Un an après la publication du premier tome qu'il a consacré aux aînés de la presse algérienne, Horizons récidive et livre à ses lecteurs une seconde compilation sur ces hommes et ces femmes qui ont été pour beaucoup dans l'essor de la presse algérienne. La réalisation de cet ouvrage, entièrement consacré aux journalistes et aux professionnels assimilés, se veut un défi que le journal Horizons s'est lancé, il y a deux ans, et à travers lequel il ambitionne de créer ce lien entre les journalistes de la nouvelle génération et ce que sa directrice appelle respectueusement les «anciens». Mais c'est surtout un hommage soutenu qu'il rend à ces «aînés» qui ont fait l'histoire de la presse algérienne et par là même effacer un tant soi peu «l'oubli qui tue plus douloureusement que ne le fait la vraie mort». Le tome II débute avec une évocation, celle d'un brillant journaliste des années 1930, Mohamed Bensalem, natif de Médéa, devenu plus tard l'enfant terrible de Laghouat. C'est dans les colonnes d'Alger républicain que Bensalem donnera la pleine mesure de son talent d'agitateur politique. Décédé en 1985, il laissera pour l'éternité des témoignages pleins d'enseignements, dont celui-ci : «J'ai commencé le combat (contre le colonialisme, ndlr) sans fortune et, après 32 ans de lutte, la victoire acquise, j'ai l'honneur de ne posséder, comme il y a 32 ans, aucune fortune.» Il s'en ira pratiquement dans l'anonymat, comme le fera, en 1999, Mohamed Morsli, ce «malgache si recommandable», qui dirigea par deux fois le quotidien El Moudjahid. Inflexible mais profondément juste, humble mais très fier de ses origines, Morsli a laissé une empreinte indélébile dans la mémoire de tous les journalistes qui l'ont connu. L'ouvrage nous rappelle au souvenir de notre ami et collègue Halim Mokdad, décédé des suites d'une maladie qu'il a trainée pendant de longues années. Cette maladie, «Primus» l'a contractée dans les années 1970, dans un de ces pays africains alors en lutte pour leur indépendance ; elle finira par le terrasser un certain 7 mars 2001. Daniel Huguet, plus connu sous le nom de Ali Habib, était un partisan farouche de l'Algérie algérienne. A 20 ans, ce français de souche se fit insoumis et refusa de combattre en Algérie, conscient de la justesse de la cause des Algériens. En octobre 1962, il se rend en Algérie pour la première. Il ne la quittera que contraint et forcé dans les années 1990 pour s'établir à Paris. Malgré l'éloignement, les renoncements et les trahisons des uns et des autres, Ali Habib ne s'est jamais désavoué : «J'aime l'Algérie, je suis Algérie, je ne supporte pas qu'on me dise que je ne suis pas algérien. Je ne supporte pas cette idée… Dans tous les cas, je choisirai l'Algérie même si elle a tort.» Il exerce actuellement au quotidien Le Monde après toute une carrière passée à El Moudjahid. Zoubir Zemzoum, l'homme qui a ouvert les colonnes de Révolution africaine, l'organe central du FLN à l'opposition clandestine, Rachid Lourdjane, l'éducateur devenu grand-reporter, Djamel Saïfi, «le grand frère en chef», Nadjib Stambouli, «le gentil red-chef», et Ahmed Ancer qui paya son audace journalistique par une «interdiction d'écrire» de plusieurs années, l'ouvrage dresse le portrait de nombreux confrères qui n'ont jamais baissé les bras devant l'adversité, la censure et la bêtise de quelques décideurs, fort peu nombreux heureusement. Slim, «le père de Bouzid», Hiahamzizou, illustrateur et concepteur d'affiches de films, Rachid Ferguene, le documentaliste considéré comme «la mémoire» d'Horizons, Krimo Cherchar, dit «Tarzan», les regrettés Mohamed Tolba, le correcteur surnommé «œil de lynx», et Mohamed Laïdi, l'universitaire qui fit du secrétariat de rédaction sa passion, figurent également dans ce recueil que l'éditeur devrait diffuser parmi toutes les rédactions. Les concepteurs du tome II n'ont pas «oublié» les confrères de l'audiovisuel, en particulier ceux à que le métier a ouvert d'autres perspectives. Citons, entre autres, Nouara Djaafar, Miloud Chorfi, Azzedine Mihoubi et Ammar Bakhouche. L'ouvrage rend également un hommage appuyé aux photographes Mokhnachi (Lazhar et sa fille, tous deux décédés), aux linotypistes et aux nombreux journalistes assimilés sans lesquels il est plus que risqué de s'aventurer dans le monde du journalisme et de la presse. Afin que nul n'oublie, une pieuse pensée est demandée à tous ceux qui ont eu à connaître les regrettés Kaddour Bousselham, Kamel Belkacem et bien d'autres journalistes que la providence nous a ravis.