminiscences. Des souvenances de sa douce enfance à Ziama Mansouriah, puis à Bouzaréah, son itinéraire scolaire et universitaire, à Alger et Tunis, et ses trente années comme journaliste au quotidien El Moudjahid sont relatés avec beaucoup d'intensité et d'objectivité. Cette nouvelle publication, Du côté du 20, rue de la Liberté, de Mahmoud Boussoussa parue aux éditions El Maârifa qui replonge l'auteur des décennies en arrière fait le point sur son parcours personnel et professionnel. Cet ouvrage, étoffé de plus de 200 pages, recentre le débat sur la carrière de journaliste, un métier dur mais fascinant qui est vécu par Mahmoud comme un sacerdoce. Boussoussa a voulu à travers son récit nostalgique rapporter cette passion qui anime tout reporter qui embrasse avec abnégation cette profession. Cette narration est compartimentée en divers chapitres, où il axe sur son expérience de trente années au quotidien El Moudjahid. Mahmoud raconte ses débuts en bâtonnant des dépêches puis le terrain avec ses enquêtes et reportages, ses promotions et ses missions à l'intérieur du pays et à l'étranger. Il évoque avec subtilité cet esprit convivial qui existait dans les rédactions et cette entraide, solidarité et amitié entre collègues. Boussoussa semble nostalgique de cette époque à jamais révolue. Il dit avec simplicité les canulars, facéties et les plaisanteries entre collègues. A aucun passage il n'invective ni fait de reproches, lui qui a toujours été discret et pacifique. Un hommage aux travailleurs d'El Moudjahid
Boussoussa a mis en exergue les périodes fastes et déplaisantes du journal, notamment la séparation du titre avec les moyens d'impression et la compression du personnel et les années de terrorisme avec leur lot de victimes. En annexe, il rend un hommage à tous travailleurs du journal El Moudjahid et aux victimes du terrorisme. Des photos de ses missions, couvertures et entretiens se greffent à ce récit. Dans le registre de son travail journalistique, il témoigne de ses multiples reportages, en Italie, à Baghdad, à Qatar et en Bulgarie. Avec moult détails, il donne d'innombrables informations, lui le journaliste qui ne se départit pas de son souci d'informer. Deux grands chapitres sont consacrés à des entretiens avec le général Giap, héros de la bataille de Diên Biên Phu, et Abou El Izz, l'ancien ambassadeur de l'Etat de Palestine à Alger. A travers une écriture fluide, riche en informations et en précisions qui étonnent, l'auteur traduit ses ressentis amusants ou déplaisants et ses brisures de mémoires. Humbles à l'image de l'homme, son récit et son authentique sont empreints de spontanéité et de sincérité. On retrouve du punch, de la vitalité et de l'intensité dans ce premier ouvrage qui espérons sera le prélude à d'autres. Derrière la superbe narration de l'auteur, se profile de jolis sujets de réflexion sur le journalisme, la condition humaine et le pouvoir des mots. Lui, en tous cas, les manie avec une extraordinaire virtuosité.