Il y a vraiment un problème concernant le propos raciste en France. Et pas seulement tel qu'il se présente de manière générale. L'embarras est maintenant tellement évident qu'on parvient à en parler franchement : les idées, ou du moins les paroles discriminatoires dans la bouche d'un homme ou d'un courant politiques peuvent très bien être payantes en termes de retombées électorales. Et ça veut dire ce que ça veut dire, même si ici et là on prend mille et une précautions pour le suggérer. La société française ou des pans entiers de la société française seraient donc susceptibles d'être séduites par le discours raciste au point d'accorder leurs suffrages à ceux qui pourraient le porter et l'exprimer publiquement. Des décennies durant, l'extrême droite et l'homme qui l'a toujours incarnée, Jean Marie Lepen, en a eu le monopole. Paradoxalement, le reste de la classe politique globalement censée lui porter la contradiction sur le fond de ses idées ne l'a pas toujours fait avec une détermination et une conviction à la mesure de leurs différences. Mieux- ou pire - les confrontations avec ce courant ont souvent été situées sur le terrain de l'opportunisme électoral qui serait ainsi l'unique motivation du Front National pour développer son discours et avancer ses propositions. L'extrême droite a rarement réussi un score signifiant en France et ses adversaires croyaient de bon temps de dire à chaque fois que ses électeurs, peu nombreux au demeurant, il les doit au discours haineux dont il ne s'en est jamais caché. Puis Lepen s'est payé un deuxième tour d'une élection présidentielle, avec le concours précieux de la gauche, censée précisément être aux antipodes des idées racistes. Nicolas Sarkozy viendra avec le reste, puisqu'il a simplement été accusé, comme candidat, puis comme président de «chasser sur le terrain de l'extrême droite». Maintenant que le président français en exercice a même toutes les chances de succéder à lui-même et que la gauche n'a pas l'intention de renoncer à son terrain de combat, le malaise est d'autant évident que par intermittence, des hommes politiques francs-tireurs sortent les «petites phrases» qui font scandale et polémique avant d'être oubliées. Le fantasque (socialiste !) Georges Fréche vient de servir son énième propos raciste à l'endroit de Laurent Fabius. Le problème est qu'il est candidat à sa propre succession à la tête de la région du Languedoc Roussillon et qu'il est presque sûr d'y arriver. Au parti socialiste, on veut bien lui substituer une liste maison, mais elle n'a pas beaucoup de chances de gagner. «Il vaut mieux perdre une région que vendre son âme au diable», telle est la devise de l'état-major du PS. Ah bon ? Les électeurs de cette région seraient donc si sensibles au discours raciste pour qu'on soit si sûr que M. Fréche va triompher ? ça va même être la première fois qu'on nous le dit aussi franchement. Cet e-mail est protégé contre les robots collecteurs de mails, votre navigateur doit accepter le Javascript pour le voir