La pêche à la ligne retrouve ses lettres de noblesse, en ces journées printanières, parmi les jeunes des villages de Beni Mansour et Toghza, après avoir disparu il y a quelques années, à cause naturellement de l'absence des poissons d'eau douce. Munis de cannes à pêche, des jeunes gens se rendent chaque jour à l'oued Sahel pour pêcher «le barbeau et l'anguille qui y pullulent», nous dit un pêcheur amateur en route vers le lieu. Ces pêcheurs se postent sur les berges de ce cours d'eau, pollué au demeurant, pour évidemment pêcher, et connaissent des fortunes diverses lorsqu'ils décampent. Toutefois, ce qu'ils ne prennent pas au sérieux, ou tout au moins en considération, c'est la présence de l'essence, issue de la dilution du pétrole, qui a contaminé l'oued Amarigh, lequel est un affluent de l'oued Sahel. Un jeune pour toute réponse se moquait de cet état de fait, en s'entêtant quand même à pêcher du poisson pollué à l'essence, que l'on ne sait par quel miracle (mutation rapide ?) il survit encore dans des eaux polluées. En tout cas, les pêcheurs ne cherchent apparemment pas à savoir, l'essentiel pour eux c'est qu'ils arrivent à remplir leurs paniers de poissons qui fumeraient peut-être l'essence lors de leur cuisson. Toutefois, quelques-uns croient dépolluer ou purifier ces poissons des déchets nocifs, en procédant à une astuce (superstition ?) qui consiste à saler les poissons et les mettre dans un frigo, comme ça, croient-ils, «ils sont nettoyés des déchets toxiques». Faut-il souligner que depuis l'érection du barrage de Tilesdit, dans la wilaya de Bouira, l'oued Sahel «se charge» de poissons qui proviennent de ce barrage. Mais la pollution et la décrue font que ces poissons disparaissent à un certain coin très pollué de cette rivière. Il est loin le temps où son eau était limpide et les poissons très bio. L'on buvait de son eau et irriguait les cultures maraîchères, avant que ce oued ne devienne un réceptacle des ordures ménagères et un gigantesque collecteur des réseaux d'assainissement.