Les autorités de Tripoli se disent toujours capables de faire mieux et elles tentent de le prouver une fois encore. Après avoir été élue contre vents et marées au Conseil des droits de l'homme des Nations unies -la tentative de blocage par une smala d'ONG n'a pas pesé lourd devant les 155 voix "pour" son intégration- la Jamahiriya vient de faire une offre du moins inattendue. Si la Grèce, profondément européenne qu'elle soit, désire se faire prêter de l'argent, le gouvernement de Tripoli est tout à fait prêt à l'aider. Un prêt en espèces ? Les deux parties pourraient bien passer un marché qui intéresse particulièrement la Jamahiriya du colonel Mouammar El Kadhafi. En matière d'énergie, toute coopération étroite serait la bienvenue. A présent que le plan d'austérité du gouvernement Papandréou est en action -Athènes a reçu la première tranche de la colossale aide financière du tandem UE-FMI- la Grèce acceptera-t-elle la proposition de la Jamahiriya libyenne ? Les autorités d'Athènes n'ont pas réagi immédiatement à la déclaration faite par le Premier ministre libyen. Mais celui-ci peut toujours espérer une réponse positive de la part du gouvernement Papandréou qui doit être ravi que le président Obama ait obtenu le feu vert du Sénat pour réformer Wall Street, en attendant de "rééduquer" réellement les redoutables "hedge funds". Au-delà de la coopération dans le domaine de l'énergie à quoi pourrait s'attendre le colonel Kadhafi ? Six ans après la levée de l'embargo européen sur la vente d'armes à la Libye, ce qui lui permettait de songer à devenir une puissance militaire régionale, les tensions diplomatiques n'ont pas cessé d'envenimer les relations euro-libyennes. L'affaire Lockerbie, celle des infirmières bulgares et tout dernièrement celle opposant Tripoli à Berne qui n'a pas aimé que l'un des fils du colonel maltraite ses domestiques. Si, à priori, le guide n'est pas encore parvenu à devenir l'ami intime de la famille royale britannique, prétendra-t-il à redevenir celui des hauts responsables de l'Union européenne qui ne figurent plus sur la liste noire, établie selon le droit de réciprocité ? Le renforcement des relations bilatérales gréco-libyennes ouvrirait la voie à la Jamahiriya afin qu'elle puisse regagner en estime parmi les Vingt-Sept. Puisqu'il faut le rappeler, le différend entre Berne et Tripoli n'a pas encore connu de fin heureuse. La Libye exige toujours un arbitrage international, seul habilité, selon elle, à remettre les pendules à l'heure de la réconciliation. Alors que le Britannique David Cameron a déclaré que le Royaume-Uni se refusera à tout nouveau transfert à Bruxelles (ça promet !) et que les députés allemands viennent enfin d'adopter le plan d'aide à la zone euro, la Jamahiriya s'offrira-t-elle le rôle du bon Samaritain qui se propose à aider au moment où Angela Merkel croit savoir que l'échec de l'euro sera celui de toute l'Europe ? S'élèveraient des voix au sein même de l'Union européenne qui diraient ne pas aimer voir se vendre l'image de l'Europe qui s'endette auprès de la Jamahiriya libyenne que certains Occidentaux pensent qu'il ne s'est pas définitivement débarrasser de son prétendu statut de "pays infréquentable". Persistante, la crise européenne lui permettrait de prouver tout le contraire.