L'enlèvement, mercredi dernier au Niger d'un touriste français et de son chauffeur algérien, est l'œuvre d'un groupe islamiste dirigé par un certain Taleb Abdoulkrim, prédicateur de la mosquée de Inhallil, localité située à la frontière algérienne. Cette affaire intervient au moment où les déplacements de touristes étrangers ont été formellement interdits dans certaines zones du Hoggar et du Tassili. L'enlèvement qui s'est produit mercredi soir près de la localité nigérienne de Tiguidan Tessoun, à équidistance de la frontière avec l'Algérie et de la frontière avec le Mali, a été exécuté avec minutie, rapportent des sources sécuritaires qui précisent que c'est la première fois que le groupe Taleb Abdoulkrim a recours à cette pratique. Connu surtout pour la virulence de ses prêches, l'imam Abdoulkrim, fervent défenseur de la «sahwa» islamique, pourrait rétrocéder les otages à d'autres groupes plutôt que de négocier lui-même leur libération. Les services de sécurité nigériens soupçonnent un probable deal entre le prédicateur et ses deux acolytes Abou Yaya Hamane et Abou Zeid, ces deux derniers étant plus rompus à ce genre de marchandage. Jusqu'à hier, c'est le black-out total sur l'identité des deux personnes enlevées. Côté français, on confirme qu'il s'agit «probablement» d'un touriste mais sans autre précision sur son nom, sa profession et les raisons pour lesquelles il se trouvait dans un endroit pourtant vivement déconseillé aux ressortissants français par le Quai d'Orsay. Côté algérien, les agences de voyages que nous avons pu joindre hier à Tamanrasset disent tout ignorer de cette affaire. Elles ne savent pas non plus grand-chose de l'identité des deux otages, ni pour quelle agence travaillait le chauffeur algérien. Le Hoggar et le Tassili sous la loupe Pour autant, les opérateurs touristiques algériens établis à Tamanrasset s'inquiètent des restrictions qui leur sont imposées depuis ces derniers jours. Un opérateur touristique nous confirme que les services de sécurité ont restreint les déplacements de touristes étrangers dans la région du Hoggar. Il précise que les visites sont autorisées uniquement dans l'Assekrem, du côté de Tahifet, Oued Tenguet et Timekrest. «Même la route d'Ideless est interdite», précise notre source qui s'interroge sur le bien-fondé des nouvelles mesures sécuritaires qui ne font qu'étouffer selon lui la profession. «Cherche-ton à tuer une seconde fois le tourisme saharien ?» s'indigne-t-il, estimant que ce genre de pratique ne fait que ternir l'image de marque de l'Algérie. «La situation sécuritaire est parfaitement maîtrisée, il n'y a d'ailleurs eu aucun problème durant cette saison et depuis très longtemps», explique le voyagiste qui relève au passage que l'ensemble du massif du Hoggar est sous la loupe des services de sécurité. Un autre voyagiste a confirmé ces propos, ajoutant qu'il a été exigé dernièrement des agences de voyages activant au niveau de la wilaya de Tamanrasset de signer une «déclaration sur l'honneur» de ne pas se déplacer avec les touristes étrangers sur certains axes, entre autres la route Tamanrasset-Djanet. Les agenciers auraient, selon lui, exigé une justification officielle pour renégocier les circuits avec les tours opérateurs européens. Craint-on une probable incursion de groupes terroristes dans le Hoggar et le Tassili où, présentement, le nombre de touristes étrangers, européens essentiellement, a atteint un pic jamais égalé ? Possible car, depuis la réunion d'Alger du 16 mars dernier et la mise sur pied à Tamanrasset du commandement militaire unifié entre l'Algérie, le Mali, le Niger et la Mauritanie, Al Qaïda sait ses jours comptés et ses éléments résignés à subir l'offensive militaire qui se prépare fébrilement dans la région. Le reste n'est que diversion.