Après un premier recours à la justice qui a prononcé l'illégalité de la grève et ordonné la reprise des cours, le ministère de l'Education nationale qui menace les grévistes de radiation a décidé de passer «la vitesse supérieure» en prenant d'autres mesures qualifiées par les syndicats autonomes «de menaces injustifiées», de «décisions illégales et irréfléchies». En plus des mises en demeure renouvelables dans les 48 heures qui seront adressées à tout enseignant qui n'aura pas regagné son poste de travail dimanche (hier ndlr), faute de quoi, «il sera procédé à sa révocation et à l'annulation de ses années d'expérience dans la Fonction publique», voilà qu'il évoque carrément des actions en justice en vue de dissolution définitive des syndicats qui refusent de se conformer à la décision de la justice. Du point de vue légal, peut-on procéder à la dissolution d'une entité syndicale agréée ? Que répondent les syndicats à «ces nouvelles menaces qui planent sur les libertés» garanties par les lois de la République ? Pour l'Union nationale des personnels de l'éducation et de la formation (Unpef) qui a cessé la grève et appelé les enseignants à reprendre leur travail à partir d'hier, pour «se soumettre au jugement rendu lundi par la chambre administrative du tribunal d'Alger, ordonnant la reprise immédiate des cours», affirme ne rien craindre car «notre organisation est légale, agréée et se soumet aux lois de la République», déclare Amraoui Messaoud, chargé de la communication au sein dudit syndicat. Tout en qualifiant les menaces du ministre qui «ne font que consolider notre détermination» de recul du gouvernement par rapport à ses engagements et de son manque de crédibilité, la même voix affirme que «l'Unpef a saisi le Conseil d'Etat qui tranchera ces questions». L'Unpef, avance-t-il, «n'est pas prête d'abandonner ses revendications pour autant». Syndicats agréés et grève légitime
Pour le Conseil national autonome des professeurs de l'enseignement secondaire et technique (Cnapest) dont la décision du gel ou non de la grève interviendra aujourd'hui, «Benbouzid n'a pas le droit d'enfreindre les lois de la République». Joint hier à ce sujet, Messaoud Boudiba, chargé de la communication au Cnapest, estime qu'«il est illégal de dissoudre un syndicat agréé par la loi algérienne», affirmant que le Cnapest a respecté toutes les étapes légales pour aboutir à la grève, refusant «ces intimidations du ministre» qui a enfreint les lois «en décidant d'embaucher 50 000 enseignants sans concours préalable». Il regrette par là même «la coalition des membres du gouvernement pour enfreindre la loi» et «la hogra qu'ils affichent à l'égard des enseignants». Meziane Meriane, premier responsable du Syndicat national autonome des professeurs de l'enseignement secondaire et technique (Snapest) dont la grève à laquelle il a appelé à la mi-février n'a pas drainé beaucoup de monde, s'est contenté de dire que «la sagesse doit l'emporter sur toute escalade qui n'est dans l'intérêt de personne», refusant de s'exprimer sur le volet «légal» des déclarations du ministre. Recours excessif à la justice Le Conseil des lycées d'Algérie (CLA), par la voix de son porte-parole Idir Ahour, estime pour sa part qu'«on a atteint les limites du légalisme syndical». Affirmant que les décisions de justice ne doivent pas avoir lieu, le même responsable explique qu'une grève décidée par une assemblée générale, légitimée par la mobilisation, doit aboutir à des négociations. Si ces dernières échouent, on doit recourir à une médiation. La menace du ministre est, selon lui, illégale. «Ce qui est illégal, c'est le recours systématique à la justice dans la gestion des conflits de travail», note-t-il avant de réitérer son appel en direction des autres syndicats à une «action commune pour la défense des libertés syndicales». Enfin, notre interlocuteur n'a pas omis de présenter ses condoléances à la famille du défunt Boualem Mebarki, président de l'UNPE «qui nous a soutenus dans toutes nos actions».