Plus de 100 médicaments indispensables, dont ceux prescrits pour les malades chroniques, sont fréquemment en rupture de stock. Cette situation s'est aggravée à cause de la non-disponibilité du générique produit par Saidal. Cette pénurie perdure depuis quelques mois puisque la liste des médicaments absents des étals des officines s'est allongée aux produits génériques conçus par le laboratoire pharmaceutique national Saidal, qui a enregistré une grande perte en matière première à cause d'un incendie. Une virée effectuée au niveau des officines de la capitale nous a permis de confirmer cette information. La pénurie touche toutes les catégories de produits pharmaceutiques, des corticoïdes injectables aux pommades ophtalmiques, les sirops antitussifs, les antibiotiques, les antihistaminiques d'hormones, les collutoires, les vitamines, les contraceptifs. Une longue liste de traitements manque sur le marché, entre autres, Médrol prescrit pour l'arthrose, Solpred (corticoïde), Syntrom (anticoagulant), Aldomet (antihypertenseur), Glucobai (antidiabétique)… Les pharmaciens interrogés incriminent directement les nouvelles mesures instaurées par la loi de finances complémentaire 2010. «Nous savons que ces dispositions sont bénéfiques pour l'économie nationale, mais il aurait été préférable de prévoir les conséquences néfastes sur les malades, surtout que la plupart des médicaments interdits à l'importation ne peuvent pas être remplacés, comme le Glucobai pour les diabétiques ou encore le Monotildiem. Il faut reconnaître que la dépendance de l'Algérie en matière de médicaments est flagrante», explique un pharmacien d'El Biar, qui ajoute : «La mise en vigueur de ces mesures a été faite dans la précipitation, alors que les laboratoires locaux n'ont même pas pris leurs dispositions pour répondre aux manques flagrants de certains produits.» Son confrère insiste sur le fait qu'il est carrément impossible de convaincre un malade de remplacer son traitement habituel par un générique. Ces nouvelles dispositions prises par le gouvernement, dans le but d'encourager la vente des médicaments génériques, a compliqué la situation. La mesure mise en place d'une manière brutale concerne l'interdiction d'importation de 400 médicaments. Et même si cette mesure a fait gagner à l'Algérie entre 200 et 220 millions d'euros, elle a par contre pénalisé plusieurs patients souffrant de différentes maladies, notamment chroniques. La deuxième mesure et non des moindres concerne l'application de la nouvelle taxe de 5% sur les bénéfices nets réalisés sur les médicaments achetés à l'étranger, ce qui explique le retrait de laboratoires pharmaceutiques étrangers. Les pharmaciens ne cessent de dénoncer cet état de fait sans que les instances concernées n'interviennent. Les malades, pour leur part, font appel aux membres de leurs familles installés à l'étranger pour leur procurer le traitement indisponible, comme le Sabril, indispensable pour les bébés souffrant du syndrome de West. Par ailleurs, cette situation profite aux fournisseurs qui y trouvent leur compte en imposant des tarifs excessifs. Une pratique devenue pourtant courante, affirme la corporation des pharmaciens, dont l'un d'entre eux donne l'exemple d'un importateur qui est venu lui proposer «pour 100 000 DA, 10 boîtes d'Accucheck, un médicament en rupture de stock, nécessaire aux diabétiques, 10 boîtes de Lutenyl pour les femmes qui présentent des cas de stérilité et de grossesse difficile, et 5 boîtes d'un autre produit qui n'est pas demandé». Des offres similaires ne manquent pas. Belambri Messaoud, président du Syndicat national des pharmaciens d'officines (Snapo), avait pour sa part déjà confirmé et dénoncé cet état de fait : «Ce phénomène n'est pas nouveau.» Alors, les pharmaciens, pour rendre service à leurs fidèles clients, font l'exception et achètent à des prix exagérés certains médicaments demandés avec insistance par ces malades.