Respectivement sélectionneurs de l'Espagne et des Pays-Bas, opposés en finale, Vicente Del Bosque et Bert Van Marwijk ont replacé l'expression collective au centre de la scène. Discrétion et tempérance. Aux antipodes de la manière d'être de Diego Maradona, Bert Van Marwijk et Vicente Del Bosque ne sont pas des entraîneurs émotionnels. Stoïques au coeur de la bataille, ce sont deux joueurs d'échecs qui s'affronteront, dimanche à Soccer City, en finale de la Coupe du monde. Retour sur leur parcours, leur méthode et leurs conceptions du jeu. Vicente Del Bosque L'homme du Real Madrid Avec le club merengue, il a remporté entre autres deux Ligues des champions (2000-2002) et deux championnats (2001-2003). Malgré quatre années de succès, Florentino Perez n'a pas reconduit son contrat en 2004. Une blessure pour celui qui n'avait presque jamais quitté un club dans lequel il a fait toute sa carrière de joueur, avant d'intégrer le staff technique. Auteur de plusieurs intérims sur le banc, il devient coach des Merengue en novembre 1999. Après son départ forcé du Real, il a furtivement entraîné le Besiktas d'Istanbul en 2004-2005. Avant de prendre les rênes de la Roja en 2008. Un fin psychologue Avec son allure débonnaire et sa silhouette bonhomme, le moustachu de 59 ans sait comment s'y prendre avec les stars et leurs ego. Il a recadré ses joueurs après la défaite inaugurale contre la Suisse (0-1) en se disant «fâché». Strict mais pas trop. Ronaldo le noctambule a d'ailleurs brillé à ses côtés au Real Madrid. «Ma tâche est de demander aux joueurs des efforts quotidiens, mais il ne s'agit pas d'imposer quoi que ce soit, ni de démontrer que c'est moi qui commande.» Il n'a toutefois pas hésité à trancher en mettant Fernado Torres sur le banc contre l'Allemagne. «C'est un grand entraîneur, il est fin psychologue aussi, très investi auprès des joueurs», confirme Sergio Ramos Dans la continuité d'Aragones Il surfe avec talent sur la vague du succès de cette génération dorée. Il s'appuie sur l'épine dorsale de la formation sacrée championne d'Europe et a conservé le «toque» mis en place par son prédécesseur. L'art et la manière. En 32 matchs sous ses ordres, l'Espagne n'a perdu qu'à deux reprises. Bert Van Marwijk «M. Personne» chez les cadors En emmenant les Pays-Bas en finale, comme Rinus Michels en 1974 puis Ernst Happel en 1978, Bert Van Marwijk (58 ans) a intégré le gotha mondial. Au regard de sa modeste d'ailier gauche (une sélection) et de ses états de service d'entraîneur (Fortuna Sittard, Feyenoord, où il a gagné la Coupe de l'UEFA en 2002, et Borussia Dortmund), sa nomination à la tête des Oranje en 2008 avait pourtant surpris. Pour éviter que l'absence des références Ajax, PSV ou Barça sur son CV ne constitue un handicap, Van Marwijk s'est entouré, avec Philip Cocu et Frank de Boer, d'adjoints répondant au nec plus ultra néerlandais. Discipline et chasse aux ego Van Marwijk impose son autorité en évitant les conflits. Son credo consiste à faire comprendre à sa noria de joyaux offensifs qu'ils brilleront sous condition de respecter la discipline collective. Et quand un joueur dérape - Van Persie contre la Slovaquie -, le sélectionneur batave règle l'affaire entre quatre yeux. «Ce n'est jamais bon signe quand tout se passe trop bien pendant six semaines. Mais il faut être préparé à canaliser les ego», avait-il prévenu avant le Mondial. «Il nous a appris à accepter nos partenaires. Chacun joue dans le respect des qualités et des défauts des autres», reconnaît Dirk Kuyt. Pragmatisme allemand comme antidote à l'arrogance «Le plus important, c'est la victoire», martèle Van Marwijk. «On doit apprendre à gagner en jouant mal. La vitesse a pris le pas sur la créativité.» Une révolution au pays du «football total». Le sélectionneur néerlandais demande ainsi à ses joueurs «d'adopter le style allemand» en termes de réalisme et d'efficacité. «Dans le passé, après deux victoires, nous pensions que l'essentiel était fait. Et on se faisait sortir par excès d'arrogance. C'est fini», lance-t-il comme un talisman avant la finale.